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Da Lat

Enfin ! Ça fait quasiment un mois que j’attends ce moment là ! Tout ces déplacements et anecdotes depuis mon départ de Pondichéry n’était que passe temps et manœuvres de diversion pour enfin arriver à Da Lat, ancienne station climatique créée par les notables français de Saigon à 1400m d’altitude. Je ne vais pas tourner autour du pot, je comptais énormément y trouver une température inférieure aux 30°C minimum que je subit depuis mon séjour à Mumbai, il y a plus d’un mois. Même si je commence à m’y habituer drôlement bien (je n’ai plus peur de sortir entre midi et 16h, contrairement à Pondy, par exemple), j’avoue qu’un peu de fraîcheur serait la bienvenue. A part ça, Da Lat, il paraît que c’est coquet, si j’en croit mon Lonely Planet. Ch’sais pas trop, mais j’envisage une sorte de Luchon ou La Bourboule à la mode tonkinoise. Je sais, c’est difficile d’imaginer ce que ça peut donner.

Je part donc de Nha Trang le lendemain de mon périple en deux roues, un peu raide, voir beaucoup, mon pansement refait à neuf avec le contenu de ma trousse de secours. Le mode de transport est désormais classique puisque j’emprunte à nouveau un bus couchettes pour les quatre heures et quelques du trajet. Je passe donc sous silence le désormais classique descriptif : mal de fesses, température frigorifique et projection d’une émission de variété sur les deux écrans du bus. Si vous y glissez une proportion de sieste, une lampée de lecture de notre ami Dick Bolitho et un zeste de contemplation du paysage, le trajet se passe sans encombres notables.

Après la montée d’un col interminable puis la traversée d’un plateau ponctué de petites collines entièrement dédié à la culture, notamment de café et de thé, ainsi que des serres couvrant parfois tout le paysage nous pénétrons dans Da Lat. Le seul soucis, c’est qu’il s’est mis à pleuvoir depuis le franchissement du col. Le temps est donc bas, gris et maussade. Avec la température frigorifique du bus, j’ai encore l’impression d’être un aoûtien téléporté à Knokke-Le-Zout, une journée de novembre. Heureusement que je suis prévoyant car cette fois-ci, je me suis habillé en conséquence : pantalon randonnée et chaussures randonnée légère cuir de chez Quechua et chandail mi-saison gris griffé Divided. Ça faisait un peu trop longtemps qu’il n’y avait pas eu de rubrique mode dans ce blog. Voilà qui y remédie.

DSC_6096_DxOJe sort donc du bus sous une petite pluie fine. Effectivement, pour ce qui est des 30°C, ils ne sont bien plus là. A vue de bras, il doit plutôt faire dans les 15°C. Rectification, donc : je me retrouve téléporté en Bretagne en octobre. Pourtant, j’aime la Bretagne, je suis Nantais. Le premier qui me réponds que, non, Nantes n’est pas en Bretagne… Mais la colère m’égare. Enfin, plutôt le froid, à vrai dire, car après un mois de chaleurs tropicales, en dessous de 20°C, le temps est glacial.

Après quelques tentatives, je parvient à retrouver mon hôtel. Comme c’est étrange de découvrir un lit muni d’une couette. Il me semble même qu’il n’y a aucune climatisation dans la chambre. Peut de temps après, je profite de ces premiers instants à Da Lat pour aller faire un tour chez un pharmacien. Sans être médecin, à vue de nez, j’étais dubitatif sur le pouvoir antiseptique du liquide utilisé par mes sauveurs vietnamiens mais également de mon spray de premier secours. Chez l’apothicaire, j’effectue une première tentative en anglais qui échoue. Je bascule en gestuelle et lève ma jambe gauche en montrant mon pansement et le léger filet de sang coagulé qui en émerge. Ce blog sera sans fard ou ne sera pas. Instantanément, elle hoche la tête en signe de compréhension et part fouiller dans ses tiroirs pour revenir avec un sachet de compresses de gaze, un rouleau de sparadrap et une bonne vieille bouteille de Bétadine. Avec ça, je dois pouvoir DSC_6101_DxOstériliser l’ensemble de ma salle de bain, ce qui ne manque pas d’arriver quand je tente de me faire un nouveau pansement, la jambe en l’air, appuyée sur la cuvette des toilettes, en tentant d’éviter de maculer le carrelage de ce produit extrêmement colorant. Heureusement que je suis relativement souple.

