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Une pensée économiste

Le pognon, le flouse, l’oseille, das geld, ach liebe ! C’est dramatique mais depuis que j’ai posé le pied sur le sol plat et rouge du continent australien, j’arrête pas de penser à l’argent. Voilà ce que c’est de passer deux mois dans des pays à la monnaie faible et aux salaires miséreux. On en oublie la valeur véritable des choses. Tenez, par exemple, le moindre pho (fa) à Darwin (oui, j’avoue avoir craqué) coûte quasiment le même prix qu’une nuit d’hôtel à Hampi. C’est scandaleux ! Je m’insurge ! Bon, après, quand on est accro, on paye quand même.

Intrigué, je ne manque pas la moindre occasion d’évoquer ce sujet avec de tierces personnes: l’Australie, c’est cher, même pour un détenteur d’Euros. En discutant avec un des hollandais du groupe, lors de mon tour kakaduien, nous avons estimé que la vie, à euros équivalents, est environ 25% plus cher qu’en Europe. Mais alors comment font tous ces australiens ? Sont ils misérables ? A première vue, pas vraiment. Ils font tous une tête de plus que moi et se paye des bières comme si c’était de l’eau au prix d’un verre de vin en France.

La réponse, évidente bien entendu, m’a été donné par un jeune français croisé dans mon hostel à Darwin. Lui était sous visa touriste-travail (ce fameux visa d’un an maximum qui permet pour des étrangers de moins de 35 ans de pouvoir combiner visite et travaille sur place), comme énormément de jeunes que je croise. La solution est géniale de simplicité : les salaires en Australie sont élevés. Il fallait y penser. Il y a néanmoins une petite astuce et elle est de taille, les salaires sont élevés dans tout les secteurs d’activité pour tout les types de postes. Ça c’est carrément radical-bolchévique si vous voulez mon avis. Tenez, par exemple, un chiffre, puisque je vous sens sceptique (et ne l’étais-je point, moi z’aussi?). Le p’tit jeune m’a sorti un salaire de 30 AUSD brut par heure pour un boulot de serveur. Non mais on croit rêver ! Ils veulent foutre en l’air l’économie estival du midi avec ces tarifs à la con, ou quoi ? Pour les plus fainéants d’entre vous, ça fait environ du 20 € de l’heure. A l’heure où je vous écrit, le SMIC horaire brut est à 9,43 €. Je vous prie de croire que les charges et impôts ne sont pas de 50%.

Mais comment font-ils, je vous le demande ? Il faut pas être grand économiste (un niveau 1ère ou terminal, suffit) pour se rendre compte que l’Australie se trouve finalement dans une situation assez proche des trentes glorieuses européennes. Elle possède un gros secteur primaire avec une agriculture et un secteur minier fort et exportateur. Pour le secteur secondaire, c’est pas mal non plus puisqu’ils ont encore beaucoup d’industries dans pas mal de secteurs. Cerise sur le gâteau, les australiens pratiquent beaucoup l’achat patriotique en privilégiant le « Made in Australia » et réinjectent donc leur argent dans leur économie. Avec des secteurs primaires et secondaires qui marchent bien et qui payent honorablement, ils peuvent tranquillement développer leur secteur tertiaire (banques à Sydney notamment) sans que ça ne crée de déséquilibre. Quand je pense que c’est quelque chose qu’on m’avait expliqué au lycée. Parfois on se dit que quand c’est trop simple, c’est pas si évident que ça.

Le petit nuage sombre qui se profile, c’est que le secteur minier qui était extrêmement profitable du fait d’exportations massives vers la Chine, donc extrêmement dépendant des exports, ralenti au rythme de son principal client. L’arrêt du « mining boom » des dix dernières années est d’ailleurs un des sujets de débat de l’actuelle campagne pour l’élection du nouveau premier ministre. Il sera intéressant de voir si cela affectera dans le futur l’équilibre harmonieux du niveau de vie australien.

Toutes choses égales par ailleurs, moi je me ruine à coup de steaks à 21 $.

