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Great Ocean Road

Mince. Je me rends compte que je vous promet des choses que malheureusement je ne peut même pas réaliser. Là, par exemple, au dernier billet, je vous avais promis que j’allais voir la Great Ocean Road aujourd’hui. Malheureusement, encore une fois, j’ai sous-estimé les distances. Attention, soyons précis, j’ai vu de l’océan, pour sur. J’étais sur une route, pour sur. Par contre je ne peux pas affirmer que c’était « great ». Ceci dit, point d’inquiétude, je vous ai bien dit que la route susnommée ne méritait son nom que sur sa partie orientale, que j’estime commencer au niveau des Douze Fucking Apôtres.

C’est donc sous une ambiance de tempête, vent force 9, bruine, ciel bas, mer agitée à très agitée, que j’atteins pour la première fois la côte sud, face à la mer de Tasmanie. De manière fort DSC_7110_DxOsympathique, les responsables du développement touristique ont, pour une fois, placés des « look out point » tout les 500m. C’est vraiment tant mieux car la plupart du temps, la route suit la côte légèrement en retrait derrière un mur de gros buissons rabougris, battus par le vent. Je m’arrête donc régulièrement pour aller apercevoir une petite crique et de petites falaises sympathiques mais à l’aspect fragile. Aussi régulièrement, je me précipite dans la voiture pour retrouver une atmosphère plus feutrée et calme.

DSC_7108_DxOAprès quelques heures de ce petit manège, je commence à me lasser de sortir tout plein d’excitation pour finalement n’apercevoir qu’une côte, certes jolie, mais loin d’être grandiose. A sa décharge, le temps ne met pas vraiment en valeur le paysage même s’il met en valeur l’atmosphère. Ce n’est que vers la fin de l’après midi que finalement, après un ultime « look out point », que j’assiste à un magnifique déclin de soleil à travers des nuages de tempête baignant une côté agitée par les vagues où percent des rochers sérieusement entamés par l’érosion. Là, ça commence à causer. Ce n’est pas encore les Douze Apôtres mais c’est un joli avant goût. Ici les falaises ne sont finalement pas très hautes, à peine dix à quinze mètres au dessus de l’eau mais le chapelet d’îles isolées par les assauts répétés de l’eau rend la baie photogénique. Quand le soleil s’y met, ça devient glorieux. Je crois qu’un jour je deviendrai aveugle à force de contempler des soleils couchant.

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La conséquence de ce coucher de soleil est qu’il faut vite fait que je me trouve un camping pour la nuit sous peine de me faire vilipender par mon loueur de voiture qui, je suis sur, me suit par satellite. Comme par hasard, c’est au moment où on en cherche un, sur une des routes les plus touristiques de la région, que l’on est bredouille. Finalement, je trouve un caravan park à Peterborough, état du Victoria, capitale Melbourne. La fréquentation étant proche de zéro, on m’offre même gratuitement un emplacement avec électricité. Il faut dire que cette pluie n’attire pas grand monde.

Le lendemain matin, la vérité nue éclate au grand jour, l’impudique : il va faire un temps de chien pourri à ne pas mettre un bébé dehors. Le vent souffle fort en rafale et la pluie est drue. Quand au ciel, il est bas, merci pour lui. Ce doit être le temps rêvé pour effectuer une journée de ballade le long d’une route scénique. Aller, pas le temps de s’apitoyer sur mon sort, je petit déjeune rapidement, me lave et repart sur la route.

DSC_7131_DxOAssez rapidement, je retombe sur de nouveaux point de vues que j’attaque avec gourmandise. Oh que… c’est… pfff… beau… pfffrrt. Rhaaa, ce vent qui m’amène des seaux d’eau dans la gueule, qu’est ce que c’est bon ! Je remonte dans la voiture et enlève mon blouson, trempé. Pour le pantalon, c’est beaucoup plus difficile. Allez, en route vers le prochain « look out point ». Essuie glaces à vitesse maximale (après un clignotement intempestif) je continu pendant un demi kilomètres et m’arrête à un nouveau parking. J’ouvre la porte et me retrouve instantanément sous la douche. Pffff, wah, c’est…. vraiment… drôlement, euh, ppfffffrt… agité ? Après quelques minutes pendant lesquels mes habits se retrouvent imbibés d’eau, je retrouve la voiture. En route pour le point suivant.