DSC_6108_DxOEn tout cas, pour ne rien vous cacher, ce temps pourri sera ainsi pendant quasiment les trois jours où j’y serais. Il empirera même par moment pour se transformer un pluie diluvienne, sous des températures identiques. Peut-être est-ce à cause de cette triste météo, mais je dois dire que Da Lat m’a laissé froid. Certes, elle se répand sur un paysage de petites collines, d’accord, mais aucun bâtiment véritablement sympathique ne ressort. Il y a juste un lac artificiel, non loin du marché couvert, où se dandinent des pédalos en formes de cygnes, mus par des touristes goguenards et, en tout état de cause, vaccinés contre le ridicule. Mais peut-être suis-je trop cruel.

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Voilà ce que c’est de trop se monter le bourrichon en imaginant un Luchon-en-Tonkin.

Cruiser en scooter 2 – Part 2

Dans le précédent épisode, alors que je cruisais mollement en scooter au sud de Nha Trang, j’ai eu un, hum, hum, petit soucis à ma jambe gauche. Disons que je répandais mon fluide vitale sur la terre vietnamienne, qui en a vue d’autre, par de multiples ouvertures de mon épiderme et derme. Fort heureusement, cette fuite est endiguée par un gros morceau de coton habillement tenu à ma jambe par quatre petits sparadraps. A l’heure où nous reprenons le court de l’histoire, je retourne sur Nha Trang sur mon scooter.

Comme il est à peine la mi-journée, j’hésite drôlement à rentrer si tôt. En plus, je ne peux pas vraiment dire que je suis parvenu à apercevoir une jolie montagne de près. La douleur à la jambe s’étant maintenant mue en un lancement sourd mais régulier et le pansement de fortune tenant plus ou moins malgré le vent relatif, je décide de continuer mon périple en deux roues. Avec la chaleur, tout cela va bien sécher. Cette fois-ci, j’ai bien envie de tenter ma chance au nord de Nha Trang.

Après une nouvelle traversée de la ville le long de la plage, je retrouve le pont enjambant la rivière, les ruines Champa et le quartier des pécheurs. En continuant sur la route Ho Chi Minh (encore elle) je quitte finalement la zone urbaine. Je suis la mer et prend progressivement un peu de hauteur ce qui me permet d’avoir un début d’aperçu du panorama côtier. Enfin, ça commence à être sympathique.

Peu de temps après, je sens la faim poindre et profitant d’une aire touristique le long de la mer, décide de m’arrêter pour manger. Légèrement stressé, je m’engage tout en douceur sur le parking en terre. J’enlève mon casque, ajuste mon t-shirt et recolle mon pansement pour être présentable. Le restaurant est quasiment vide et on se retrouve à trois à manger face à la mer, couverte ici de petits bateaux de pêche.

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Une fois calé, je reprends la route en recollant le pansement de fortune tout les quarts d’heures. Mon 60 km/h de moyenne commence à mettre l’adhésif des sparadraps à rude épreuve. Après une DSC_6071_DxOnouvelle petite montée, la route redescend vers une large vallée inondée et nous quittons la mer. Pendant plusieurs kilomètres je traverse des rizières et des champs. Grâce à un plan fourni par l’hôtel je parviens malgré tout à me repérer et après la ville de Ninh Hoa tente ma chance sur une route partant vers la droite, soit d’après mes calculs, vers la mer. Un panneau indique « Terminal Hyundai » dans cette direction. Ça va être super chouette.

C’est effectivement assez agréable car je quitte instantanément le trafic modéré de la route Ho Chi Minh pour me retrouver quasiment seul sur une longue ligne droite ondulant en bas d’une colline. Des rizières couvertes de fleurs de lotus ajoutent une touche pittoresque avant que le paysage ne se transforme et devienne un peu plus sec. J’ai presque l’impression d’être dans un paysage provençal si ce n’est la végétation plus luxuriante.

Après de longues minutes, j’aperçois un début de lotissement en construction à gauche, vide, comme abandonné. Décidément, ils ont du mal à finir leurs projets ou quoi ? Finalement, la route oblique vers la droite et retrouve la mer en face, la montagne à droite. Parfait, c’est exactement ce que je veux. Je continue et aperçoit le fameux terminal Hyundai. On dirait un terminal dédié aux matières premières comme du sable ou des graviers mais l’effet est étrange de voir ce gros complexe industriel au milieu de nul part. Je serai curieux de connaître les détails de la planification économique, ici.

En continuant je commence à voir apparaître une zone un peu plus habitée et croise une dame marchant sur le bas côté qui me fait signe. Tout doucement, pour ne pas bloquer cette foutue roue avant, je m’arrête et me retourne. Elle arrive vers moi en trottant et, une fois à ma hauteur, me fait signe qu’elle veut aller plus loin, sans aucun doute sur mon scooter. Chic, je vais jouer au xe om. Je lui fait signe de monter avec un sourire puis bascule mon sac à dos en position ventrale pour la laisser monter à l’arrière.