Darwin

Darwin n’est pas une ville typique d’Australie bien que Darwin soit une ville typiquement Australienne. Je manie la contradiction comme Zidane un ballon de foot. Je me permet d’affirmer tout et son contraire car Darwin est les deux à la fois, mais également pour trouver encore et toujours une façon originale de commencer un billet, ce qui est toujours le plus dur. Petite astuce d’ailleurs, si vous vous retrouvez en face d’une page blanche sans inspiration, écrivez n’importe quoi genre « prout, caca boudin, pouet » et enchaînez. Grâce aux outils modernes de l’informatique, il sera toujours temps d’y revenir et de trouver un début adéquat et seyant. Là, par exemple, vous n’en savez rien mais j’ai commencé par « foutus ricains de merde », ce qui a un sens pour moi présentement mais aucun dans le contexte de ce billet. Fin de la digression.

Darwin est un peu à part en Australie pour plusieurs raison. Tout d’abord, géographiquement, c’est la ville la plus isolée du pays, et c’est beaucoup dire. En vérité, l’agglomération la plus proche doit se trouver quelque part dans l’île du Timor, au nord, de l’autre côté du détroit, c’est à dire en pays étranger. Ensuite, c’est la seule agglomération Australienne ayant subit des bombardements lors de la seconde guerre mondiale. Voilà ce que c’est que d’aller s’isoler tout seul dans un coin. On se fait taper dessus par des plus forts que soit. Troisièmement, c’est la seule ville Australienne à avoir été frappé par un typhon et quasiment entièrement détruite dans le processus. Pour votre culture générale, cela a eu lieu en 1974. Quatrièmement, c’est la seule capitale d’un des états australien qui n’en ai pas vraiment une. Mais là, je tire un peu sur vos cheveux car en réalité, bien qu’hébergeant le parlement des Territoires du Nord, elle n’est pas techniquement une capitale d’état dans la mesure ou les Territoires du Nord ne sont pas un état. Si vous étiez attentifs vous comprendrez que ce sont des territoires. C’est marqué dessus, bon sang. Ils dépendent administrativement de l’état fédéral à Canberra. Autant dire que, là haut, c’est le far west.

Avec tout ces malheurs et contre-indications on se demande ce qui a bien pu pousser les anglais à créer une ville là haut, toute seule au milieu de nulle part. La raison en est fort pragmatique car il s’agit du point d’arrivé de la ligne de télégraphe reliant l’Australie à la Grande-Bretagne. Oui, à un moment donné de l’histoire, le gouvernement britannique en a eu assez d’attendre six mois pour avoir des nouvelles de là bas. Déjà qu’on trouve cela pénible d’avoir des discussions sur internet avec un retard de plus d’une seconde, imaginez quand il faut attendre six mois après chaque question :

« Salut Robert, comment ça se passe là bas depuis la dernière fois ?

  • Salut Victoria, ici ça se passe plutôt bien mais pourriez-vous nous envoyer du boeuf, STP ?
  • Salut Robert, désolé mais Victoria vient de nous quitter. Maintenant c’est George qui te parle.
  • Ah bonjour George, ici c’est James. Robert a été bouffé par un requin. C’est gentil d’avoir pensé au bœuf mais on s’est mis à bouffer du kangourou entre-temps.

Depuis, malgré les deux destructions successives du vingtième siècle, la ville a légèrement grossi. On ne peut pas vraiment dire que ce soit une cité car la population est certainement de l’ordre de plusieurs dizaines de milliers de personnes, légèrement plus pendant la saison touristique. Par contre, les australiens étant un peu comme tout le monde, ils se sont un peu étalés. Faut dire qu’ils ont de la place, là bas, et le relief inexistant réduit considérablement les prises de têtes pour ce qui est de l’aménagement du territoire. C’est donc essentiellement un joli quadrillage de grandes rues avec un centre dédié à la restauration, au divertissement et au tertiaire. Tout autour se trouve des quartiers résidentiels de maisons individuelles. Bien entendu, il y a quelques exceptions et on peut tomber de temps en temps sur des immeubles d’habitations luxueux en dehors du CBD ainsi que quelques magasins. Néanmoins, ne comptez pas trop sur une quelconque vie de quartier.

