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Scout chez les silicon frenchies

Vous devez commencer à avoir l’habitude mais je vais, de nouveau et en introduction, me prêter à une généralisation outrancière à partir d’un échantillon réduit de cas. J’affirme avec aplomb qu’un nombre important d’américains, de toutes catégories sociales, ont un parcourt professionnel extrêmement varié, beaucoup plus varié que la moyenne française.

Lorsqu’on interroge un(e) français(e) moyen(ne) sur sa profession, la personne (ça me simplifiera le maniement du genre) vous répondra « cadre commercial » (beurk), « agent EDF », « prof » ou encore « ingénieur informaticien » (sur-beurk). Je sais qu’il ne faut pas juger les gens uniquement sur leur profession (car il faut également tenir compte, comme chacun le sait, de leur aspect physique), mais force est d’avouer que l’image qui en ressort est extrêmement peu excitante, à moins que la réponse à la question soit « photographe de guerre » ou « tueur à gages » (ou que la personne soit une sublime blonde avec un ratio tour de poitrine / tour de hanche égal au nombre d’or).

Avec les américains que j’ai rencontré, hormis Phil à Darwin qui était tristement uniquement ORL (bon, certes expatrié en Australie pour un an fraichement sorti de son université), je suis à chaque fois surpris par le curriculum que l’on me donne. Ils ont souvent à leur passif deux ou trois métiers différents. Sans réfléchir au pourquoi du comment, je trouve ça incroyablement rafraichissant et surtout, enrichissant. Ça doit faire beaucoup pour éviter le corporatisme bien que cela induise sans doute d’autres inconvénients qui ne me viennent pas à l’esprit, là, spontanément.

Mais rappelez-vous, tout ceci n’est qu’une introduction et nullement le cœur thématique de ce billet. En vérité je souhaiterai vous parler d’un gars prénommé Merrick. Forcément, je vous doit en préambule quelques explications quand à son intérêt.

Il est venu mon dernier soir à San Francisco. Je sais, c’est triste. Toutes les bonnes choses ont une fin et il est temps que j’aille affronter le froid polaire du Québec automnale (enfin, que je me dis). C’est donc ce samedi soir que nous allons passer une soirée à Redwood City, bourgade résidentielle sans intérêt de la Silicon Valley, hormis d’être mitoyenne de Palo Alto (où réside, je vous le rappel bande d’ignares, l’université de Stanford et le siège mondial de Hewlet-Packard) et d’abriter le siège mondial, lui aussi, d’Oracle (qui pour ceux qui ne le savent pas est une méga compagnie d’informatique dont le grand patron, Larry Ellison, est un des hommes les plus riche du monde).

Je dis nous car je suis (du verbe « suivre », pour éviter toute ambiguité) Sam, Claire et le petit Isaac, à une soirée d’anniversaire organisée par un de leurs amis français habitant la sus-mentionnée Redwood City. Dans une maison de plein pied au milieu d’un quartier fade est propret, surveillé par le neighborhood watch et les patrouilles de police, où réside tout les cent mètres un millionnaire internet séparés par des voisins employés de sociétés high techs aux salaires supérieurs ou égal à 100k$ par an, je retrouve une joyeuse bande composée d’une ossature de frenchies immigrés et d’américains. Pour éviter toute mauvaise interprétation, la référence aux revenus des gens n’est là que pour poser le décor de façon légèrement hors sujet de la réalité immobilière de la Silicon Valley. Paradoxalement, les maisons ne sont pas particulièrement luxueuses, tout au plus confortables et spacieuses. Mais je m’égare.

Je me retrouve donc rapidement un verre de bière locale à la main, à faire et subir les présentations d’innombrables gens dans un état de joie croissant. Poignées de mains ou bises (quand ce sont des françaises), j’en arrive à serrer la paluche à un américain prénommé Merrick. Là commence le sujet de ce billet.

Merrick, c’est un jeune gars (une petite trentaine) de Santa Cruz (station balnéaire à une heure au sud, Mecque des surfeurs) travaillant en tant que développeur dans une petite société du Web. En France, on s’en serrait certainement arrêté là (rapport à ma longue introduction et ma fallacieuse statistique) et j’aurai papillonné vers un autre groupe de personnes en claironnant que moi, j’ai Fait l’Inde. Avant que j’ai pu trouver un habile stratagème pour clôturer cette conversation naissante et me trouver un nouvel interlocuteur, il enchaine en expliquant qu’il souhaite prendre de l’expérience pour espérer pouvoir créer sa boite (mais ça, ici, dans cette partie du monde, c’est aussi commun que d’annoncer ailleurs qu’on va s’ouvrir un PEL) car malgré son âge il est débutant dans le métier.

Je fais une rapide soustraction mentale et suis surpris par son manque d’expérience professionnel à son âge. Si vous êtes un brin perspicace, vous aurez compris qu’il n’en était pas du tout à sa première expérience professionnelle, mais juste débutant dans sa nouvelle carrière d’informaticien, débuté il y a peu. Pour vous, pour que vous ne mourriez pas de curiosité, je l’interroge donc sur ses précédentes activités. Sa réponse : l’armée. Alors voici la situation : j’ai rien contre l’armée en tant que telle. J’ai juste un problème avec les militaires. Je suis donc tout à coup légèrement circonspect. Mais voici l’histoire de Merrick à l’armée, sans doute similaire à de nombreux jeunes américains de sa génération.