Un petit kilomètre plus loin, j’endure la même punition et abandonne l’idée de maintenir ma DSC_7129_DxOcapuche en place. Bon, là, ça commence à être pénible. Je décide donc de ne m’arrêter que pour les points de vue haut de gamme. D’ailleurs je me souviens avec un petit sourire d’auto-connivence que j’ai dans mon sac à dos un pancho récupéré du Vietnam. J’ouvre le sachet plastique et découvre un mince kway bas de gamme d’une épaisseur équivalente à une poche plastique de supermarché. Je tente malgré tout le coup et l’enfile comme je peux. Je sort. Pfffffrrrttttttt, rrrrhaaaaa, bon c’est un… échec…. ppfffffrrt. Regardons le point de vue en essayant de résister au vent. Allez, c’est bon. Je repart en courant vers la voiture et constate les dégâts. Le poncho est en lambeau. Aaaah, mais c’est quoi cette camelote vietnamienne?!

Maintenant, c’est décidé, je ne m’arrête plus jusqu’aux Douze Fucking Apôtres. Le chauffage à fond, je tente d’évaporer le maximum d’eau de mes habits tout en suivant la route, les essuie glaces en marche. Après quelques kilomètres pendant lesquels je snobe ostensiblement tout panneau indiquant un point de vue, j’aperçois une indication « parking Twelve Apostles ». Mon intuition et mes connaissances en anglais me hurlent que c’est ici. Je me gare donc parmi un nombre notable d’autres voitures, fait rarissime depuis hier. En inspirant un bon coup j’ouvre la porte et me précipite dehors jusqu’au centre des visiteurs. Première étape. Après quelques minutes à regarder s’il n’y aurai pas une petite exposition histoire de sécher, je reprend une nouvelle inspiration et part en courant dehors, empruntant un passage souterrain pour atteindre les falaises.

DSC_7134_DxOQuelques secondes plus tard, j’aperçois à droite la côte déchiquetée et une enfilade en perspective d’aiguilles rocheuses. Les voilà ces saloperies d’Apôtres. Dans la foulée, je me fait copieusement arroser et tente malgré tout de prendre quelques photos. Je dois dire que c’est extrêmement difficile de maintenir le cadre stable avec des rafales de vent. Ci fait, je repart en joggant vers un point de vue un peu plus loin en hauteur. Cette fois-ci j’ai une vue un peu plus large des aiguilles. Ma première réaction est alors : ah, oui, c’est joli. Ensuite, j’ai le vague sentiment de m’être fait tromper. Les photos que j’avais vu me donnait l’impression que ces falaises DSC_7135_DxOet aiguilles étaient gigantesques. Certes, il n’y a pas que la taille qui compte, mais par rapport aux falaises de Mohair en Irlande ou les falaises de craie de Normandie, je trouve ça moins impressionnant. Sur une des photos ci-dessous, à droite vous apercevrez un petit personnage. Cela vous donnera une idée de l’échelle. Je vous laisse juge. Peut être suis-je démoralisé par le temps, par la lumière plate, mais après cinq minutes, je repart à la voiture. Heureusement que j’ai vue Uluru, sinon…

DSC_7137_DxOAprès quelques kilomètres, la route et les paysages changent. Le relief devient plus prononcé et forestier. De grandes forêts de hauts eucalyptus bordent la route qui commence à zigzaguer. De manière assez étrange, cette transition s’opère quasiment au point le plus au sud de la côte, DSC_7138_DxOà hauteur du cap Otway qui signale l’entrée occidentale du détroit de Bass, le bras de mer séparant le continent de la Tasmanie. D’ailleurs, en redescendant de l’autre côté, vers l’est, le temps s’éclairci quelque peu et j’atteins la petite ville d’Apollo Bay avec un peu plus d’espoir pour la suite de la journée.