C’est parti. Bizarrement, je ne la sens quasiment pas et je suis obligé de jeter de rapides coups d’œil dans mon rétroviseur valide pour m’assurer qu’elle est encore là. On sent qu’elle a l’habitude. Nous poursuivons comme cela quelques petites minutes pendant lesquels j’adopte une conduite coulée à vitesse un peu plus réduite. La route n’est pas non plus lisse comme un billard et je serai navré de l’envoyer valdinguer dans le décor. Tout à coup je sens qu’elle me tapote l’épaule et me retourne brièvement pour la voir pointer du doigt vers l’arrière. Arrêt demandé manifestement. Je m’arrête donc tout doucement et lâche ma passagère qui me remercie avec un grand sourire. Finalement, c’était pas si dur que ça. Je repart donc, fier d’avoir rendu service à une autochtone.

DSC_6081_DxOQuelques minutes plus tard, dans un village, je décide de faire une petite pause. Je m’engage donc vers la mer et pose mon véhicule à l’ombre d’une sorte de halle couverte. Devant moi, un petit port, à droite une sorte de café où sont massés une poignées d’hommes discutant bruyamment et à gauche une petite épicerie. J’enlève mon casque et rentre dans le magasin pour acheter une bouteille d’eau. S’hydrater, c’est la clé de la survie, ça et un freinage équilibré. Il faut dire que ça continue de cogner sec. Après quelques photos, je repart.

DSC_6086_DxOLa route ensuite devient vraiment magnifique. Serpentant à flanc de montagne, elle s’élève progressivement en montagnes russes tout en surplombant la mer. La vue et superbe malgré la brume de chaleur et je croise quasiment personne. Après quelques minutes de longues montées et de petites descentes, la route oblique à droite et j’entame une longue chute vers une superbe péninsule. Une bande de terre la reliant au massif où je me ballade et parsemé de champs. Une plage borde la mer alors qu’un petit village de l’autre côté est niché dans une baie faisant quasiment face au sud et Nha Trang, au-delà.

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Rapidement, je passe sous l’arche signalant l’entrée du village. J’emprunte ce qui ressemble à la rue principale en passant à côté d’un petit café improvisé à l’ombre, encore une fois rempli d’une grosse poignée de consommateurs. Des regards me suivent. Au bout de la rue, je m’arrête ayant atteint la baie et le port. Pendant un bon quart d’heure je reste là, à l’ombre, profitant d’un quasi DSC_6090_DxOsilence hormis le léger vent et ressac. Des femmes (visibles à leur chapeau conique mais surtout à leur manière de se couvrir de pied en cape contre le soleil) travaillent à récolter des algues et quelques enfants passent à vélo.

Je m’extrait finalement de ma torpeur pour prendre le chemin du retour. Avec tout ce trajet il n’est pas loin de 15h et il me semble plus raisonnable de rentrer avant la tombée de la nuit, ayant deux petites heures de route pour revenir à l’hôtel. Je remonte donc la rue, repasse devant le café et ses habitués puis m’approche de l’arche à l’entrée du village, avant d’entamer la longue montée.

Tout à coup, je sens mon scooter perdre en puissance pour finalement s’arrêter dans un toussotement. J’ai une vague intuition et regarde la jauge d’essence, toujours au milieu. Mon intuition me hurle d’ouvrir le réservoir et je constate avec fatalisme qu’il est à sec. Mais c’est quoi ces véhicules avec une autonomie de papy incontinent ?! Et surtout c’est quoi ces scooters pourris avec une jauge d’essence défectueuse ?!

Je descends donc de mon véhicule et fait demi-tour en le poussant, clopinant légèrement. Arrivé devant le café, ma dignité complètement évaporée, j’interpelle les clients d’un souriant « sin tchao » en montrant mon réservoir. Inutile de dire que ça rigole gentiment mais sans méchanceté, on m’indique la rue de gauche. Je guide donc mon scooter dans cette direction.

Le village n’étant pas très grand, je n’aperçoit aucune station service. Un peu dubitatif, je m’arrête devant une maison avec cour et après les bonjours d’usage aux personnes à l’intérieur, remontre mon réservoir. Une vieille dame me fait signe que c’est au fond. Voilà qui est surprenant. Je fais confiance et pousse le deux roues au fond de la cour. Tout le monde se met autour de moi et un homme en marcel s’approche en me montrant une bouteille en plastique d’un litre vide. Après quelques gestes je comprend qu’il me demande la quantité que je souhaite. Je fais un rapide calcul en estimant la consommation de mon véhicule pourri. En même temps, je ne voudrais pas leur piquer tout leur essence. Euh, trois ?