A la sortie du lycée, sans idée de ce qu’il veut faire hormis une envie d’aventure, il cède aux sirènes des recruteurs. Ça tombe bien, l’armée US a grand besoins de bras ces temps-ci, engagée qu’elle est depuis 2001 dans deux guerres majeures. Comme Merrick est vraiment, vraiment à la recherche d’aventure (et un peu fou, il me l’avouera rétrospectivement), il choisi le corps des scouts qui comme sa traduction littérale ne l’indique pas, n’a rien à voir avec la bande de boys du même nom. Non, les scouts, en anglais, ce sont les éclaireurs. Après quelques mois d’entrainement intensif, il part donc, je vous le donne en mille et un, à Bagdad, Irak, Moyen-Orient.

A partir de ce moment là, je reste scotché, fasciné, en discussion pendant deux heures avec Merrick, lui posant progressivement des questions plus sensibles sur le sujet. A l’aune de ses réponses, je découvre un type ouvert, curieux, sensible et lucide pour qui cette expérience fut à la fois forte et enrichissante. Il me parle d’esprit de corps, de camaraderie et de mixité sociale, comment ses meilleurs amis d’Irak sont toujours en contact, notamment Bo, un véritable redneck d’Alabama fier de lui envoyer une vidéo de son 4×4 embourbé dans un étang, tous ces gens qu’il n’aurait jamais croisé en restant aux US. On en vient à parler plus brutalement de son contact avec la mort et toujours, aussi franc, il m’avouera n’avoir eu qu’un contact assez vague, son unité n’ayant déploré aucune perte. La mort, elle était, supposée, lorsqu’il devait tirer vers une zone désignée abritant un ennemi.

Ses deux ans à Bagdad, il me les raconte comme une vie d’excitation et de confort, hébergé dans la zone verte ultra-protégée, sortant en patrouilles de Hummvee pour escorter les forces spéciales jusqu’à leurs zones d’intervention, en charge d’éliminer les fameuses têtes du « Deck of Cards ». Tout ceci est à la fois lointain et proche pour moi, nourri des multiples films sur le sujet mais d’être en contact direct avec quelqu’un l’aillant vécu est vraiment passionnant. Avec les irakiens, il a eu quelques contacts mais leur isolement ne facilitait pas la tâche.

Encore une fois, je suis séduit par sa façon très lucide, je trouve, et neutre de raconter cela. Globalement et avec le recul, il est d’accord pour estimer que leur rôle était tout au plus flou. Bizarrement, ça lui a ouvert l’esprit. De retour à Santa Cruz, il s’intéresse à de nombreuses choses, s’informe, lit. Grâce au contrat signé au moment de son recrutement, il part faire quelques années d’étude. Un gars véritablement passionnant et attachant surtout car il nous offre une grosse bouteille de bière d’une micro-brasserie de Santa Cruz. Toutes ces histoires irakiennes, c’est un prétexte pour être resservi, bien entendu.

Finalement, un verre d’excellent et rare bourbon dans les mains servi de la réserve personnelle d’un sympathique américain d’origine sicilienne (qui me raconte ses vacances chez sa grand mère en Sicile), je me retrouve toujours debout à 3h du mat’ avec une poignée d’irréductibles frenchies, dont l’inusable Samuel, attendant mon taxi pour l’aéroport de San José. Dans deux heures j’y décolle pour Montréal. Dans l’avion, j’aurai largement le temps de dormir et de repenser à toutes les surréalistes anecdotes racontés par Merrick.

Et comme j’ai une mémoire de m… et que j’étais « légèrement » éméché, je ne m’en souviens que très peu.

Le musée des horreurs

Il y a à HCMV un musée particulièrement particulier. Je note d’ailleurs que je n’ai pas beaucoup parlé des musées visités en général dans ce longiligne pays. Ce n’est pas bien grave. Il faut bien que j’en garde pour les longues conversations hivernales à mon retour. Mais, même s’il faut que je me répète, celui-ci de musée est vraiment particulier. Il s’agit du musée de la Guerre avec un grand G majuscule, celle qui pue, qui suinte, qui gicle, éviscère, lacère et carbonise. C’est drôle, maintenant que je me relie, cela pourrait décrire une émission de télévision culinaire campagnarde. Vous notez, d’ailleurs, comme j’évite précautionneusement d’utiliser le terme « émission de Maïté » ? C’est pour orgueilleusement toucher un public plus large et ajouter cette touche d’intemporalité à mon billet qu’une évocation d’une émission de télévision forcément contextuelle rendrait désuète pour les générations futures. J’écris pour la postérité, cette ingrate, et elle est exigeante. J’écris aussi pour brader mon stock d’adverbe, manifestement.

Avec toutes ces digressions, vous voilà complètement sortis du sujet qui est terrible aujourd’hui : La Guerre, The War, Das Krieg, bouh que c’est laid (ça, c’est pour la touche Achille Talonesque qui fera plaisir à un certain public de grimpeur). Ne vous inquiétez pas. On va bien finir par en parler de ce foutu musée de la Guerre d’Ho Chi Minh Ville.