La ville vit essentiellement du tourisme du fait de sa situation très au nord du pays qui lui octroi une météo tropicale quasiment toute l’année. En réalité, l’année se divise en deux saisons, une sèche et une humide. La sèche, pendant l’hiver australe, bénéficie de températures clémentes autour de 30°C la journée et 22°C le soir ainsi qu’une absence totale d’humidité. C’est la pleine saison touristique. Pendant la saison humide, les températures montent à 40°C le jour et 30°C la nuit avec une humidité et des précipitations extrêmes. C’est la saison morte.

L’autre activité économique de la ville provient de son port, point d’exportation des produits miniers de l’intérieur du pays. Tout ce petit monde est relié au reste du pays par un va et vient de road-trains, les fameux camions tirant plusieurs remorques.

Trois facteurs expliquent un niveau de prix relativement élevé à Darwin. Tout d’abord, j’y suis pendant la haute saison touristique. Ensuite, elle est isolé donc la majorité des biens sont « importés » par road-train. Et finalement, de nombreux habitants travaillent pour les industries minières, très généreuses en salaire. Voilà, avec tout ça, vous en savez autant que moi sur cette ville, et ça me permet de cesser ce désagréable ton doctoral.

Fatalement, vous devez vous demander quel est l’intérêt d’y foutre les pieds. Tout d’abord, moi je ne vois pas pourquoi lorsqu’on visite un pays on devrait forcément se cantonner aux belles architectures et au musée. Si la majorité du pays est moche, il faut s’y plonger. En plus, moi je trouve ça amusant de débarquer dans une petite ville plutôt que d’aller vers la facilité en atterrissant à Sydney, comme n’importe quel lambda. Troisièmement, c’est le point d’accès aux parcs nationaux de Litchfield, au sud, et Kakadu (nom ridicule, je le concède), à l’est. Finalement (ce billet sera décidément truffé d’énumérations), si vous n’êtes toujours pas convaincu, c’est aussi l’occasion de prendre un peu le soleil et la chaleur en plein hiver australe et profiter de la plage. Car plage il y a, chers amis, cocotiers et eucalyptus compris.

DSC_6330_DxOA Darwin, une fois avoir déambulé dans le CBD, pris un café à 3€ en terrasse et profité du petit parc surplombant une mer turquoise, qu’est ce qu’on peut bien voir ? Vous pouvez visiter l’unique bâtiment administratif survivant du typhon, un magnifique petit bâtiment du 19ème siècle de plein pied aux briquettes peintes en blanc. Pardon, je m’emballe : un petit bâtiment de plein pied aux briquettes peintes en blanc. Il semble chéri ici comme si c’était le château de Chambord.

DSC_6345_DxOBon, ensuite, qu’est ce que je peux vous proposer de bien ? Ah oui, vous pouvez aller faire un tour au musée de la ville, fort sympathique (et je suis sincère). Au passage, y aller suppose une longue marche à pied le long de la baie extrêmement agréable (quand je vous dit qu’ils se sont étalés, ces cochons). Le musée propose des expositions sur la faune locale, notamment un crocodile de 4m de long empaillé, une collection de bateaux, y compris un véritable vaisseau emprunté par des boat-peoples (le lien avec le Vietnam) et aussi une section aborigène.

DSC_6348_DxOEnsuite, ensuite. Qu’est-ce qu’on va bien pouvoir faire ? On peut se baigner. Oui, oui, oui. Voilà. C’est sur, il y a la mer. Ensuite. Bennnn, on peut regarder un ponton de la deuxième guerre mondiale. Ça, c’est fait. Après, euh, on peut se jeter une bière à 6€ (¾ de pinte). Si on est vraiment hyperactif, on peut aller admirer le bâtiment moderne abritant le parlement. Oooh, c’est bô. Okaaaay. Comme on est des fous de culture locale, on peut également aller faire un petit tour aux supermarchés Coles ou Woolworth admirer les prix. Accessoirement, ça permet de profiter d’une petite climatisation fort agréable. Si le cœur vous en dit, vous pouvez aller faire une petite marche dans les quartiers résidentiels pour faire semblant d’être dans un épisode des « Desperate Housewives », version Aussie. Ensuite, bon, ben, ensuite, j’veux dire, heuu, on peut aller se manger un petit steak frite à 20€, ma foi. Pfffiouu, belle journée, dites donc.