Il s’en va donc remplir la bouteille et la verse dans mon réservoir. Encore ? Allez, encore. Même manège. Je sens quand même que j’abuse et il me suffit d’assez d’essence pour rejoindre la ville de Ninh Hoa où je sais y avoir une station. Je lui fait donc signe que ça suffira. C’est à cet instant que quelqu’un aperçoit ma jambe gauche ensanglanté avec le coton imbibé de rouge, depuis le temps. Je ne vous cache pas que ça a légèrement rigolé dans les chaumières. Il vaut mieux rester philosophe et rire aussi même si ce n’est pas non plus la blague du siècle. Je règle la facture en étant quasiment certain que ce sont les litres d’essences les plus chers du Vietnam, mais à qui la faute, hein ?

Je remercie encore une fois mes sauveurs (vous ai-je dit que les vietnamiens étaient sympathiques) et redémarre mon scooter. Plus exactement, je tente de redémarrer mon scooter car il décide encore une fois de récalcitrer. Il commence à me fair ch***, lui. Le garagiste s’approche et sortant le kick, le démarre manuellement. Oui, bon ça va. Depuis le temps que je dit qu’on ne peut pas faire confiance en la technologie quand ça va mal. Je repart donc en remerciant encore une fois l’assemblée et reprend la montée du retour.

Pendant une heure, en rebroussant chemin, je me cale le plus bas possible en rentrant les bras histoire de minimiser mon coefficient de pénétration. Je tente d’adopter un rythme constant à vitesse réduite étant hanté par l’idée de retomber en panne, cette fois-ci en dehors d’un village. Il y a bien quarante kilomètres jusqu’à la prochaine station service. Autant dire que je me tape l’heure de conduite la plus longue et angoissante de ma vie. Surtout que dans la dernière ligne droite le temps se couvre, le vent se lève puis finalement une petite pluie épaisse et fraîche vient gentiment me marteler ma chair exposée. Mais c’est quoi cette journée !?

Avec un énorme soulagement, j’aperçois une station service alors que la pluie redouble d’intensité. Je m’arrête et fait la queue. Mon tour arrivée, je demande le plein. C’est fou comme on se sent mieux avec le plein d’essence. Aaaaaaaaaaaaah. Après deux ou trois démarrages ratés sous les regards encore une fois narquois des clients, je repart donc pour le dernier tronçon le long de la route Ho Chi Minh. Cette fois-ci, la pluie est quasiment diluvienne et glaciale. Les voitures et camions qui me doublent ajoutent encore un peu de sel à ce final épique.

DSC_6094_DxOAprès une demi-heure à ce régime, je quitte enfin l’orage et retrouve des ciels plus cléments. Je me détend… légèrement. Le trajet se fini par une petite séquence en heure de pointe dans Nha Trang pour finalement retrouver l’hôtel vers les 17h. Pas mécontent de rentrer. Ouf.

Je gare donc le scooter en lui jetant un dernier regard haineux puis pénètre dans le lobby. Ma réceptionniste me voit arriver et son regard s’agrandit au fur et à mesure qu’elle discerne ma jambe ensanglantée, le coton pendant mollement en ne faisant plus aucun effort pour couvrir ma blessure.

« Euh, j’ai eu un petit accident avec le scooter. Le rétroviseur gauche est brisé, le carter éraflé. Ah, et puis la jauge d’essence ne marche pas. Mais sinon, ça va »

Je n’ai pas honte de dire que je me suis couché tôt ce soir là.

Nha Trang, off

Amis sensibles et raffinés, ne fuyaient pas encore Nha Trang. Inutile de tourner autour du pot, ce n’est pas Paris ou Rome. Ne vous attendez pas à y découvrir des splendeurs architecturales à chaque coin de rue. Ou alors il faut être un sacré maniaque de l’architecture hôtelière de la deuxième moitié du vingtième siècle. Après avoir fait trempette une poignée de fois, il y a une ou deux possibilités de ballade pas complètement inintéressante, histoire d’éviter la desquamation totale.

DSC_6028_DxOTout d’abord, lorsqu’on s’éloigne un peu de cette fameuse plage, par exemple de trois ou quatre rues, on retrouve une ambiance totalement vietnamienne sans la moindre échoppe touristique. Les rues ne sont pas encombrées comme à Hanoi et l’atmosphère se rapproche un peu de Hué, pour sa partie moderne. Si vous voulez retrouver votre vendeuse de pho (fa) habituelle ou manger un com (caume, je crois), vous aurez de plus grande chance d’en trouver par là à des tarifs habituels.