A l’extérieur de ce musée, on trouve une habituelle collection de véhicules de l’époque guerre Américaine. Je dis « habituelle » car vu la débâcle et la fuite précipitée « femmes et enfants d’abord » de l’armée US, un grand nombre d’échantillons de chaque char, avion, hélicoptère ou canon fut laissé à la disposition des Vietnamiens. Il est donc très facile pour un quelconque musée du pays de s’en trouver muni. C’était notamment le cas à Hué. Moi, je trouve ça toujours amusant de se trouver à côté d’un avion Phantom F-4 pour de vrai, celui qu’on a vu dans les films, et constater sa relative petite taille. Rassurez-vous, je ne suis pas assez innocent pour imaginer que ce sont là les premières remarques qui venaient à l’esprit d’un paysan vietnamien lorsqu’il voyait arriver ces engins supersoniques en rase motte : « oh, qu’il est petit ! ». Boum.

Mais ça, j’ai envie de dire, c’est pour l’apéritif. Le véritable met principal de ce musée se trouve à l’intérieur du bâtiment parfaitement cubique et bétonné de trois étages. Une exposition permanente et quelques expositions temporaires se partagent le rez-de-chaussée et les deux galeries supérieures. Je ne me souviens pas en détail de la partie permanente qui devait sans doute traiter de la guerre Américaine. Il y avait un cortège de photos et coupures de journaux montrant le soutient à la cause Vietnamienne à travers le monde. Je n’était pas encore né (quoique, finalement, je dois être contemporain de deux ans de la guerre) donc il m’est difficile d’être objectif mais j’ai quand même fortement l’impression que, sur les documents de chaque pays démontrant ce soutien, la très grande majorité proviennent de pays tel que la Tchécoslovaquie, Cuba, la Russie ou signé des partis communistes de pays européens. Ça me laisse un certain sentiment de partialité. Fort heureusement, il y a les habituelles affiches et photos des manifestations américaines, françaises ou suédoises que je ressent, sans doute à tort, comme plus « spontanées ».

Non, le véritable intérêt que j’ai trouvé dans ce musée portait sur les deux expositions temporaires. La première, je vous en ai déjà parlé, évoquait l’hideux impact des agents défoliants, notamment orange, sur la population civile. Quand j’emploie le terme « hideux », ce n’est pas pour faire un effet de style et dépoussiérer un adjectif que j’use peu. Les sujets des photos sont véritablement parfois… indicibles et je ne vous parle pas de certains fœtus conservés dans du formol. Comme on est au Vietnam, ici, on ne prend pas de gants et tant pis si vous y amenez des enfants. Si mes souvenirs sont bons, néanmoins, il doit malgré tout y avoir un ou deux petits panneaux indiquant que le sujet est potentiellement choquant. Moi, je mange du boudin noir et des andouillettes alors plus rien ne me dégoûte. Ou presque.

La deuxième exposition, nettement plus supportable pour l’estomac, portait sur les photographes de cette guerre avec notamment une vaste panoplie de leur photo, la plupart du temps en noir et blanc. A ce propos, j’aimerai tout de suite crever un début de bulle de romantisme. Non, ils n’utilisaient pas le N&B pour faire style. C’est juste que c’était à l’époque parfois le seul film disponible, mais surtout le seul film disponible à haute sensibilité permettant de prendre des photos avec des temps d’expositions courts, indispensable pour saisir l’action. Je vous prie de croire que la pression commerciale des grands magazines de presse auront tôt fait d’imposer la couleur dés que cela deviendra possible techniquement. Rhaaa, voilà que je m’énerve tout seul, dites donc. En tout cas, l’exposition était superbe et on est marqué par le nombre d’entre eux morts pendant cette période. C’est bien simple, toute une génération de grands reporters ont laissé leur peau au Vietnam, Cambodge et Laos notamment des géants comme Robert Capra, l’homme qui avait photographié la guerre civile espagnole et la seconde guerre mondiale, excusez du peu.

A l’époque, ils partaient embarqués dans des unités combattantes, sans pouvoir communiquer avec leurs éditeurs, une poignée de rouleaux de film et deux appareils dans une sacoche armé d’un unique pistolet, pour ceux qui acceptait. Chose incroyable maintenant, ils avaient une quasi totale liberté de mouvement et de sujet. L’armée américaine en tirera une vive leçon en ne reproduisant plus jamais ce mode de fonctionnement. On peu sans aucun doute affirmer que ce sont ces grands photo-reporters qui, en alimentant les grands magazines de l’époque de leurs photos et reportages « neutres », ont alimenté la contestation. Eux et la télévision. D’ailleurs à la fin de l’exposition, un tableau récapitulatif par nation liste les noms des reporters décédés pendant ces événements. La France est dans le top 4 avec les américains. De manière surprenante pour moi, et cela montre sans doute l’intérêt que portait l’opinion publique de chaque pays pour ces faits, les journalistes japonais ont également payé un important tribut.

Après cela, vous pouvez toujours vous réfugier dans un bar-karaoké pour vous changer les idées.

Encore la guerre

Et si on parlait encore un peu de guerre, tueries et autres massacres de masse ? Ouaih, je me doutais bien que vous aimiez ça, petits pervers.

Au nord de la ville de Dong Ha, elle même au nord de la ville de Hué, elle même au nord de la ville de Da Nang (elle même au nord de la ville de Hoi An, mais je sens que vous commencez à vous lasser), se situe la DMZ. Mais que veut dire cet acronyme. Non, non, interdit de regarder sur Wikipédia, vous êtes à moi. Voilà. Regardez moi dans les yeux. Bien. DMZ veut dire « demilitarized zone », autrement dit en français, zone démilitarisée, ce qui est une façon plus jolie de dire « ligne de démarcation ». En vérité c’est plus qu’une ligne car c’est une bande de terre courant de la mer à la frontière du Laos séparant le Vietnam du nord du Vietnam du sud. D’où la zone. Vous l’avez compris, de nos jours cette DMZ n’existe plus mais c’est néanmoins un lieu majeur de la guerre américaine car un nombre important de batailles y eu lieu pendant cette fameuse « Offensive du Têt » (A ne pas confondre avec un coup de boule : wah vaz’y, comment qu’j’vais t’mettre une offensive d’la tête, la vie d’ma mère !).

