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Sydney CBD

DSC_7660_DxOJe crois qu’il y a quelque chose de biaisé dans le constat que je m’apprête à faire. Attention, c’est d’une grande généralité mais, avec toutes les pincettes dont je peux me fournir, je trouve, moyennant les précautions d’usages, que le centre ville de Sydney, soit le fameux CBD (Central Business District selon la terminologie australienne, je vous rappelle), est bien… il est drôlement inintéressant.

DSC_7821_DxOAttention, attention. Si vous n’avez jamais vu de ville avec de grands gratte-ciels en verre à l’américaine, allez-y, régalez vous. A part cela, c’est certes photogénique lorsqu’on lève le nez en l’air, surtout si vous aimez l’architecture moderne (moi, par exemple, je suis un grand amateur de ciels bleus nuageux se reflétant dans les immeubles en verre) mais force est de constater qu’au niveau du sol, on y trouve essentiellement des banques, des assurances ou des magasins de luxes. Je caricature énormément. En tout cas, je trouve le CBD de Sydney froid, distant et, sans être anarcho-communiste à tendance bolchévique dur pourfendeur du grand capitalisme, fort distant de certaines de mes valeurs qui fluctuent un peu en fonction de mon humeur autour d’un point vaguement central. J’m’y sent pas chez moi, quoi.

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DSC_7668_DxOPour faire encore plus simple et totalement dans l’émotionnel au premier degré, ça a le goût et l’odeur de Wall Street sans en avoir l’attrait sulfureux. Si on exclu les banques, j’ai toujours un certain sentiment d’écoeurement en voyant tous ces mégas magasins ultra lisses et clinquants dédiés à des marques d’ultra luxe ou ces voitures haut de gammes d’où sortent des messieurs aux costumes trois pièces dénués d’imagination (en tout cas, à première vue, vestimentaire). Ça fait parti de mes paradoxes d’admirer le travail sans concession DSC_7675_DxOnécessaire à la création de ces admirables produits alors que je suis rempli de réprobation quasi méprisante pour les gens qui les achètent. En vous disant tout cela, je sais que je ne suis pas du tout objectif. Bien que le CBD de Melbourne héberge également des grandes corporations financières et des magasins de grand luxe, il y a un côté arty culturo-trash que je trouve sympathique. Au CBD de Sydney, je ne l’ai point vu.

Car, si je suis honnête intellectuellement, j’admet que la comparaison est injuste, n’ayant pas vraiment visité ce centre ville de Sydney de la même manière qu’à Melbourne. Ici, point de pub crawl ou de visite guidée gratuite par un passionné de sa ville. Un schéma se dessine : la comparaison est impossible tant qu’on ne reproduit pas à l’identique un mode de visite. Au final, je peut donc dire que je n’ai pas aimé mon expérience dans le CBD de Sydney alors que j’ai été enthousiaste par celle vécu dans celui de Melbourne. Je ne peut pas être plus honnête DSC_7665_DxOintellectuellement que cela.

Maintenant que j’ai déversé mon fiel et mon dégoût, place à des images et quelques trucs plus positifs. Tout d’abord, j’ai le souvenir de mon précédent passage ici d’une petite place dans le CBD où avait lieu régulièrement des concerts gratuits. Je ne l’ai pas retrouvé. Mes souvenirs doivent être flous sur ce point. Il y a bien quelques endroits qui ont fait tilt mais, par exemple, je n’ai aucun souvenir de l’hôtel de ville, qui est pourtant imposant. Quand on est gamin, on ne s’intéresse pas à ces choses là. Autre souvenir du CBD, l’Alliance Française où on allait régulièrement emprunter des livres ou des bandes dessinées. Bon, certes, je n’ai pas passé la journée à la chercher. N’empêche que j’aurai eu les yeux embrumés de tomber dessus par hasard. On n’est pas fait de bois, tout de même.

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Tiens d’ailleurs, maintenant que j’en parle de mes souvenirs, j’en avais un vague d’un train mono-rail en construction dans le centre ville (Je viens de vérifier sur internet, sa construction a été terminé en 1988. C’est donc fort possible que je ne divague pas). Effectivement, les voies sont toujours là, suspendues au dessus de la route et pénétrant parfois directement dans les immeubles. C’est d’ailleurs en les voyant que j’ai eu un flash (Ahaaaaa!). Par contre, malchance ultime, il a fermé en juin de cette année. ‘Tain, à deux mois près. Non, parce que c’est pas tout les jours qu’on peut faire un tour de train monorail, je suis désolé.