DSC_6036_DxOEn continuant ensuite vers le sud, en bordure de ville et de rivière, on découvre un quartier un peu plus populaire. De la même manière, au nord, au bord de l’embouchure d’une seconde rivière, l’ambiance devient plus humble et l’air se remplit progressivement de l’odeur forte de la mer et du poisson péché. Des bateaux bleus et rouges aux grand yeux peints se balancent mollement sur l’eau. A ce propos, la plupart des bateaux vietnamiens arborent ces grands yeux. J’apprendrai plus tard qu’il s’agit d’effrayer les crocodiles. J’avoue rester dubitatif.

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En tout cas, cette zone de pêcheurs est sans doute le meilleur endroit pour manger des produit de la mer. Le long de cette rivière au nord, ainsi qu’en redescendant vers la plage, de multiples restaurants se pressent pour vous offrir toutes sortes de coquillages, crustacés et poissons, la plupart du temps très frais, car exposés encore vivants dans des bassines alimentés en continu par une eau courante en provenance d’un tuyau d’arrosage ou par des jeunes partis prélever de l’eau de mer dans des bidons en plastique. J’avoue avoir été extrêmement tenté de manger un homard à l’heure du goûté.

DSC_6032_DxOSi vous continuez vers le nord, sur une petite colline surplombant la rivière se dressent deux bâtiments anciens faits de briques rouges. Il s’agit de ruines d’un vieux temple de la civilisation Champa. Je vous rappel, car je vous sait distraits, qu’il s’agit d’une civilisation d’influence indienne, de religion hindouiste, qui existait sur la plupart du territoire vietnamien, avant l’arrivée de l’influence chinoise, il y a bien cinq ou six siècles de cela. J’adore être précis lorsqu’il s’agit de dates, comme vous pouvez le constater. L’endroit est très touristique, y compris pour les vietnamiens, mais le site est relativement restreint. On profite malgré tout d’une jolie petite vue sur la ville et notamment sur la rivière et le quartier de pécheurs.

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Pour les plus fanatiques, il doit bien y avoir une ou deux pagodes à voir. Moi j’avoue commencer légèrement à saturer de ce côté-ci. Que le premier qui n’a pas saturé après la troisième église romane de la journée me jette la première pierre. Aïe.

Nha Trang

Ah Nha Trang (Tchang) ! Que dire dessus qui n’a pas déjà été dis. Que puis-je décrire que des milliers de poètes et artistes n’aient déjà évoqués dans leurs œuvres désormais classiques. Sa beauté romanesque ? Le charme intemporel de son architecture? Ses matins embrumés que ne viennent troubler que les clapotis des canots le long… Ah, pardon. Je crois que je confond avec Venise.

DSC_6040_DxONon, parce qu’en ce qui concerne Nha Trang, il faut bien avouer qu’elle n’a d’autre intérêt que la plage, qu’elle a fort belle. Décrivant un très joli arc de cercle entourant la baie, elle se fini au sud par un relief montagneux rejoint par le biais d’un téléphérique, une île. Pourquoi donc, se demande-t-on ? Tout simplement car sur cette île, également légèrement montagneuse comme tout les alentours maintenant que je m’y penche sérieusement, se trouve le parc d’attraction « Vineland ». Nha Trang, c’est la station balnéaire vue par les Vietnamiens : tout est fait pour divertir le touriste. J’aurais pu aller voir ce fameux parc d’attraction, mais des circonstances en ont décidés autrement, notamment mon peu de goût pour les choses estampillées « spécialement pour TOI, touriste ».

DSC_6022_DxOMais revenons à cette foutue plage, car telle est le centre d’attraction de cette ville, soit disant. Une grande avenue la parcourt de haut en bas, d’une manière qui ne manque pas d’évoquer la Promenade des Anglais à Nice. Puis derrière, sur une à deux rues parallèles, se rangent une panoplie d’hôtels, restaurants, bars, karaokés et salons de massages. Le plus fou, c’est que ça continue à construire.

DSC_6025_DxOOn retrouve cette hiérarchie naturelle entre les grands hôtels grand luxe (type Sheraton, Hilton, Sofitel) donnant sur le front de mer (avec leurs chaises pliantes et leurs bars en plein air derrière la plage) et les hôtels un peu moins réputés deux à trois rues plus loin. Il n’y a aucune surprise de ce côté là et je peux vous annoncer que je suis logé deux rues parallèles mais dans un hôtel tout en hauteur avec piscine et bar au sommet. Je peux quasiment agresser les hôtes du Sheraton au lance-pierre avec un peu de détermination et quelques calculs de ballistique. Pis d’abord, la plage, j’m’en fout.