Côté mer, on trouve un grand nombre de réseaux de tunnels creusés à main d’homme (et de femmes, bien entendu, les nord vietnamiens étant particulièrement peu sexistes dans ce domaine) qui permettait de s’abriter des bombardements quotidiens. Cela ne protégeait pas d’un coup au but mais augmentait drôlement le taux de survie. Ce qui est assez amusant, maintenant que les bombardements ont cessés (en tout cas, quand j’y étais. C’était sans doute un dimanche), c’est de constater l’étroitesse et la hauteur sous plafond de ces tunnels, clairement construits à l’échelle du vietnamien moyen de l’époque. Au passage, cela permet de goûter à la touffeur qui y règne et à l’angoissant manque de lumière. Pendant un bombardement, ça ne devait pas rigoler.

Si on sort dehors et qu’on s’élève un peu dans les airs, ont peu constater dans le paysage aux alentours, plutôt plat à cet endroit, un nombre très importants de cratères dans les rizières. C’est bien simple, cela ressemble à la surface lunaire. Fort heureusement, la végétation recouvre partiellement tout cela, et au sol, c’est plutôt imperceptible. Il n’y a que les buffles d’eau qui s’en réjouissent en profitant des multiples mares circulaires. Ça, pour se vautrer dans de la flotte boueuse, ils savent y faire. En plus, s’il y a un cratère, c’est que la bombe a explosée. Il n’y a donc aucun risque pour l’animal.

Contrairement à la Corée où un savant technocrate choisit de couper le pays en deux selon une jolie ligne droite le long d’une latitude, au Vietnam on se dit que c’était quand même drôlement plus pratique de prendre un élément naturel que l’on ne risque pas de ne pas voir comme séparation. C’est vrai, le 40° parallèle nord, j’ai beau me fatiguer les yeux, je n’en voit pas la trace au sol. On choisit donc de prendre la rivière Ben Hai comme ligne de démarcation, ce qui n’était pas bête vu qu’elle coure à peu près d’ouest en est.

Un seul pont permettait de traverser la rivière proche de son embouchure mais comme il était en plein dans la DMZ, il était très peu utilisé. La DMZ était également une « no man’s land » ce qui implique que toute personne y pénétrant était potentiellement considérée comme un assaillant. Autant vous dire que le tourisme y était peu fréquent. Néanmoins, et c’est toujours aussi fascinant de voir à quel point l’humanité peut être absurde parfois, le nord Vietnam décida de placer des haut parleurs de leur côté du pont pour diffuser des messages défaitistes : « Rendez-vous, sales impérialistes, en plus votre pho (fa) est dégueulasse de votre côté ! ». Quand il s’agit de jouer au con, il y a toujours des volontaires donc le sud Vietnam installa sa batterie de hauts parleurs avec un supplément de wattage pour diffuser des contre-messages également défaitistes : «Non, vous, rendez-vous, sales rouges mangeurs de chiens ! ». Cela dura quelque temps où chacun installa un nouveau surplus de puissance: « C’est à babord, qu’on gueuleuh, qu’on gueullleeeeuh ! C’est à babord, qu’on gueule les plus forts ». « C’EST A TRIBORD QU’ON GUEULE, QU’ON GUEUU-LEUH !! C’EST A TRIBORD, QU’ON GUEULE LES PLUS FORTS !! ». Et cetera. Fascinante humanité. Les vendeurs de matériel audio devaient se frotter les mains. Accessoirement, je vous invite à relire la BD « Le Grand Fossé », aventure d’Astérix pour se rendre compte, encore une fois, comment la réalité peut dépasser la fiction.

Mais malheureusement, le plus triste dans tout cela, c’est que ce n’est pas drôle. Car hormis ces moments de sympathique absurdité, la guerre Américaine, comme toutes ses cousines, recela un bon gros paquet de saloperies. Je vous rappel cette célèbre phrase tirée d’Apocalypse Now : « I love the smell of Napalm in the morning ». Oui, car pour rendre la vie plus difficile aux Viet Congs, les américains firent tout ce qui était en leur pouvoir pour déforester un maximum de territoire, notamment autour des lignes d’approvisionnement. Vous connaissez tous la célèbre photo de Nick Ut d’une petite fille brûlée au napalm courant nue vers le photographe qui fit basculer, entre autres, l’opinion public américain (et lui octroya le prix Pulitzer en 1972). Je n’en dirais donc pas plus sur le sujet.