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Trempé, je ne suis pas très motivé par l’idée de manger un nouveau sandwich froid, même s’il est fait maison. Je gare donc la voiture au bord de la plage et parcourt un peu la rue principale à la recherche d’un restaurant pas trop cher. De manière surprenante, je constate une petite poignée de petits cafés restaurants chaleureux proposant des plats du jour bio. Je me laisse tenter par l’un d’eux proposant une soupe du jour et un pain fait maison. Je peux vous le dire maintenant, avec le recul, ce sera le clou gastronomique de mon séjour australien. C’est fou comme tout est une question de moment, d’alignement des astres, de conjonction planétaire. J’avais besoin d’un bon plat chaud et on me sert un exquis potage aux châtaignes (attention, profitez en, j’use peu des superlatifs), admirablement relevé et avec ce trait de génie brute consistant en un subtile DSC_7143_DxOsaupoudrage de cacahuètes concassés. Le bol est servi chaud, juste comme il faut pour ne pas souffrir inutilement, et comme promis en devanture, accompagné d’une boule de pain, chaude également, ainsi qu’un généreux pot de beurre. Voilà. C’est tout ce qu’il faut pour être heureux. Quand on pense en plus que l’ambiance était au sympathique dans ce petit café restaurant, autant vous dire que je suis resté un peu plus pour prendre un café et bouquiner mes aventures de Richard Bolitho. Le tout, avec la mer en face, de l’autre côté de la route. Sinon, ça n’a pas d’intérêt.

Après une petite sieste digestive dans la voiture, je reprend la route. De ce côté ci, la côte est DSC_7148_DxOmontagneuse et pour le coup, c’est la véritable Great Ocean Road. D’accord, là je veux bien. Ok. Effectivement, c’est plutôt chouette voir même très chouette. Un grand soleil perce sur la mer mais les reliefs sont encore sous la pluie. Magie de la nature mainte fois renouvelée mais jamais égalée, un arc-en-ciel fait son apparition, le modèle haut de gamme, double. Ma moyenne en prend un coup. Je poursuit malgré tout, m’arrêtant régulièrement lorsque la route s’élève pour profiter du panorama au moins du même niveau que Big Sur, en Californie.

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Malheureusement, rapidement je suis rattrapé par la pluie et les choses reprennent un aspect plus morne et déprimant. C’est finalement arrivé à Geelong, une ville moyenne au sud-ouest de Melbourne, que la route côtière s’achève. M’en fout, j’ai fait la Great Ocean Road. Je peux maintenant quitter l’Australie en paix.

Mount Gambier

Le problème en Australie (et pas qu’en Australie d’ailleurs) c’est qu’il ne savent plus camper de manière rustique. Tout de suite il faut qu’ils y aillent avec leur salle de jeu, leur cuisine et barbecues, le tout sur une pelouse manucurée et rasée du matin. D’ailleurs lorsqu’on demande un emplacement sans électricité, un grand nombre de fois, on me regarde avec des yeux ronds, comme si j’étais un homme des cavernes. De ce point de vue là, je crois bien que Brett Sinclair l’a définitivement emporté sur Dany Wilde. Non pas que je n’aime pas mon petit confort mais c’est juste que parfois j’aimerais bien ne pas payer un emplacement de camping qui correspond vaguement aux trois mètres sur cinq de ma voiture (plus un petit espace pour poser la chaise pliante afin de déguster une bière en toute quiétude) au prix d’une petite chambre d’hôtel deux étoiles. Bon j’exagère, mettons une nuit en dortoir.