DSC_7673_DxODans le registre de choses vues dont je n’ai aucun souvenir, dans une rue piétonne, j’ai eu la chance de tomber sur un jeune homme, doué, en train de réaliser une performance musicale, lui, sa guitare, sa bouche et un enregistreur en boucle. Il y a peu de chance que je m’en souvienne vu qu’il était pas né en 1980. En tout cas, sur le cul j’étais (notez cette terrible inversion sujet verbe des plus classieuse). Je trouve ça toujours impressionnant de voir des gens avec un talent incroyable (qui n’est que du travail motivé par la passion, d’après moi et d’après Jacques Brel qui disait si justement « le talent, c’est l’envie ») être en représentation, là, juste en bas de chez moi (façon de parler). A Toulouse, je n’en croise pas des masses des gens comme ça ou alors l’occasionnel joueur de flûte de pan ou d’accordéon qu’on a envie de payer pour qu’il se taille. Mon Jack, lui, je lui ai filé des dollars, parce qu’il est trop fort. En plus il a pris le temps de me remercier, devant tout le monde alors que je n’étais pas le seul. Et brave garçon avec ça.

La maison à Opéra

Non, sans déconner, c’est vrai. Ben si, ça l’est, et même drôlement. Et puis, ne faites pas semblant d’être d’une inculture crasse, enfin. Ça va finir par être crédible. Il est indéniable que l’Opéra de Sydney est un des monuments modernes les plus reconnaissables au monde. Elle est complètement dans le top 10 avec la Tour Eiffel, la Statue de la Liberté et Big Ben. Lorsqu’on la voit, admettez que l’on est de suite convaincu de ne pas être à Strasbourg, Dunkerque ou Montastruc-la-Conseillère. Si en plus, dans la perspective, vous apercevez un grand pont métallique à l’allure de demi-cercle, les indices sont forts et convergents pour que vous soyez à Sydney.

DSC_7607_DxOPour mes retrouvailles avec la dame en forme de coquilles blanches, j’ai de la chance, il fait un grand soleil, plutôt bas sur l’horizon, et de plus, on est samedi. Il y a donc un peu de monde, mais rien de déraisonnable, sur la promenade. Bien évidemment, je me souviens très bien du lieu, même trois décennies plus tard.

Allez, hop ! Un peu d’anecdotes que, vous pensez bien, je n’ai pas sorti de ma mémoire. Ce bâtiment que je trouve, personnellement, fort joli, c’est construit dans la douleur. Dans les années 50, après un appel d’offre, on choisit le projet d’un architecte suédois, porteur du projet actuel. Pour le moment, ce n’est pas une cause de douleur, rassurez-vous. On avait choisi le lieu, situé au bout d’une petite péninsule comme il y en a de nombreuses dans la baie, entre Sydney Cove où se situe les terminaux de ferry et Farm Cove qui borde Botany Park. Il est important que vous vous représentiez les lieux. Bon, en fait, non. On s’en tape. La douleur fut la facture. A l’origine prévu à 7 millions de dollars australiens, la douloureuse s’éleva à plus de 100. Ça refroidit.

Je n’ai pas les détails du pourquoi et du comment de cette crevaison de budget, mais sachez que l’architecte d’origine (suédois, rappelez vous) quitta le projet avant la fin, suite à un différent avec le gouverneur de la Nouvelle Galle du Sud. Ça n’a pas du aider. Un groupe d’architectes locaux finit donc la construction qui dura plus de 10 ans. A sa complétion, le résultat fut décrié, mais franchement, malgré tout ces déboires, je pense que personne ne regrette. Rien de tel qu’un monument à la forme unique pour mettre une ville sur la carte. Ah, j’oubliai. Accessoirement, il y a des concerts et des opéras dedans. Ce n’est pas qu’une coquille vide pour faire joli.

Ce qui a de plaisant lorsqu’on se ballade autour de l’opéra, c’est cette vue exceptionnelle sur la baie, le pont et le CBD. Rien de tel qu’un grand espace dégagé rempli d’eau pour donner du cachet. Un peu de verticalité à un bout avec une masse de gratte ciel, un treillis métallique se découpant en ombre chinoise face au soleil sous la forme d’un pont et le cri des mouettes. Vous y êtes. Parce que, ce qui est vraiment classe avec cette opéra, c’est son intégration dans le décor. Je ne suis pas sur qu’elle aurait eu le même impact si elle avait été construite en pleine ville. La même chose peut être dite du pont, le Harbour Bridge, d’ailleurs, maintenant que j’y réfléchi. Bref, ce qui est magnifique c’est l’alliance de ces éléments : la mer, l’Opéra, le pont, les gratte ciels du CBD. Pris séparément, ils sont certes jolis mais pas exceptionnels. D’ailleurs, on passe plus de temps à tourner le dos au bâtiment en profitant du panorama.