Ce fut également l’occasion de tester à grande échelle de nouveaux types de défoliants à base de dioxine. On sait maintenant que la dioxine est une des substances les plus cancérigène au monde et ayant une durée de vie particulièrement longue. Il y a donc dans la campagne vietnamienne de longue bande de végétation à l’aspect neuf voir de longues bandes de prairies dans les montagnes, traces de ces défoliants. La star d’entre toutes les stars de ces produits porte un doux nom semblant directement issu d’un épisode de « X-Files » : l’agent orange. Si vous avez le cœur à ça et surtout bien accroché, je vous invite à chercher des photos d’enfants mal-formés de parents ayant été exposés à l’agent orange. C’est particulièrement indicible et l’exposition sur le sujet au musée de la guerre à Ho Chi Minh City laisse un sale goût en bouche et une sensation désagréable à l’estomac. Pensez « Elephant Man », membres en plus ou en moins, problèmes mentaux et déformations du squelette. Bien entendu, ça, c’est dans le pire des cas, quand l’enfant est viable. On imagine sans peine l’incroyable charge financière que cela représente pour un pays, sachant que cela peu courir sur plusieurs générations.

Sans vouloir faire dans l’accusation simpliste, car la chaîne de responsabilité est bien évidemment un peu plus complexe que cela, ce magnifique produit (trèèès efficace pour ce qui est de défolier, il est vrai) a été conçu et produit par l’extrêmement sympathique et humaniste compagnie Monsanto. Oui, celle des brevets sur les OGM, entre autres. D’ailleurs une « class action » intentée contre elle a été remportée par une association d’anciens combattants américains exposés à l’agent orange. Malheureusement, le gouvernement vietnamien a été débouté lorsqu’il a tenté de se raccrocher à cette action en justice. Encore une fois gardons nous d’une stigmatisation trop abrupte mais je ne résiste pas à l’envie de conclure par cette nouvelle très fraîche à propos de cette honorable entreprise. Elle aurait très récemment fait acquisition de la société « Blackwater » qui se trouve être une entreprise privée para-militaire notamment utilisée en Irak par l’armée américaine.

Bonne nuit les petits.

Ce que j’ai retenu de les guerres du Vietnam

Allez, hop. Que chacun prenne un cahier et un crayon. Tracez une ligne verticale 3 cm à droite de la marge de gauche et inscrivez votre nom, prénom ainsi que la date d’aujourd’hui. Notez le sujet de la leçon du jour : « Les guerres de le Vietnam ». Soulignez au stylo vert.

Nous sommes en 1940 et la France est en train de se faire botter les fesses par son voisin germanique. Cinq années plus tard, après une lutte acharnée mais finalement brève à l’échelle des guerres, les forces de l’Axe (rien à voir avec le déodorant) sont défaites et les grandes puissances vainqueuses (c’est bizarre, ça sonne pas bien) que sont le Royaume-Unie, les Etats-Unis et l’URSS, après avoir libéré la France, lui rétrocèdent ses anciennes colonies parce que franchement l’oppression c’est moche, l’occupation c’est vraiment méchant et que le droit d’autodétermination des peuples c’est presque nous qu’on l’a inventé (même si je crois que ce sont les américains) et que, ouaih, pfff, c’est vachement pas super d’être gouverné par des gens qui parlent même pas la même langue que nous. Bref, la France avait pris une leçon et en avait encore les fesses toutes rouges de s’être fait défaites aussi vites et les joues de la même couleur d’avoir eu un gouvernement de collaboration relativement zélé pendant cette triste période. Heureusement, les fiers idéaux de la / les résistances furent brandis bien hauts et on se réconforta en affirmant que ah mais oui en fait la vrai France c’était ça et pas les autres du gouvernement au nom de pastille.

Pendant ce temps là, quasiment de l’autre côté de la terre, dans les colonies que l’on appelle encore Indochine gentiment rendues par nos amis après que les Japonais nous les ai piqué, certaines personnes à la naïveté parfaitement écœurante et qui frise la bêtise, décidèrent que, puisque c’était le camps des gentils qui avait gagné et que résonnait partout des cris de « liberté, liberté », ils avaient le droit de se déclarer indépendant. C’était en 1948, la France était encore sous tickets de rationnement, et les gens de l’hexagone n’étaient vraiment pas d’humeur à rire. Non mais, ha ha, liberté, j’entends bien, ha ha, ils sont mignons, mais c’est à dire qu’en fait, comment vous dire… non ?

En plus, et là franchement faut vraiment chercher la merde, il se trouve que la majorité des gens souhaitant cette indépendance étaient d’obédience légèrement communisante, ce qui était drôlement la mode à cette époque, il faut bien le dire. Malheureusement, les pays occidentaux s’étaient légèrement crispés avec le camarade Staline qui n’avait pas vraiment joué le jeu en ne rendant pas leur autonomie et indépendance aux pays européens « libérés » pendant la reconquête. Du coup tout ce qui avait un vague lien avec le socialisme et le communisme était encore plus mal vu. C’est bien connu, le rouge, ça énerve. Demandez aux taureaux.

La France décide donc de reprendre les choses en main en Indochine pour bien signaler que, hé, la fête est fini et de toute façon, à la libération on était tous bourrés tellement on avait picolé pour fêter ça et c’est bien connu, les amis de beuveries, ce sont des amis d’une nuit. Et pis on s’en souvient pas qu’on avait vraiment dit « liberté, liberté ». On était bourré on vous dit. Accessoirement, une de ces personnes un peu trop candide qui souhaitait l’indépendance de son pays, un certain monsieur Hô Chi Minh, avait été supérieurement éduqué en France quelques années plus tôt. Oui, non, mais on vous dit des trucs à l’université mais faut pas prendre ça au pied de la lettre. Il est con lui, ha ha ha.