L’autre particularité de cette ville, et je la trouve de taille, c’est l’incroyable présence russe qu’on y trouve. Ça fait longtemps que je n’ai pas mis les pieds sur la véritable Promenade des Anglais et il est fort possible qu’on y trouve de nos jours la même proportion de sujets de monsieur Poutine. Néanmoins, j’ai comme l’impression que la catégorie socioprofessionnelle de ces touristes n’est pas la même. A Nha Trang, point de milliardaires oligarques gavés de pétro ou gazo-dollars mais de simples touristes de classe moyenne se déplaçant sobrement en classe économique.

C’est dans ces moments là qu’on est bien content d’avoir pris russe seconde langue au lycée (avant de se faire prier d’arrêter, deux ans plus tard, pour mieux me concentrer sur mon allemand. Peine perdue) car je peux, avec un peu de concentration, lire les panneaux écris en cyrillique qui peuplent les échoppes de la ville. J’avoue que je trouve ça extrêmement amusant et parfois ai même l’impression de me trouver dans un monde parallèle où l’Union Soviétique aurait remporté la guerre froide.

Là où je suis moins amusé, c’est quand je croise ces fameux touristes russes dans la rue ou au détour du lobby de mon hôtel. Je vais encore me mettre à généraliser, et dieu (s’il existe, mais je crois que ce n’est pas le moment d’entamer une digression théologique) sait que je n’aime pas ça. Je suis révulsé à l’avance de ce que je vais écrire. Pouah. Je suis donc pas très rassuré car je dois bien l’avouer, j’ai l’impression de croiser soit de gros gaillards massifs à la voix de baryton et à la mine rougeâtre que j’assimile automatiquement à une surconsommation d’alcool frelaté (et non pas à leur non adaptation à cet ensoleillement peu usuel dans leur contrées), soit à des sous-officiers des forces spéciales en permission après une intervention en force dans un théâtre tchétchène au physique sec et dur que mon esprit apeuré imagine partageant le même goût pour l’humour froid et sophistiqué que leur compatriote premier ministre Vladimir P. Je ne m’aventure pas à leur lancer un grand sourire innocent comme je le fait avec ces sympathiques vietnamiens. J’ai peur. Il faut dire qu’ils sont aussi grands que des américains. Mais je généralise, bien entendu. C’est juste que je trouve ça toujours un peu flippant de croiser un jeune blond à la coupe réglementaire arborant un t-shirt aux couleurs du drapeau russe. Le fait qu’ils portent t-shirt, marcels, shorts et tongues / schlappe / slache / gougoune / claquettes ne fait rien pour atténuer cette sensation. Au contraire. Imaginez Vladimir P, de Moscou, habillé de cette manière, tiens. Même dans les toilettes, il vient vous chercher, je vous le rappelle.

L’autre grand groupe de touristes qu’on y croise semble être la bande d’étudiants américains / australiens / anglais, brefs anglo-saxons, venus ici pour faire de la plongée le jour et la fête le soir. Ce n’est pas forcément plus fin, mais au moins, ils me font moins peur. Malgré tout, je dois dire que certains américains ou australiens élevés aux hormones et à la fonte détonnent parmi la population locale par leur carrure. J’avais perdu l’habitude avec tous ces frêles indiens et vietnamiens, un peu moins frêles.

DSC_6060_DxOQuand le soleil se couche, les néons s’allument. En partant de cette phrase d’introduction, écrivez un roman de mille pages. Vous ferez ça plus tard car il faut que je vous parle de l’ambiance pittoresque et légèrement sulfureuse du Nha Trang by night. Comme souvent, au crépuscule, on a l’impression que les vietnamiens prennent possession du front de mer. On peut avoir la chance d’assister à un concert gratuit de musique traditionnelle (avec le fameux dan bau dont je ne vous ferez pas l’injure de re-décrire) mais la plupart des activités se borne au classique jeunes en rollers, vendeurs ambulants de jouets inutiles mais amusants, vendeurs de glaces, pique-nique sur la plage ou tout simplement la bonne vieille promenade.

DSC_6052_DxOEn parlant de pique-nique, au crépuscule, la plage, notamment au nord, c’est à dire un peu plus loin des grands hôtels, se peuple de grandes nappes où viennent s’asseoir des familles et leurs amis pour partager un repas. Contrairement aux habitudes occidentales, ici point de glacières remplies de salades et sandwichs. La plupart des groupes sont munis d’un petit réchaud pour faire cuire le riz et les différents plats et, à la mode asiatique, chacun vient partager les différents mets posés au centre de la nappe. Je ne voudrais pas être la personne organisant le pique-nique mais je crois qu’un certain Christophe M., de Lyon, s’y sentirai parfaitement à son aise. Oui, parfois je lance des petits messages personnels.