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Moi, c’est bien simple, j’ai envie d’acheter un appartement au 8ème étage d’un immeuble donnant sur Sydney Cove, au pied de l’Opéra avec vue sur le pont, le CBD et le terminal de ferries. En DSC_7619_DxOplus, étant plutôt attentif à ce genre de détail, lorsqu’on contourne l’Opéra (je persiste à mettre une majuscule) on note plusieurs bars branchouilles au pied de l’eau, avec DJ ou groupe musical le samedi ainsi qu’un cinéma plutôt art et essais à l’excitante programmation mais également un glacier. En somme, la base de la vie. Mais comme je ne suis pas foutu d’avoir des goûts différents des autres, il y a environ un million d’autres péquins qui ont la même envie que moi et qui font sottement grimper les prix jusqu’à rendre mon légitime souhait totalement inabordable.

Notez tout de même qu’il y a des villes, comme ça, je n’en citerai pas pour ne point vexer, qui ne DSC_7631_DxOprovoquent en moi aucun fantasme comme décrit juste au-dessus. Bon allez, si, je cite. Prenons Vierzon, par exemple et pour changer de Chalon-sur-Saône. J’y suis pourtant passé de nombreuses fois, notamment autour de la gare, chaque weekend pendant mon service militaire. Pendant tout ce temps, jamais je ne me suis dit « Té ! J’aimerai bien vivre là, dans cette magnifique maison de ville donnant sur l’église ». Pendant que j’y suis, Adélaïde non plus ne m’a pas inspiré de telles pensées, même si je confirme qu’elle est agréable et sympathique. Il faut autre chose du domaine du déraisonnable pour qu’une ville me fasse rêver, comme exploser un budget sur un opéra aux tuiles auto-nettoyantes posée comme une proue dans une baie.

Je peut donc vous le dire, si jamais vous avez de l’argent à perdre : passer quelques mois de l’année sur Sydney Cove, je ne dis pas non.

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Grampians

 

SILENCE !

Bien. Sur une feuille quadrillée format A4 orientée en paysage, dessinez une carte de l’Australie. Placez un point A ainsi qu’un point B respectivement aux emplacements de la ville d’Adélaïde, capitale de l’Australie Méridionale (et non l’Australie du Sud, comme je l’écrivais précédemment de manière fort naïve), et de Melbourne, capitale de l’état du Victoria (en hommage à la reine du même nom). Puis, tracez une ligne reliant le point A au point B. A l’aide de votre compas, déterminez le point C, milieu du segment AB. Au stylo vert, légendez : « Grampians National Park ». Parfait. Zoom avant.

Les Grampians, c’est fort joli. Voilà. Point. Fin du billet.

Non, non, non, rassurez vous, il y a des choses à dire et d’autres choses à montrer (même que, parfois, c’est les même choses). Les Grampians sont un massif montagneux dont l’origine m’est absolument inconnue. Par contre, d’aspect, cela pourrait évoquer, de loin, le Vercors ou le Dévoluy, c’est à dire des falaises d’un côté et une douce pente de l’autre. Ces montagnes ne sont pas très hautes, le point le plus haut étant juste en dessous de 1200m, mais comme me l’a répété si souvent monsieur Yves R., de Grenoble (anciennement de Chambéry, anciennement de Chalon, anciennement de Paris, anciennement de Peypin en Provence), ce n’est pas la hauteur qui compte, paraphrasant plus ou moins en cela un dicton populaire sur un tout autre sujet. Car, en effet, ce massif est posé, encore une fois, au milieu d’un vaste terrain plat à une altitude proche du niveau de la mer. Ce continent est un vaste terrain vague où les dieux s’amusent, je vous dit.