On décida donc d’envoyer des soldats au Vietnam pour calmer tout le monde. En plus les militaires français étaient encore chauds vu que la seconde guerre mondiale venait à peine de se finir. C’était donc un bon moyen de les occuper. Le seul problème, et il était de taille maintenant qu’on y pense, c’est qu’on avait pas vraiment les moyens de la faire, cette guerre, vu qu’on venait juste d’en finir une bien velue. Bon euh, comment dire, vous auriez pas deux, trois avions et un peu de bouffe pour qu’on puisse aller botter les fesses de ces p’tits jaunes, demanda-t-on aux américains ? Euh pardon, en fait on s’est trompé. Ils ne sont pas jaunes. Ils sont drôlement rouges, oulala, qu’est-ce qu’ils sont rouges.

Entendant cela – quoi, rouges vous dites ? Vous êtes sur ? Pas fuschia ou mauve ou orange, hein ? – les américains nous firent cadeau d’un support logistique et financèrent notre guerre de reconquête de l’Indochine. Ce fut donc la première guerre du Vietnam, autrement appelée la guerre Française par les vietnamiens.

Ça dura quelques années pendant lesquels les choses n’avancèrent guère. On s’entraîna à torturer dans les prisons de Hanoi ce qui fut drôlement pratique quelques années plus tard en Algérie. Puis un beau jour, on décida d’aller confronter directement l’armée de libération Vietnamienne dans une grande bataille dans les montagnes à l’ouest de Hanoi, histoire d’en finir une bonne fois pour toute. Alors là, je ne sais pas ce qui s’est passé, mais on a sérieusement cafouillé du ciboulot. Je ne suis pas un expert dans l’art de la guerre et je n’ai pas lu Sun Tsu mais je me dis qu’il y a quand même des choses qui sont un peu évidentes, toute de même. Le grand général français (dont je ne me souviens pas du nom, pour changer) commandant les troupes expéditionnaires, décida d’établir son camps dans une vallée entourée de hautes montagnes de toutes part, formant une cuvette naturelle, reliée à Hanoi par une unique route serpentant à travers un relief difficile. Bon. Moi je veut bien que ce soit superbe et que la proximité de l’eau courante présente certains avantages indéniable mais n’est ce pas un peu bébête d’un point de vue défensif ? Je veux dire, sans avoir beaucoup d’imagination, je vois bien des gens nous jetant des pierres par au-dessus.

Le général vietnamien, apprenant cela, dégrada son officier de renseignement sous prétexte qu’il fallait qu’il arrête de raconter des conneries car aucun général adverse digne de ce nom ne se mettrait dans une situation aussi débile. Bien entendu, il du bien admettre que si, il y en avait au moins un qui l’avait fait et sans trop se casser la tête sur de vastes réflexions stratégiques plaça de l’artillerie sur les crêtes surplombant la vallée. Ce général, du nom de Vô Nguyen Giap, était historien d’origine donc totalement autodidacte pour ce qui touchait à la stratégie militaire. Mais là, il faut bien avouer que c’était un peu facile.

Wah l’autre, ils tricheuh. Ils nous tirent par au-dessus ! firent, les français. Au bout d’un certain temps, ils se rendirent compte qu’il était également très facile pour l’adversaire de bloquer toute progression le long de la seule route d’approvisionnement et on se retrouva rapidement bloqué dans notre camps, bientôt à court de saucisson et de pastis.

« Allo, monsieur Oncle Sam ? Oui, euh, bonjour. Comment dire ? On est bloqué et on est bientôt à court de munitions pour l’apéro. Comment qu’on fait ? ». Notre gentil sponsor mis alors en place un pont aérien qui permit, pendant un certain temps, au camps français de tenir, malgré les bombardements quotidiens.

Ça ne dura qu’un temps car, de leur côté, les forces vietnamiennes allèrent demander à leurs amis Chinois (rouges également, avec une jolie étoile jaune) s’ils n’auraient pas quelques canons antiaériens dont ils n’auraient pas l’usage présentement. Donc assez rapidement, les avions américains furent incapables de soutenir l’armée française et le généralissime responsable du corps expéditionnaire fut bien obligé de se rendre, l’année 1952. Cela sonna donc la fin de l’intervention française au Vietnam, la signature d’un cessé le feu et la séparation du Vietnam en deux pays indépendants, le nord et le sud (c’est sur que si on avait voulu le découper dans le sens de la longueur, ça aurait été beaucoup plus pénible) approximativement au milieu. Pour les plus lettrés d’entre vous, la vallée, ou cuvette, en question où on alla s’enterrer s’appelle Dien Bien Phu. Je me demande ce qui est advenu du général français, tiens ?

Pour la partie sud, sous influence franco-américaine, on décida quelques temps plus tard de favoriser le coup d’état d’un président malléable histoire d’éviter que cette partie du pays ne bascule également sous régime communiste. Malgré le cessé le feu, des mouvements de libération du sud Vietnam (affectueusement appelés Viet Congs) commencèrent à effectuer des actions de déstabilisation. Le président Ngo Dinh Diem pris donc le pouvoir avec la bénédiction de Washington. Wikipédia me précise que son nom complet est d’ailleurs Jean-Baptiste Ngo Dinh Diem ce qui est parfaitement ridicule. « Jean-Baptiste, range ta chambre ! »

  • Je peux pas maman, je suis occupé à opprimer le sud Vietnam !

Car Jean-Bap’ s’avéra être un parfait salaud zélé et réussi à se rendre totalement impopulaire auprès de sa population. D’ailleurs, quelques années plus tard il fut assassiné au cour d’un autre coup d’état pendant que Kennedy regardait ostensiblement de l’autre côté, en poussant un grand « ouf » de soulagement lorsqu’il apprit la nouvelle.