Si vous êtes un peu isolé (et sans aucun doute mâle) entre deux groupes de promeneurs, justement, vous pouvez avoir l’occasion de vous faire proposer des drogues illicites ou des jolies filles, dans cet ordre. D’ailleurs si nous nous déplaçons maintenant dans une des rues parallèles à ce front de mer, là où l’on trouve le plus de restaurants et bars, on note à plusieurs endroits une petite atmosphère de fête à base d’alcool et de jolies filles. Ce n’est généralement pas très classe (même si on est loin du bar PMU ou du routier) mais ce n’est pas sans m’évoquer l’atmosphère que j’imagine régner dans des grandes villes de permissionnaires, comme le Da Nang des années 60-70. Il fait chaud, c’est criard, c’est lumineux et, en l’occurrence, ça parle slave ou anglais.

Dasvidagna.

Vélo à Hoi An

Moi, quand je voyage, j’ai absolument besoin de voir la campagne. Pour moi, c’est le gras d’un pays. C’est bien de voir des villes mais on ne peut réellement sentir la nature d’une culture si on ne s’est pas promené en dehors. Je décide donc de louer un vélo à Hoi An. Pourquoi pas une mobylette, me demanderiez-vous ? Parce que j’ai envie de pédaler et que Hoi An, et bien c’est plutôt plat.

Je me dirige donc un matin à l’accueil de mon hôtel pour louer un bicycle. Le prix est complètement dérisoire puisque de 30 kDongs par jour (soit même pas deux euros, c’est dingue). Côté paperasserie, c’est réduit au minimum, c’est à dire à rien du tout et côté sécurité idem. Même pas une caution ou un otage, que dalle. Je demande quand même s’il y a un antivol et on m’amène un cadenas souple rose et une clé. Vraiment, on ne s’emmerde pas trop avec la sécurité et l’administratif ici, et je dois dire que c’est drôlement plaisant, bizarrement. On me tend donc un vélo en état moyen avec un joli panier devant. Comme tout les vélos se ressemblent je note le numéro marqué sur une petite plaque sous la potence, le 27. Ça peut toujours servir.

DSC_5919_DxOJe part donc gaillardement le sourire aux lèvres sous un chaud soleil de début de journée. La journée promet d’être chaude, très chaude. Je m’économise donc pour limiter ma transpiration. Avec mon sens de l’orientation qui fait ma fierté, je me dirige au jugé vers la plage qui devrait se situer vaguement à l’est, en traversant la vieille ville puis en empruntant une très jolie route qui longe une petite rivière. Je traverse finalement un pont qui enjambe un cours d’eau plus important puis, après avoir parcouru une rue bordée de petits restaurants, tombe sur la plage. Je vous laisse juge de la qualité du sable.

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C’est à ce moment là que je me suis souvenu que je n’avais pas pris mon maillot de bain. En même temps, je n’étais pas plus motivé que ça de prendre l’eau. Avec mon vélo, on avait plutôt envie de partir à la découverte de la campagne. La plage attendra. Je décide donc, après un peu d’hésitation, à suivre la plage vers le sud pour trouver éventuellement un endroit un peu moins « courru ». En plein soleil, je pédale mollement en longeant des résidences hôtelières de luxe sur le front de mer puis quelques maisons un peu humbles côté terre.

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Je quitte ensuite les résidences de luxes en plein activité pour longer une petite digue. Plus loin j’aperçois des bâtiments en construction. Arrivé à leur hauteur je constate qu’il s’agit d’autres hôtels mais très probablement inachevés. Il n’y a plus aucune machine sur DSC_5900_DxOle chantier et les herbes commencent à envahir certains endroits. J’avais entendu parler de ces « resorts » ou complexes touristiques bâtis un peu partout par le gouvernement, parfois vides de touristes voir abandonnés comme celui-ci. Ce doit être le résultat d’une économie planifiée un peu trop ambitieuse, j’imagine.

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DSC_5897_DxOFinalement, je tombe sur un phare et un cul de sac au bout de ce qui est donc une péninsule et découvre un petit embarcadère proposant des visites sur les îles Cham, au large. Il n’y pas énormément d’activité hormis en revenant vers le phare, un groupe d’hommes jouant aux cartes et une femme vendant des canettes de boissons. ToutDSC_5892_DxO le monde est à l’abri sous les arbres. J’achète donc un Coca à la dame et m’assoit sur les petits tabourets en plastique, comme il se doit. Au total, je reste bien une heure à savourer ma boisson et à lire un peu, profitant du farniente et de la chaleur. Il est presque midi et j’ai un peu faim.