C’est d’ailleurs assez étonnant de constater que, contrairement à certains massifs de ma connaissance où de petites ondulations de terrain de plus en plus prononcées annoncent les reliefs principaux, ici ce sont de grosses collines, isolées au milieu de la plaine, qui s’en chargent. A l’est, l’une de ces montagnettes porte le nom pompeux de mont Ararat. Dans le futur, j’y monterai un jour d’orage. Sait-on jamais, j’y redescendrai peut être avec un nouveau code des impôts dicté par une déité. En tout cas, on y a une belle vue de la plaine tout autour et, si je n’avais pas ce foutu soleil dans les yeux, des fameux Grampians.

Revenons en, à ces Grampians. Le massif s’étend essentiellement du nord au sud (et vice versa) sur quasiment environ 70km et sur une largeur de 30 en son centre. Je part du principe que je m’adresse potentiellement à des fétichistes de la métrologie. Un petit village du nom de Hall’s Gap concentre la plupart des logements et centres d’informations du parc. Encore une fois, le manque d’ambition de certaines personnes me sidère. J’aurai personnellement appelé ce bled Hell’s Gap afin d’ajouter un peu de mystère et de dramaturgie à un lieu qui n’en a, par ailleurs, ni l’un ni l’autre.

DSC_7277_DxOMais cessons là les critiques car il y a en ce bourg quelque chose de vraiment charmant, où alors je ne m’y connais pas en choses qui sont meugnonnes. Les kangourous y sont foisonnants et fort sociables. C’est bien simple, ils ont pris la place des pigeons et broutent paisiblement l’herbe rase du camping à porté de coup de pied au derrière (ce que je ne tente pas, bien entendu). Il m’est avis qu’ils ne sont plus vraiment sauvages. En tout cas, c’est l’occasion d’observer leur démarche à deux vitesses, ridicule ou bondissante, et leur mignonne petite bouille quand ils veulent bien s’arrêter de bouffer cinq minutes. Voilà. Merci.

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En parlant de ridicule, je découvre dans ce camping de Hall’s Gap une nouvelle limite à l’étendue du glamping en Australie : trois familles en camping avec enfants qui installent la nuit un cinéma d’extérieur avec écran déroulant et lecteur DVD. Bon, certes, ce n’est pas plus ridicule que la télévision dans le camping car. C’est même vachement plus sociable. Mais enfin, c’est bien la première fois que je vois ça. Quand on dit que les voyages ouvrent l’esprit, en voici bien la preuve indéniable.

Détournons donc le regard de la vallée et prenons de la hauteur. De nombreuses randonnées sont facilement accessibles et indiquées. D’ailleurs, je suis toujours étonné de constater à quel point de nombreux pays (pour le moment j’appui cette théorie par quelques expériences en Ecosse, Québec et en Californie) aménagent leurs sentiers de randonnées grand publics. Ce sont quasiment des boulevards avec des escaliers bien ciselées en présence de la moindre difficulté. C’en est presque frustrant. Heureusement, le chemin est assez original, commençant par un chemin montant dans une forêt d’eucalyptus (pour changer), passant ensuite dans d’étroits défilés rocheux, canyons ou bien traversant des dalles de pierre.

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Dans ces défilés, l’eau coule à flot. J’en veux pour preuve, sceptiques, cet enregistrement:

En tout cas, une fois arrivé au point le plus haut, la vue est grandiose et dégagée (ce qui va souvent de pair. Je connais peu de vues grandioses et bouchées), comme vous pouvez le constater. Si, si, j’insiste, constatez par vous même.

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Si vous êtes fainéants (moi même, je le suis assidument) ou bien juste un peu fatigués, quelques points de vues magnifiques, grandioses et dégagés sont également accessibles en voiture et vous épargne un long dénivelé à pied. Je vous le dit parce que je vous apprécie, bien que je ne sois pas partisan d’encourager la médiocrité. Pourtant, il faut bien admettre que tard le soir ou tôt le matin, la vue est de classe mondiale.

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Si ensuite, vous redescendez dans la plaine et décidez de vous en jeter un dans un bar, choisissez au moins un de ceux qui sont ouverts et surtout dont le patron a au moins un niveau minimum en orthographe. Pas comme celui-ci :

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Attention, cette devinette-ci est particulièrement ardue et s’adresse aux anglophones.

Peut-être même, d’ailleurs, est-ce moi qui pinaille.

Uluru

DSC_6623_DxOJe profite qu’à l’instant de ma narration de mes trois jours deux nuits Uluru – Kata Tjuta – Kings Canyon, je dors, bien que difficilement dans un froid glacial, pour m’attarder plus longuement sur Uluru.