Je grogne, je grogne mais je dois bien vous avouer que je suis quand même bien content lorsque les lieux proposent un accès WiFi. Je le suis d’autant plus lorsqu’il se met à dracher des hallebardes dans une température pré-arctique de 14°C (je ne supporte plus la non-chaleur) et qu’un abri chauffé commun proposant cuisine, table et chaise est accessible librement. Là, je suis bien content de payer plus de 30$ la nuit.

Ce soir ci, à Mount Gambier, je suis bien content de le faire, par exemple. Déjà que le couchage bricolé à partir de planches d’aggloméré est moins confortable qu’un bête tapis de mousse, mais en plus mon duvet certifié confort jusqu’à 10°C commence à montrer des signes de faiblesse. Avec tout ça, je passe une nuit limite et me réveille de bonne heure, une fois n’est pas coutume.

Heureusement, alors que je rentre dans la partie commune où je m’apprête à petit déjeuner, je salue les deux vieux messieurs assis à leur table, en train de se préparer un solide en-cas saucisses et œufs brouillés. Après les salutations d’usage et un moment de silence, nous brisons la glace. De manière assez amusante l’un des deux est bavard alors que l’autre est taciturne.

DSC_7007_DxOL’autre grande surprise de ce matin est une brume flottant dans les vallées alors qu’un magnifique soleil s’annonce. Pour ne rien vous cacher, le camping est sur le fameux mont Gambier qui se trouve être un volcan, petit mais tout de même. D’ailleurs trois cratères sont visibles à cinq minutes DSC_7014_DxOde marche, dont un très joli rempli d’eau appelé Blue Lake. Je me dépêche donc de profiter du spectacle tant que la lumière dorée est là. Que la nature est belle, souvent. Ce matin elle me régale de grands bols de brouillard coincés au fond de cratères percés par les rayons de soleils que viennent dessiner les silhouettes des arbres. Une petite rosée recouvre la végétation mais malgré un petit air vivifiant, le soleil commence déjà à me réchauffer.

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Finalement, je reprend la route vers la côte et retrouve rapidement un relief plat. C’est vraiment étonnant ce continent où on a l’impression que les reliefs ont été posés sur un terrain plat préexistant. D’ailleurs après un quart d’heure de route, j’aperçois une sorte de colline à l’aspect conique à gauche suivi rapidement d’une pancarte indicatrice marqué « Mount Schank ». Ni une, ni deux, ni pi, je met le clignotant, ce qui provoque l’activation des essuies glaces, et emprunte la route. Je me gare à un petit parking sous les arbres et décide d’aller faire une petite marche sur le sentier qui monte au sommet.

DSC_7035_DxOArrivé en haut, je constate un fort vent mais surtout découvre que le mont en question est lui aussi un cratère volcanique. Encore plus étonnant et sa situation isolé au milieu d’un paysage de pâturages toujours aussi plat. Au loin on aperçoit les reliefs de Mount Gambier ainsi qu’un autre cône à l’aspect nettement volcanique. A part deux filles que je croise, je me retrouve tout seul à faire le tour du cratère, profitant de la vue. Au loin, on aperçoit même quelques éclats étincelants sur l’océan.

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DSC_7057_DxOMalgré l’intérêt certain du lieu d’un point de vue géologique et paysager, je suis particulièrement fasciné par l’activité agricole que j’aperçois en bas. Des troupeaux de moutons broutent tranquillement une herbe qui même à cette distance me paraît bien grasse. Tout à coup j’aperçois un petit véhicule à quatre roues s’approchant vers eux. Scrutant plus attentivement, je reconnaît un quad. Il s’approche des moutons et commence à les repousser vers l’autre bout du champs en effectuant des grands mouvements autour. Une petite forme noire suit plus ou moins la trajectoire du quad, sans doute un chien de berger. Cette petite scène vue du ciel est tout à fait fascinante. Une pensée me vient quand même à l’esprit : ils sont quand même bien bourrins ces australiens de faire ça au quad. Certes, c’est en net progrès par rapport aux immenses cattle ranch de l’outback qui se servent d’hélicoptères pour regrouper les vaches.