DSC_5928_DxOJe repart donc en sens inverse vers Hoi An et m’arrête dans un restaurant de rue pour manger. Comme d’habitude quoi. Pour l’après midi je décide d’aller visiter les rizières autour de la ville et emprunte la route de Da Nang pour m’éloigner. Il commence à faire maintenant sérieusement chaud et le moindre arrêt au soleil fait monter très rapidement la température. Des petits chemins de terre partent de temps en temps vers les rizières et je bifurque sur l’un d’eux, complètement au hasard. Après des méandres je tombe sur un groupe de maisons et emprunte un chemin à l’ombre des arbres. En contrebas, des buffles d’eau se vautrent dans une mare pour se refroidir.

DSC_5917_DxOJe passe comme cela une bonne partie de l’après midi à zigzaguer sur des petits chemins, traversant des groupes de maisons colorées, DSC_5915_DxOballade que j’interromps uniquement par une petite sieste au bord de l’eau à l’ombre de quelques palmiers. Il ne faut pas plaisanter avec cette chaleur. Sur le chemin du retour, je ne résiste pas au plaisir d’une bia hoi pris à l’ombre dans un petit café qu’on croirait improvisé au coin de la route. Au retour à l’hôtel, je pose le vélo et me jette dans la piscine. Je sais c’est complètement indécent de raconter ça.

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La soirée commençant, je reprends un vélo pour aller faire quelques photos au crépuscule dans Hoi An puis pour ensuite me restaurer. Je passe donc quelques heures à mitrailler pendant que le soleil se couche et, alors que la foule commence à remplir tout doucement les rues, je repart avec mon vélo vers le vieux pont japonais pour l’immortaliser en image. Mince, je constate que la rue y menant est interdite aux vélos. Dans Hoi An, la vieille ville est interdite aux voitures et, à certains endroits, aux deux roues. Je pose donc le vélo à l’entrée de la ruelle et met le cadenas, alors que discutent à côté ce qui ressemble à des policiers. Arrivé au pont je prends quelques photos pourries en jonglant avec les autres touristes qui passent puis repart vers mon vélo.

Vous devriez sentir que je parle beaucoup de mon vélo depuis un paragraphe. Il doit y avoir anguille sous roche. Arrivé à l’entrée de la ruelle, je constate l’absence de mon bicycle. Dans ces moments là (surtout moi qui suis incroyablement distrait pour ce qui est des objets) je passe les dix premières minutes à me dire que j’ai encore oublié où je l’avais laissé. Faut vraiment être nouille pour paumer un vélo en cinq minutes. Bon je vous rassure, je me doute bien qu’on me l’a piqué (mon précédent record est d’un vélo volé en dix minutes à Toulouse le temps de rentrer et de sortir de la Fnac) mais vu le nombre de touristes ayant des vélos semblables je me dis qu’il y a peut être eu méprise. Je demande à tout hasard aux deux policiers s’ils auraient pas vu un vélo, là, garé à même pas deux mètres d’eux, mais ils me font mine que non, sans vraiment s’intéresser à mon soucis. Bon, bon.

Je fais un rapide tour des environs, des fois que, et aperçoit vingt mètres plus loin, deux vélos gris semblables au mien attachés ensembles par un cadenas très similaire à celui que l’on m’a donné. Avec ma clé de cadenas, je m’approche et jette un œil au numéro de la plaque : 27. Ah ben te voilà, salopiaud ! Qui s’est qui t’as pris ? Je met donc la clé dans le cadenas et constate que cela ne marche pas. Mince. En m’approchant encore plus, je constate que le deuxième vélo porte également le numéro 27. Du coup, ça ne va pas être simple de le reconnaître, finalement.

Me rendant à l’évidence, je repart à pied à l’hôtel pour annoncer la terrible nouvelle à la dame de l’accueil. En attendant, je m’insulte copieusement pour ne pas avoir attaché le vélo à un arbre. Faut vraiment être naïf. C’est la faute aux vietnamiens à force de sourire bêtement à tout bout de champs, aussi. On se ramollit. J’arrive donc à mon hôtel et m’approche du comptoir avec un sourire navré et en montrant la clé du cadenas : « Je crois bien qu’on m’a volé mon vélo », dis-je

  • Ok, me répond-elle avec un sourire en prenant ma clé.
  • Non mais c’est tout ce qu’il reste du vélo. On me l’a volé.
  • Comment ça ?, me demande-elle soudainement inquiète
  • On m’a volé mon vélo dans Hoi An et pourtant je l’avais attaché avec le cadenas (la mauvaise foi, c’est pas très joli joli)
  • Ah ok. Merci.<silence>
  • Bon, bon. Bonne soirée.

Je m’esquive lâchement. Soit elle n’est pas très émotive, soit ça leur arrive tout le temps, soit, plus probablement, elle n’a pas comprit ce que je voulais lui dire. Toujours est-il que quelques jours plus tard, alors que je réglais ma note, je constatai une totale absence de montant ayant trait à la perte du vélo.

Ils sont vraiment trop gentils.