DSC_6592_DxOPar quoi commencer tellement le sujet est vaste, dans tout les sens du terme ? Tout d’abord, pour vous planter le décor, sachez que j’ai eu la chance de le voir juste après une période relativement humide. Ça n’a que très peu affecté le rocher, vous vous en doutez, contrairement au bush environnant qui s’en trouve plus vert et, toutes proportions gardées pour une région semi-désertique, foisonnante. On a donc la chance de profiter d’un superbe contraste entre le ciel sec et pur, le rocher rouge orangé et le bush d’un vert jaune ponctuellement fleuri. Au cœur de la saison sèche, ce doit être une autre histoire. Il est d’ailleurs peu recommandé de s’y promener en pleine journée, les températures montant facilement au delà de 40°C en plein soleil.

DSC_6621_DxOEn ce qui concerne l’origine géologique de l’engin, on m’a expliqué quelque chose mais je viens de jeter un œil à la page wikipédia associée et elle me semble beaucoup plus exhaustive. Mais surtout elle est beaucoup plus riche en termes scientifiques hyper pointus dont je ne connais absolument pas la signification tels que « arkose », « diaclase », « néoprotérozoïque » et « orogénèse ». Comme il ne faut jamais rater une occasion de devenir pédant, plongez-y. Pour faire simple, c’est un énorme rocher de grès monobloc profondément enfoui sous terre dont seul émerge la partie érodée.

Cette douceur de silhouette et les multiples plissures de la roche donne un aspect nettement organique à Uluru. Par moment, suivant les angles, on croit même reconnaître une patte d’animal DSC_6590_DxOplantée profondément dans le sable. A d’autres endroits de curieuses grottes en hauteur ressemblent à des bouches béantes. A chaque heure de la journée, le soleil changeant métamorphose ses aspérités. On comprend qu’il ai suscité autant de légendes.

DSC_6613_DxOJe vais d’ailleurs partager une grande déception avec vous mais, en réalité, Uluru n’est pas rouge. C’est une vaste opération de mensongerie à l’échelle planétaire. Si on coupe Uluru en deux (manière de parler, bien évidemment), ou plus modestement, si vous cassez un de ses fragments (ce que vous ne devriez pas essayer les enfants sinon à ce rythme il n’en restera rien dans un siècle) vous constaterez que la pigmentation rouge n’apparaît qu’en surface sur une très fine épaisseur. L’intérieur est d’un banal gris comme n’importe quel banal grès. Cette couleur cramoisie provient d’oxydes ferreux déposés sur le rocher par le vent, la région étant très riche de ce côté là. Que la nature est merveilleuse. Si les oxydes de cuivres avaient été prédominant, nous aurions eu un gros cailloux vert. A quoi ça tient.

Uluru est également extrêmement important pour les aborigènes car sur son périmètre se trouvent un petit nombre de sources d’eau. Chacune d’entre elles est un endroit sacré et protégé, notamment une dans un petit coin de verdure sur le côté sud, à l’ombre. Un rapide coup d’oeil aux alentours et vous comprenez rapidement que les prochaines sources d’eau sont au delà de l’horizon. Ou alors à Kata-Tjuta… si vous parvenez à traverser les 25 km à pied sans mourir, mwaaahhahaha!

DSC_6608_DxOVoici pour la partie prosaïque du rocher. Parlons maintenant de son aspect culturel. Pour vous mettre dans l’ambiance, je vous invite cordialement à attraper le didgeridoo le plus proche de vous. C’est l’occasion de crever une nouvelle bulle de légende urbaine car le didgeridoo n’est absolument pas un instrument « aborigène ». Plus précisément, car j’aime bien affirmer quelque chose de manière péremptoire et provocante pour ensuite le raffiner, il ne s’agit pas d’un instrument commun à TOUTES les nations aborigènes. Il y en a pour qui ce bout de bois creux est aussi abscons que pour moi. Vous avez noté comme j’ai subtilement amené le terme « nation aborigène » dans la conversation ? Et bien j’en parlerai dans un autre billet car pour le DSC_6610_DxOmoment, ce dont vous avez besoin de savoir, c’est qu’Uluru se trouve sur le territoire des Pitjantjatjara, anecdote notablement intéressante pour les cruciverbistes. Si on est légèrement moins anthropocentriste que moi, on devrait d’ailleurs dire que les Pitjantjatjara se trouvent non loin d’Uluru.