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Finalement, m’arrachant au spectacle, je redescends à la voiture puis reprend le chemin de la côte. Aujourd’hui, c’est la Great Ocean Road !

Vers la Great Ocean Road

Moi, quand j’ai planifié mon voyage (ce qui est un grand mot, quand on voit comment j’improvise les choses une fois arrivé dans chaque pays), j’avais coché deux choses primordiales à voir en Australie: Uluru et la Grande Route Océanique, libre traduction personnelle de « The Great Ocean Road ». Si vous êtes un tantinet anglophone, et même un tantinet francophone vu que je vous l’ai traduit (pour les autres, je vous dis merde parce que de toute façon vous êtes même pas capable de comprendre ce que j’écris), vous comprendrai qu’il y a quelque part dans ce vaste pays une route qui soit traverse un océan, soit y passe à proximité, le tout d’une façon qui claque violemment sa mère, pardonnez-moi l’expression.

Cette grande route océanique (je laisse tomber les majuscules pour ne pas trop vous impressionner) ce situe sur la côte entre Adélaïde et Melbourne, plutôt dans sa portion orientale. A vrai dire c’est plus un ensemble de routes bien qu’une portion bien spécifique porte ce nom. Cette portion là a d’ailleurs été construite après la seconde guerre mondiale par des soldats revenus du front, histoire de les occuper et de leur réapprendre à utiliser leurs mains pour autre chose que de tuer son prochain.

Sur cette route qui est grande, il y a notamment une série de douze aiguilles calcaires au large de la côté bordée de falaises qui sont tellement sublimes, d’après mon guide et moult documentaires que j’ai eu la joie de contempler, qu’on leur a donné le nom des Douze Apôtres. Pour le coup, je remet quelques majuscules pour l’effet théâtrale mais je me dis que ça aurait encore plus claqué sa mère si on les avait nommés les Douze Fucking Salopards. Bref, tout ça pour introduire le fait que je me dirige présentement vers le sud d’Adélaïde, en direction de la côte.

Avant de reprendre ma narration je souhaiterai évoquer avec vous quelque chose que je trouve toujours amusant. Lorsque je prépare un voyage, je passe un peu de temps à contempler des cartes. La plupart du temps je me contente d’une vue administrative ou du réseau routier. J’ai donc beaucoup de mal à m’imaginer la nature du terrain dans toutes ces vastes régions. En ce qui concerne l’Australie, j’avais une bonne idée de la nature des paysages autour de Sydney ainsi qu’au centre que je voyais plutôt désert, rouge avec un gros cailloux au milieu. Je me suis d’ailleurs fortement trompé car mon guide, Bob (pas l’éponge), m’a vite repris pour me dire d’un ton docte qu’il s’agissait d’une région SEMI-désertique. C’est donc une région semi-arrosée par la pluie.

Hors donc, bien que fantasmant à mort sur cette Great Ocean Road, je n’avais aucune idée d’à quoi pouvait bien ressembler les paysages du sud de l’Australie. Première surprise déjà en arrivant à Adélaïde : c’est très vert, mais on est en hiver. La rime, c’est gratuit.

DSC_6956_DxOJe quitte donc Adélaïde par le sud et pénètre dans la péninsule de Fleurieu, au nom bien français (il doit avoir une histoire d’explorateur héxagonal là dedans mais je vous laisse la charge de vous renseigner par vous même). Le paysage est émouvant surtout sous cette lumière de début de journée. Il m’arracherait presque une larme de nostalgie en me rappelant mes ballades dans la côte Chalonnaise ou de Beaune. Ici le relief est doux, couvert de vignes dans les vallées alors que les sommets sont réservés aux pâturages où viennent paitre quelques vaches et moutons. Les plus alcooliques d’entre vous sauront que la région d’Adélaïde est réputée pour ses terroirs viticoles, notamment la Barossa Valley qui se situe, elle, au nord-est.