Tout ça pour dire que les américains débarquèrent au Vietnam pendant que les français le quittait. Ça devait drôlement charrier côté US :« Vous avez refermé la cuvette avant de partir, j’espère ? Hahaha ». Ce fut donc le début de la deuxième guerre du Vietnam, appelé guerre Américaine. Il y a d’ailleurs une anecdote assez amusante concernant l’intervention US au Vietnam. Tout déploiement de troupes américaines en territoire étranger doit être approuvé par le congrès, à Washington. La bataille allait être rude pour convaincre la chambre, mais le gouvernement de Lyndon Johnson profita d’un coup de chance pour l’emporter. Suivant la source, il s’agit d’ailleurs soit d’un coup de chance, soit d’un coup machiavélique organisé par les USA pour trouver un prétexte à l’intervention. En 1964 un navire américain fut attaqué dans le golfe du Tonkin. Le gouvernement US accusa le Nord Vietnam, ce que celui-ci dénonça instantanément. L’anecdote amusante, que vous pourrez toujours ressortir à votre prochaine soirée raclette, est que l’amiral en charge de cette petite flotte du Tonkin et qui rapporta donc cette attaque fut l’amiral George Morrisson, père du chanteur / compositeur décédé au Père Lachaise, Jim Morrisson. Le fils haïssait son père, il suffit d’écouter « The End » des Doors pour s’en rendre compte.

Pendant quelques années ce fut uniquement une guerre de guérilla visant à tenter d’étouffer les mouvements communistes sud-vietnamiens et qui n’avait lieu que dans la partie sud, sous la ligne de démarcation. Rapidement, il devint néanmoins clair, malgré ses dénégations, que le Nord Vietnam soutenait ces mouvements via des lignes d’approvisionnement passant par le Laos (rappellez-vous Phong Nha et la route 12). La tension était à son comble sans parler que ça commençait à chouiner dans les chaumières yankee parce que des soldats mourraient. Genre.

On m’a d’ailleurs appris une anecdote fort intéressante sur cette période (par Hannah, en l’occurence), qui reste à valider bien entendu, mais qui en dit long sur la fourberie d’une certaine personne. A cette époque Richard Nixon (futur président des USA) était vice-président d’Eisenhower. Eisenhower était proche de la fin de son second mandat et Nixon était sur les starting blocks pour être le futur candidat républicain face au jeune sénateur démocrate, John F. Kennedy. A cette époque, Eisenhower souhaitait retirer les troupes du Vietnam et arrêter cette guerre mais Nixon ne l’entendait pas de cette oreille. D’après mes sources, il souhaitait maintenir la guerre pour favoriser ses desseins électoraux. Au cours d’une réunion entre Eisenhower et les dirigeants vietnamiens, il aurait tout fait pour écarter Eisenhower des ses interlocuteurs provoquant l’échec des négociations et la poursuite pour quinze années supplémentaires du conflit. Sympathique garçon, si cela est vrai.

Pour soutenir leur effort de tarissement (pas peu fier d’avoir utilisé ce verbe) des sources d’approvisionnement sud-vietnamiens, le général Westmoreland, commandant suprême des forces d’interventions US au Vietnam, décida de créer une base de Marines au plus prêt du Laos. Donc là, pareil, on se demande ce qui a bien pu lui passer par la tête à ce moment là mais je me dis que l’on n’apprend rien de l’histoire. On décida de placer cette base en hauteur, parce que Dien Bien Phu, ça va bien, mais les meilleurs blagues sont les plus courtes. On choisi donc un magnifique plateau entouré de profondes vallées situé à environ 600m d’altitude, à Khe San. C’était grand et plat ce qui était vraiment très pratique pour faire atterrir les B-52 et surtout les C-130 bourrés de burgers et de frites. En plus il y avait une route pour atteindre le plateau qu’on s’était embêté à construire.

« Aaaaah, on est bien là. Hein ?

  • Euh, chef ?
  • Oui ?
  • C’est quoi toutes ces montagnes autour qui ont l’air d’être plus hautes que la base ?<silence>
  • Et merdeuuuuh.

Pendant quelques temps, il ne se passa rien de spécial. Les B-52 effectuaient leurs ballets quotidiens pendant que les radios de la base beuglaient une bande son rock’n’roll, soul et folk encore inégalée aujourd’hui. Il faisait bon être un marine à Khe San.

Plus au nord, le généralissime Vo Nguyen Giap, en accord avec son gouvernement, préparait un vaste plan d’attaque qui allait officiellement amener le Nord Vietnam en conflit avec les américains. Le point de l’offensive avait été validé. Il restait maintenant à effectuer une diversion pour fixer les troupes adverses le plus longtemps possible éloigné du front principal.

Au Vietnam, tout les ans a lieu la fête la plus importante du pays, le Têt. D’après ce qu’on m’a dit, c’est un peu comme un Noël / Jour de l’An / anniversaire mélangé. C’est grand. C’est très grand. Et c’est le moment de l’année ou le Vietnam s’arrête pour fêter ça. Tout les ans, c’est également l’occasion d’une trêve guerrière et on en profite pour envoyer les soldats épuisés se reposer quelques jours à Da Nang, Saigon ou Sydney pour revenir plus tard avec toute la panoplie des MST de l’époque.