Leurs voisins, les Yankunytjatjara (les cruciverbistes se régalent), sont plutôt du côté de Kata-Tjuta, si vous voyez ce que je veux dire. En 1985, le parc national, qui jusqu’ici était géré par l’état fédéral australien après avoir été territoire royal, fut « rendu » aux peuples d’origines à condition que l’état conserve une part de co-gestion dans le parc. Les deux nations se sont réunis ensemble sous la dénomination Anangu, incomparablement plus facile à mémoriser, merci à eux, et acceptèrent le marché. C’est depuis cette année que l’on cesse d’encourager la grimpette en haut du rocher, que l’on a créé le centre d’accueil en matériaux traditionnels dont le rôle est principalement de sensibiliser les visiteurs à la culture et la légende locale, DSC_6618_DxOmais également que l’on a progressivement déplacé toute activité d’hébergement et touristique quelques kilomètres plus loin dans un site nommé Yulara. Précédemment on pouvait coucher et uriner quasiment au pied du rocher et c’était particulièrement mauvais pour votre karma.

Place maintenant à la légende d’Uluru. J’en frémit d’avance car je sens que je vais être particulièrement approximatif. Globalement, pour faire simple, et il n’est pas dans mes capacités d’en faire autrement, la plupart des légendes aborigènes se rapportant à l’origine des choses se situent dans un âge ancien appelé l’Age des Rêves. Non, arrêtez de m’importuner, je n’en sais absolument rien si ça se situait avant ou après l’age de bronze. Je crois que c’est plus un concept qu’une date précise, si vous voulez mon avis, genre « je ne sais pas quand, mais c’était il y a très longtemps ». J’en profite d’ailleurs pour tenter de lancer une expression dont voici un exemple d’utilisation dans l’contexte :
« Dis donc, c’est quand la dernière fois qu’on a fait la vidange de la voiture ?

  • Pfffiou, j’sais plus. C’était pendant l’Age des Rêves.

Voilà. J’espère bien que vous allez la propager.

DSC_6619_DxOPour revenir à Uluru, différentes zones du rocher se rapportent à différentes anecdotes mais qui ont pour la plupart trait à une histoire plus vaste racontant les faits d’un homme parti en vengeance contre une tribu d’hommes lézard qui en descendant sur Uluru auraient interrompu une cérémonie sacrée. Je n’en dirait pas plus car ma mémoire est défaillante sur de nombreux points. J’ai de vagues souvenirs de deux garçons pétrifiés dans une grotte pour avoir, avec zèle, obéis à la consigne de leurs anciens de ne pas bouger jusqu’à ce qu’on leur en donne la permission. Les anciens ayant été tués par les hommes lézards, ils y sont encore. Bel exemple de discipline. Très mauvais exemple de prise d’initiative.

On peut ne pas croire à ces légendes mais il y indéniablement un mystère, une spiritualité et une séduction incroyable en ce lieu à mon sens lié au caractère quasiment unique à l’échelle géologique de ce phénomène Uluru mais aussi à l’incroyable continuité de la culture aborigène, quasiment inchangée depuis des dizaines de milliers d’année. DSC_6620_DxOLes différents interdits sur le site et les explications très sommaires et simples des histoires et légendes ne font qu’entrouvrir la porte sur la culture de ces peuples autochtones. Moi j’ai été conquis.

De plus, c’est loin d’être un lieu ultra fréquenté et on peut sans mal se retrouver seul devant cette immensité minérale histoire de profiter pleinement du caractère majestueux et insondable. D’ailleurs, pour finir, écoutez moi ce silence:

Enfin, le soir, quand la nuit tombe, les touristes quittent la base du rocher. De nouveau seul, sous un vide étoilé, Uluru rêve.

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Animaux Australiens

C’est le diable si dans ces trois jours à travers l’outback je n’avais point croisé une quelconque faune autochtone. Fort heureusement, l’Australie en est fort pourvue et j’ai de quoi écrire un billet sur le sujet. Attention, je vous préviens, ça va finir bizarrement. Il vaudrait mieux que vous vous preniez un petit verre d’alcool au préalable car cela risque de s’achever dans le surréalisme.

Commençons doucement. A Darwin et du coup dans tout ces territoires du nord, le gouvernement Australien, car en bon français je ne peut imaginer qu’une telle initiative ne soit pas du à une grandiose décision ministérielle, les pigeons sont absents. A leur place, on a substitué de mignons cacatoès blancs à crête jaune. C’est autrement plus classe. On ne peut pas dire autant de leur cri, malheureusement. On en vient presque à regretter le doux « prrrou, prrrouuu » du pigeon urbain car cet esthétique animal enroué ne parvient qu’à extraire d’horribles « SQQQWWWAAAAAKK » de son jabot. Ce n’est pas très romantique et Paris aurait été bien différent si la substitution y avait été opéré.