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DSC_6972_DxOEn quittant la péninsule au sud-est, le relief s’aplani progressivement puis cède la place à un terrain plat. L’océan n’est pas loin et la terre n’est protégé de ces assauts que par une bande côtière de dunes constituant le parc national de Coorong. Cette zone humide et sauvage abrite sans doute des oiseaux rares et protégés. Côté terre, le terrain plat en cette saison est inondé en de nombreux endroits et pour le coup, je pense à la Vendée. C’est incroyable comme on est sans cesse ramené à ce que l’on connait.

DSC_6977_DxO DSC_6981_DxODes forêts d’eucalyptus rabougris et tordus par le vent poussent à la lisière de l’eau. La route traverse pendant quelques kilomètres de vastes forêts sur un terrain ondulant.

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Un plus tard, je roule de nouveau parmi un paysage plat aux rares arbres, uniquement peuplé de moutons. Au loin, l’orage menace et une petite pluie commence à retomber.

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Le ciel s’obscurcit et il est déjà plus de 16h. Je décide donc de m’arrêter dans la ville de Mount Gambier. Tiens, tiens. Y aurait-il une montagne dans le coin ?

Adélaïde

Pour moi, Adélaïde sera dorénavant associé à une découverte que je ne soupçonnais pas en Australie, du moins, pas à ce point. Peut être que je me trompe car on ne peut ignorer la situation dans laquelle je me trouvais quand je l’ai visité. Après quasiment deux semaines australiennes où les seuls points de civilisation étaient soient des villes manucurées américaines ou des trous perdus poussiéreux, se balader dans Adélaïde fut comme une gorgée d’eau fraîche d’un torrent de montagne. En plus, après deux semaines de soleil sans discontinuer, je venait de reprendre contact avec la pluie, celle, froide et humide, d’une fin d’hiver austral.

Pour ceux qui ne connaissent pas Adélaïde, ce n’est pas qu’un prénom utilisé dans une chanson des années 80. Il s’agit également de la capitale de l’état de l’Australie du Sud et accessoirement la troisième plus grande ville du pays. Je ne vérifie même pas ce que j’affirme tellement j’y crois.

DSC_6905_DxOTout d’abord, pour m’être mis dans un camping en bordure du centre ville, je découvre des quartiers résidentiels aux coquettes maisons, dont certaines à l’allure coloniale. Ceci dit, ça devient vite lassant les quartiers résidentiels. Je continue donc ma ballade d’approche vers le centre ville, autrement appelé CBD selon la terminologie locale, notamment en traversant un vaste parc et une petite rivière. Pour faire original, des petites perruches vertes striées de rares bandes rouges volent d’arbre en arbre à vitesse supersonique en poussant des « sqwwwaaaak » toujours aussi disgracieux.

DSC_6904_DxOCe fameux centre ville s’avère être assez moderne, à l’américaine suivant un schéma en grille, avec de multiples grands immeubles de verre. Fort heureusement, de nombreux autres bâtiments plus anciens, vraisemblablement de la fin du 19ème au début du 20ème, égayent un peu tout cela. Le tout est relativement vivant, notamment autour de deux rues piétonnes en cours de construction.

DSC_6890_DxOAdélaïde abrite de nombreux festivals mais une partie de son dynamisme apparent provient de l’université du même nom située entre le parc et le CBD. Fondée au dix neuvième siècle, elle possède ce formidable atmosphère d’ouverture que possède tout campus ouvert sur la ville. Moi, j’adore les atmosphères de campus.