Quelques mois avant la fête du Têt, en 1968 (et là on se dit que franchement, c’est pas possible, mais qu’est ce qu’il s’est passé comme trucs dingues et historiques dans tout les domaines cette année là, sans doute une des années les plus denses de la civilisation occidentale au 20ème siècle), les troupes Nord Vietnamiennes attaquèrent la base de Khe San, située à quelques kilomètres de la frontière Laotienne. Coup de tonnerre. L’état major américain lève le sourcil gauche. Une forte concentration d’artillerie positionnée sur les montagnes avoisinantes (soupir et yeux au ciel) se met à pilonner le plateau, pistes d’atterrissage, avions et terrains de baskets compris. Pendant plusieurs semaines, la base va subir ce régime et le général Westmoreland avec l’accord de son gouvernement décide d’envoyer de plus en plus de marines en soutien, prévoyant une grande offensive dans la région. De base tranquille, Khe San devient un enfer. Au passage voici une photo du plateau tel qu’il est maintenant histoire que vous ne puissiez pas pouvoir imaginer comment c’était. Notez au passage la très jolie montagne en arrière plan à gauche.

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Puis, soudainement, au mépris de toutes les règles du jeu, le premier jour de la fête du Têt, alors que la moitié de la garnison américaine est en train de tranquillement siroter des mau taï et autres mojitos sous les cocotiers (sauf à Khe San où on est toujours en train de déféquer dans son pantalon sous la pluie d’obus qui tombe en permanence), le nord Vietnam déclenche une deuxième et féroce offensive terrestre 100 km plus loin, le long de la côte en direction de la ville de Hué, avec artillerie, char, infanterie et tout le bazar. En catastrophe, les USA sonnent le rappel et des milliers de verres de mau taï et mojitos sont lâchement abandonnés au même moment. On imagine également des hordes de marines arrivant en courant à Hué, la chemise à moitié rentré dans leur pantalon et la braguette ouverte.

Pendant plusieurs semaines, la ville est le théâtre d’une sanglante bataille urbaine et sera grandement endommagée. Néanmoins la soudaineté de l’offensive et l’effet de surprise fera basculer la guerre. Cette campagne sera dorénavant appelée « L’Offensive du Têt » et fut un des grands chefs d’œuvres militaires de Vô Nguyen Giap. Pendant encore sept années, les américains enverrons de plus en plus de troupes pour tenter de renverser le court de l’histoire mais finalement fuiront en catastrophe en 1975, abandonnant leur matériel, quand Saigon sera prise par les forces nord Vietnamiennes. On a tous vu ces photos de bottes, de fusils et de chars abandonnés en parfait état ainsi que d’hélicoptères AH-1 décollant en catastrophe pour évacuer des populations terrorisées. Le rouge, ça fait peur à tout le monde.

On signa donc la paix et le temps passa pendant que le Vietnam de nouveau unifié se remettait tout doucement en place à coup de petits règlements de compte. De l’autre côté de la frontière, le camarade Pol Pot virait tranquillement au despote sanguinaire et le Cambodge sombrait dans l’autodestruction. Purges sur purges la population civile du Cambodge disparaissaient, assassinées dans des camps. Personne n’osait intervenir, ressassant avec angoisse ce terrible conseil prodigué par les français et les américains : ne jamais s’engager dans une guerre terrestre en Asie du sud-est.

Au bout d’un certain temps, le gouvernement Vietnamien, lui même écœuré (c’est pour vous dire à quel point ce devait être particulièrement atroce) décida qu’il était temps que quelqu’un aille retenir le bras de ce fou sanguinaire. Le Vietnam parti donc en guerre contre le Cambodge et Vô Nguyen Giap pris les commandes des forces d’interventions. Une grande armée Vietnamienne pénétra sur le territoire voisin.

Peu de temps après, voyant que ses deux voisins du sud était occupés à se taper dessus, la Chine décida qu’il y avait une sympathique petite opportunité dont elle aurait tort de ne pas en profiter. Elle attaqua donc le Vietnam au nord et déclencha la troisième guerre du Vietnam, autrement appelée guerre Chinoise. Rhaaa, soupir, fit Vo Nguyen Giap quand son gouvernement hurla de rappliquer fissa au secour. Ils commencent à me faire braire tout ces cons qui se sentent permis de venir chez nous sans prévenir.

L’armée de Giap, commença donc sa lente remontée vers le nord. Mais, car ce n’était pas la moitié d’un con (même s’il profita pas mal de la connerie des autres, il faut bien l’avouer), il décida de remonter discrètement par le Laos, avec qui ils étaient resté en bon terme, pour obliquer tout aussi discrètement vers la droite arrivé à hauteur de la Chine. Le mouvement fut opéré à la perfection et les Chinois se retrouvèrent avec une horde de vietnamiens en pyjama noir et chapeaux pointus dans leur dos. Après deux claques et un coup de genou dans les gonades, ils rentrèrent chez eux la larme à l’œil. Bon, bon, ça va. C’était juste pour voir si vous ne dormiez pas. Fin de la guerre, pour de bon, et jusqu’à nouvel ordre.

Il se trouve que le général Vo Nguyen Giap, et je ne sais plus si je vous l’ai déjà dit, avec toutes ces péripéties, est le seul général à avoir vaincu trois super puissances. Ce qui en fait une figure guerrière parmi les plus grandes. Quand au Vietnam, après trois guerres sur une durée totale de vingt ans, il était temps de souffler un peu.

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