DSC_6439_DxOPuisque je vous parle d’oiseaux, j’ai été abreuvé de milles anecdotes sur divers volatiles que j’ai parfaitement oublié. Lorsque nous flottions mollement sur notre barcasse métallique à fond plat, heureusement motorisée, le long de la rivière entouré de crocodiles, dont je parlerai plus tard, notre guide ne ratait pas une occasion pour nous pointer quoi un aigle, quoi un canard, quoi un autre machin à plume s’envolant plus ou moins gracieusement. Il m’est resté, malgré tout, une tendre anecdote marshmallowesque qui fera fondre DSC_6409_DxOmême les plus bûcherons d’entre vous. Il s’agit d’une race d’oiseaux (dont j’ai oublié le nom, faut il encore que je le précise) qui se mettent en couple pour la vie. L’incroyable et le surprenant dans cette histoire n’est pas l’absence totale de paperasserie administrative en rapport à ce lien indéfectible, mais de la conséquence funeste qui en découle. Si l’un des deux partenaire meurt, l’autre le suit, accablé par le chagrin. On est en plein Goethe et c’est à vous arracher une larme… de crocodile. Non, je parlerai des crocodiles plus tard.

DSC_6360_DxOSans transition, car la seule que j’ai trouvé était particulièrement capillo-tractée et je préfère m’abstenir, j’ai eu la joie de voir des termitières géantes. A vrai dire, j’ai même eu l’embarras du choix car aux environs du parc national de Litchfield, le bush en est rempli. Je vois joint une photo car je suis sur que vous allez me prendre pour un Marseillais, mais ces termitières font plus de 3m de haut pour la plupart. C’est véritablement impressionnant. Autant vous dire qu’à Darwin, quand ils ne sont pas accablés par la chaleur, frappés par un typhon ou torturés par l’ennui, les habitants doivent encore se protéger de ces petites bêtes particulièrement voraces. Pour l’anecdote, la matière constituant ces termitières, que j’imagine être une sorte de sable régurgité (beurk!), est aussi dure que du béton. D’ailleurs, techniquement, ça s’en rapproche.

DSC_6454_DxOJe ne vous parlerai toujours pas des crocodiles car, présentement, j’ai plutôt envie de vous parler de cheval. Je ne vous ferai pas l’affront de vous expliquer en quoi consiste ce quadrupède. Non, ce qui m’intéresse ici, c’est de vous expliquer que dans ces territoires sauvages, on croise des chevaux de même nature, sauvages. Vous ne serez pas surpris si je vous explique que ce sont des descendants des premiers chevaux importés par les occidentaux puis relâchés dans la nature. Comme il n’y a pas beaucoup de prédateurs dans ce continent, la population a plutôt augmentée. D’ailleurs, maintenant que j’y pense, les seuls prédateurs sont les crocodiles. C’est donc le moment d’en parler.

Alors pour faire simple, mais néanmoins précis, il y a deux types de crocodiles dans le nord de l’Australie, et plus particulièrement dans la grande région autour de Darwin, la plus riche dans le domaine. Les plus petits ne se trouvent que dans des eaux douces, c’est à dire les rivières et les billabongs. Au fait, mais qu’est-ce donc qu’un billabong ? C’est bien beau d’avoir ça sur son t-shirt, encore faut-il en comprendre la signification. Un billabong est le terme aborigène pour désigner une poche d’eau douce restant d’une zone inondée par une rivière. A la saison humide, les billabongs se retrouvent de nouveau connectés aux cours d’eau tandis qu’à la saison sèche, ils ressemblent à des lacs, des étangs ou des mares. Ces petits crocodiles d’eau douce ne sont pas très dangereux ni agressifs même si leur morsure peut faire des dégâts.