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Ceci dit, je ne vous ai toujours pas dit quelle était la découverte renversante effectuée dans cette ville. Il s’agit tout simplement de halls couvertes abritant de nombreux artisans dans tout les domaines de la gastronomie. Je sais, c’est complètement révolutionnaire et novateur comme invention. Il y a la même chose dans pas mal de villes en France, notamment. N’empêche que DSC_6885_DxOtrouver ça ici, je ne m’y attendais pas. D’autant plus que la qualité est au rendez-vous. Grâce aux nombreux immigrants de toutes les parties du monde, on trouve à peu près de tout et les sandwichs humus, pruneaux et poulet aperçus à l’étal d’un traiteur marocain me font encore envie. Pour être raisonnable, je me suis contenté d’un roulé à la cannelle d’excellente facture et d’un bun bô à un petit restaurant vietnamien. Bon, là, c’était un échec. J’ai failli me faire engueuler alors que j’attrapais un petit bol d’herbes aromatiques et de citrons verts que j’estimai avoir été omis avec mon plat. Au Vietnam, on le servait toujours avec.

DSC_6949_DxOPrenons néanmoins un peu de recul. J’ai beau avoir trouvé la ville sympathique sur le moment, avec ce mélange de moderne et de modérément ancien qui me rappelle vaguement Glasgow, je me rend compte que si je l’avais découverte après Sydney ou Melbourne, je l’aurai sans doute trouvé quelconque. D’ailleurs, maintenant que je regarde les photos, ça casse pas non plus la baraque. Je me déçois moi même. Comme quoi, l’ordre dans laquelle on visite les choses est fondamental pour les apprécier.

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Au nord d’Adelaïde

DSC_6867_DxOOn dira ce qu’on voudra mais quand on a pas l’habitude, l’immensité monotone du bush, moi, je trouve ça un peu emm… euh ennuyeux. Je ne vous cacherait donc pas que j’étais bien ému de retrouver les paysages verdoyants de la côte. C’est d’ailleurs très amusant de voir à quel point la transition est rapide. On descend un plateau et « bing ! » on se retrouve entre la mer à gauche et les montagnes du massif des Flinders au loin à droite. Entre les deux, des pâturages et des moutons, la plupart du temps les deuxièmes étant situé dans les premiers. Bon sang, j’ai presque l’impression d’être en Écosse au sud d’Aberdeen.

DSC_6861_DxOLa Stuart Highway, qui traverse donc l’Australie du nord au sud, se termine à son extrémité méridionale à la ville de Port Augusta qui par une incroyable coïncidence sémantique se trouve être situé à l’embouchure d’un fleuve. Comme c’est la première véritable petite ville que je croise depuis plus de deux jours, je décide d’aller y jeter un coup d’œil.

Figurez vous que j’ai trouvé ça charmant. J’en suis le premier surpris. Le petit centre ville est bourré de bâtiments anciens au style colonial, dotés de balcons en fer forgé, l’ensemble datant parfois du 18ème siècle. C’est complètement incroyable. Je me sens revivre et je me rend compte à quel point j’ai besoin d’avoir un quota de vieilles choses autour de moi.

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D’un point de vue civilisation anglo-saxonne, cette traversée dans le sens de la hauteur du continent est également un voyage dans le temps. Arrivé au sud, sur la bande côtière, on atteint des zones du pays occupés depuis plus de deux cent ans par les colons britanniques. Le paysage a été transformé pour céder la place à l’agriculture et l’élevage.

DSC_6871_DxOL’arrière pays est relativement montagneux ce qui m’est également extrêmement agréable. Quand à la côte, elle est relativement douce et bordée de quelques marais. Tout cette eau, ça fait un choc. Bien entendu, pourquoi n’en ai-je pas parler plus tôt, les routes sont de nouveaux biscornues et munis de courbes et virages. C’est super dangereux. For heureusement, la bande radio est également de nouveau peuplé de musique et autres talk shows, notamment en DSC_6872_DxOprovenance d’ABC, l’Australian Broadcasting Corporation, l’équivalent de la BBC ici.

Tout ceci est bien beau mais avec le retour à la civilisation revient les emmerdements. Je vous explique. Alors que je me gare dans Port Augusta pour aller manger un bout dans un très joli parc peuplé de peu farouches gros pigeons à crête (la faune de ce pays à le don pour se rendre intéressant), je heurte un peu violemment, je dois bien l’admettre, le trottoir. Je jette un œil au pneu et ne constate rien de particulier.