Ouaih, ouaih, ouaih.

DSC_6337_DxOLa journée commence à décliner (sous les tropiques, la nuit tombe sans prévenir) et un sourire de joie se dresse sur nos visages. Maintenant, enfin, il y a un truc vraiment différent à faire. Le petit bijoux de Darwin, cette petite bulle de culture grand public parmi un océan de consumérisme, se trouve au bord de la baie, au pied des falaises bordant le CBD. Je vais être franc, j’y suis allé deux fois de suite. Tous les soirs à 19h, le Deckchair Cinema, cinéma en plein air, vous propose une séance à un prix raisonnable (12€, c’est donné) dans un environnement original avec une programmation à l’éclectisme digne de l’Utopia (référence Toulousaine).

Parmi les eucalyptus et quelques cocotiers, vous vous asseyez dans une chaise longue face à l’écran. Des coussins sont disponibles gratuitement pour vous ajuster au mieux et si vous avez faim, un plat du jour peut même être consommé sur place. Lors de ce début de soirée fraîchissant (se munir à ce propos d’une petite laine et d’un répulsif anti-moustique), en attendant la projection et pendant que les chaises se remplissent tranquillement, observez l’écran se détachant sur un ciel crépusculaire. Une petite brise fait onduler les feuilles au-dessus et de temps en temps, une chauve souris traverse votre champs de vision. Dans les arbres, quelques cacatoès blancs à crêtes jaunes attestent votre présence hors d’Europe. Puis soudainement, un possum entame la périlleuse traversée de l’écran en s’agrippant au sommet. Les insectes grésillent. Lorsque la nuit est parfaitement tombée et que la Croix du Sud apparaît au dessus de vous, la séance peut commencer.

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La vie en deux roues

Vous l’avez bien compris, en Asie, les deux roues sont rois. Comme le disait notre guide lors de cette randonnée épique dans la boue autour de Da Lat : « On commence par marcher. Quand on a un peu d’argent on s’achète un vélo. Ensuite, un scooter. Ensuite, un scooter de luxe. Et finalement, une voiture ». En disant cela, il voulait nous expliquer pourquoi la plupart des vietnamiens ne comprennent pas le concept de « randonner pour le plaisir ». Mais on peut aussi y voir la terrible prémonition d’un pays qui verra son nombre d’automobiles exploser d’ici que le niveau de richesse augmentera. Rien de nouveau.

En tout cas, la vie à deux roues ne s’arrête jamais, quelque soit la météo, la chaleur ou le vent. Au pire, elle se met en pause, le temps d’enfiler un poncho ridicule. Petit jeu: dans la série de photos qui suit se trouve deux intrus. Saurez-vous les retrouver?

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En tout cas, pour le moment, ils en sont au stade trois où la plupart des gens ont un scooter. Certains ont mêmes des superbes scooters électriques au design ramassé et nerveux que j’attends impatiemment en France. Malheureusement, je ne parviens pas à en trouver une image donc vous ne pouvez que me croire sur parole : ils sont ramassés et nerveux.

Pour finir, voici une photo de deux usagers de deux roues qui m’ont demandé de les immortaliser. Devinez qui est le pilote et le passager.