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DSC_6399_DxOLa deuxième espèce est quand à elle beaucoup plus létale. Il s’agit des crocodiles marins, ou d’eaux salés, affectueusement surnommés « salties » par les australiens, qui en plus de vivre sur la côte (et donc de chasser un peu au large des plages) remontent également les cours d’eaux douce et s’installent dans les billabongs. Ces bestiaux là peuvent atteindre facilement les 3 à 4m de long avec des individus records d’environ 7m. En sachant qu’un animal de cette taille peut sprinter pendant un court moment beaucoup, beaucoup plus vite que vous, vous imaginez l’angoisse. Accessoirement, lorsqu’ils sont motivés, par exemple par un poulet mort tendu au bout d’une perche tenu par un guide retors, ils peuvent également jaillir à la vertical hors de l’eau de toute la hauteur de leur corps. Fort heureusement, ils sont territoriaux, on peut donc facilement les retrouver, s’inquiéter s’ils sont absent, et étant à sang froid, plutôt léthargiques le matin.

Adam nous fait donc un rapide topo sur ces bêtes et les consignes de sécurité à respecter, qui consiste pour l’essentiel à ne pas s’approcher d’un DSC_6427_DxOquelconque plan d’eau. Pour enfoncer le clou, il nous narre quelques anecdotes de touristes allemands emportés par des crocos de 4m ou bien sauvés par la police de Kakadu alors qu’ils avaient noyé leur 4×4 en plein milieu d’un billabong plus profond qu’ils n’imaginaient. Oui, bizarrement, l’Allemagne paye le plus lourd tribut en ce qui concerne les décès par morsure de crocodile. La seule explication un peu sérieuse (excluant donc toute anecdote en rapport à la bière ou un passé fasciste douteux) est uniquement statistique : les allemands ne seraient-ils pas les touristes les plus représentés en Australie ? Mais je préfère vous laissez écouter Adam parler des consignes de sécurité. En prime, vous aurez le droit à une blague, que moi, personnellement, je n’ai pas entièrement saisie.

Maintenant, pour revenir au bizarre et surréaliste, et puisque j’évoque notre guide Adam, j’ai fait quelque chose que je ne suis pas peu fier. Alors que nous étions tous dehors au milieu du bush, à côté d’un billabong pour une pause pipi, Adam nous appelle pour nous montrer quelque chose. J’étais déjà un peu stressé par toutes ces consignes de sécurité en rapport aux crocodiles. Je me suis approché de l’eau pour uriner « Non ! Pas prêt de l’eau », je suis parti dans l’autre sens vers les arbres « Attention, parfois ils remontent jusqu’à 30m à l’intérieur ! », j’ai fait super attention où j’arrosais « Faites attention, ils ressemblent à des troncs d’arbres » et tout ça en gardant en tête que si un de ces gros reptile décidait de me sauter dessus, je n’avais aucune chance au sprint. Surtout avec une main prise et la braguette ouverte. Bref, je m’attendais à un truc hyper-dangereux et je n’aurais pas été surpris s’il nous avait ramené un bestiaux de 4m sur son épaule, occis à l’aide d’un couteau en plastique. Pour entretenir la confusion voilà qu’il nous demande « Vous voulez lécher du cul ? ».

Il nous fait signe de nous approcher de lui en tendant sa main vers nous, tout en étant pris de petit gigotement, comme subissant une démangeaison irrépressible. J’imagine déjà un dangereux dérapage scabreux. « Dépêchez-vous, elles sont en train de me mordre ! », dit-il. Complètement intrigué, je jette un œil à sa main tendu pour y apercevoir de grosses fourmis. Avant qu’on ai pu l’arrêter, ce rustre dégénéré, il se saisit délicatement d’un insecte entre deux doigts et se l’amène à hauteur de bouche pour lui lécher l’arrière train. Je crois bien que la surprise l’a emporté sur le dégoût. Pris d’un grand frisson, il repose la fourmi et arbore un gigantesque sourire. « Vous voulez essayer ? ». De plus prêt, on constate que chaque insecte, hormis celui qui s’est fait lécher le cul, possède une poche verte vif à l’arrière train. Notre guide nous explique qu’il s’agit d’une réserve d’acide ascorbique, autrement dit, de vitamine C. Moi, j’ai pour principe de goûter à tout du moment que quelqu’un y a déjà survécu. Je me saisit donc également d’une fourmi vierge (si on peut dire comme ça) et d’un petit mouvement de langue lui donne un rapide coup de langue sur les fesses, qu’elle a toute verte. Effectivement, c’est puissamment acide, comme un jus de citron hyper-concentré mais c’est loin d’être désagréable. C’est même aussi amusant que de sucer des bonbons acidulés.

Pour finir, on a remis les fourmis sur le sol. Et puis d’abord, si ça se trouve, elles aiment ça aussi qu’on leur lèche le cul.