Je part donc l’esprit tranquille me restaurer et parcourir cette charmante petite ville. Une bonne heure plus tard, me voilà de retour à la voiture. Je reprend la direction d’Adélaïde mais mon ouïe, sans mal, détecte un bruit répétitif et suspect du côté avant gauche du véhicule. Je me gare et tout en jurant intérieurement, constate une profonde coupure dans la gomme et l’aspect dégonflé du pneu. Certes, il vaut mieux cela maintenant qu’en plein milieu du bush mais j’aurai trouvé cela plus épique de détruire un pneu en tentant d’éviter un kangourou bondissant.

Un rapide survol de mon contrat de location me confirme que c’est pour ma pomme. Je repart donc tout doucement à la recherche d’un garage dans un ridicule « cloc, cloc, cloc ». L’australien étant d’un naturel sympathique, deux ou trois personnes me montrent mon pneu en épelant « tire ». Merci, je suis au courant. Je fini par m’arrêter pour demander à une vieille dame le vendeur de pneu le plus proche.

Une demi-heure plus tard, après avoir visité deux garages ne disposant pas de la taille de pneu adéquate (du 195 R 15, c’est quand même pas des pneus d’extra-terrestres, bon sang!), je fini par en trouver un qui en a un en stock. Fort heureusement, au premier garage rencontré, le garagiste avait eu l’amabilité de me remplacer le pneu crevé par le pneu de secours, le tout gratuitement.

Alors que je patiente dans la boutique, j’ai tout loisir pour observer les deux patrons de l’atelier, un père et son fils, tout les deux obèses. Lorsque je dis obèse, je veux bien entendu parler d’obésité à l’américaine. C’est d’ailleurs amusant car le père, barbu, parle très lentement avec un accent australien que j’ai du mal à comprendre. Le fils, lui, a un petit air de Coluche, en plus gros.

D’autres client partent et reviennent dont un vieux monsieur qui vient avec un gros tube en plastique qui ressemble à un snorkel pour son 4×4. D’autres lieux, d’autres types de soucis mécaniques. Encore plus étrange, la plupart du temps, le père s’assoit tranquillement sur une chaise, le regard vide, fixant le mur en face de lui, comme s’il essayait de reprendre son souffle. Pourtant, je ne peux pas affirmer que son travail soit intensif.

Une bonne heure plus tard vient l’heure de payer. L’addition est à hauteur de ce que j’attendais, environ 190$. C’est donc non un certain tremblement inquiet que je tend ma carte bleue au garagiste. Depuis deux jours, elle fait des siennes. Encore raté, transaction refusée. Avec un sourire qui se veut rassurant je demande donc s’il y a un distributeur de billets à proximité. D’une voix douce et nonchalante le père me propose de m’amener en voiture à la station essence à 500m.

Je monte donc dans un gros van, le propriétaire toujours aussi obèse arrivant tout doucement après moi. Deux minutes plus tard, je descend, repère le distributeur à l’intérieur et avec une boule au ventre tente de retirer 200$. Si j’atteins mon plafond de retrait maintenant, c’est les emmerdes assurés. Je vais finir immolé un pneu embrasé autour du cou. J’ai vu ça à la télévision, c’est une mort atroce. Ça passe. Avec l’insolente assurance du gars bourré de cash, je remonte dans le van en lançant une vanne sur la faillibilité de ces cartes de crédit. Il acquiesce poliment mais je ne le sens pas spécialement amusé.

Finalement, tout rentre dans l’ordre et je repart avec un pneu tout neuf en direction d’Adélaïde. Avec tout ça, je n’y serai pas pour la nuit, mais peu importe. Je me pose donc dans un camping quasiment désert en bord de marais. De toute façon, j’aime bien les anecdotes, tant qu’elles ne me tuent pas.

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