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Le musée des horreurs

Il y a à HCMV un musée particulièrement particulier. Je note d’ailleurs que je n’ai pas beaucoup parlé des musées visités en général dans ce longiligne pays. Ce n’est pas bien grave. Il faut bien que j’en garde pour les longues conversations hivernales à mon retour. Mais, même s’il faut que je me répète, celui-ci de musée est vraiment particulier. Il s’agit du musée de la Guerre avec un grand G majuscule, celle qui pue, qui suinte, qui gicle, éviscère, lacère et carbonise. C’est drôle, maintenant que je me relie, cela pourrait décrire une émission de télévision culinaire campagnarde. Vous notez, d’ailleurs, comme j’évite précautionneusement d’utiliser le terme « émission de Maïté » ? C’est pour orgueilleusement toucher un public plus large et ajouter cette touche d’intemporalité à mon billet qu’une évocation d’une émission de télévision forcément contextuelle rendrait désuète pour les générations futures. J’écris pour la postérité, cette ingrate, et elle est exigeante. J’écris aussi pour brader mon stock d’adverbe, manifestement.

Avec toutes ces digressions, vous voilà complètement sortis du sujet qui est terrible aujourd’hui : La Guerre, The War, Das Krieg, bouh que c’est laid (ça, c’est pour la touche Achille Talonesque qui fera plaisir à un certain public de grimpeur). Ne vous inquiétez pas. On va bien finir par en parler de ce foutu musée de la Guerre d’Ho Chi Minh Ville.

A l’extérieur de ce musée, on trouve une habituelle collection de véhicules de l’époque guerre Américaine. Je dis « habituelle » car vu la débâcle et la fuite précipitée « femmes et enfants d’abord » de l’armée US, un grand nombre d’échantillons de chaque char, avion, hélicoptère ou canon fut laissé à la disposition des Vietnamiens. Il est donc très facile pour un quelconque musée du pays de s’en trouver muni. C’était notamment le cas à Hué. Moi, je trouve ça toujours amusant de se trouver à côté d’un avion Phantom F-4 pour de vrai, celui qu’on a vu dans les films, et constater sa relative petite taille. Rassurez-vous, je ne suis pas assez innocent pour imaginer que ce sont là les premières remarques qui venaient à l’esprit d’un paysan vietnamien lorsqu’il voyait arriver ces engins supersoniques en rase motte : « oh, qu’il est petit ! ». Boum.

Mais ça, j’ai envie de dire, c’est pour l’apéritif. Le véritable met principal de ce musée se trouve à l’intérieur du bâtiment parfaitement cubique et bétonné de trois étages. Une exposition permanente et quelques expositions temporaires se partagent le rez-de-chaussée et les deux galeries supérieures. Je ne me souviens pas en détail de la partie permanente qui devait sans doute traiter de la guerre Américaine. Il y avait un cortège de photos et coupures de journaux montrant le soutient à la cause Vietnamienne à travers le monde. Je n’était pas encore né (quoique, finalement, je dois être contemporain de deux ans de la guerre) donc il m’est difficile d’être objectif mais j’ai quand même fortement l’impression que, sur les documents de chaque pays démontrant ce soutien, la très grande majorité proviennent de pays tel que la Tchécoslovaquie, Cuba, la Russie ou signé des partis communistes de pays européens. Ça me laisse un certain sentiment de partialité. Fort heureusement, il y a les habituelles affiches et photos des manifestations américaines, françaises ou suédoises que je ressent, sans doute à tort, comme plus « spontanées ».

Non, le véritable intérêt que j’ai trouvé dans ce musée portait sur les deux expositions temporaires. La première, je vous en ai déjà parlé, évoquait l’hideux impact des agents défoliants, notamment orange, sur la population civile. Quand j’emploie le terme « hideux », ce n’est pas pour faire un effet de style et dépoussiérer un adjectif que j’use peu. Les sujets des photos sont véritablement parfois… indicibles et je ne vous parle pas de certains fœtus conservés dans du formol. Comme on est au Vietnam, ici, on ne prend pas de gants et tant pis si vous y amenez des enfants. Si mes souvenirs sont bons, néanmoins, il doit malgré tout y avoir un ou deux petits panneaux indiquant que le sujet est potentiellement choquant. Moi, je mange du boudin noir et des andouillettes alors plus rien ne me dégoûte. Ou presque.

La deuxième exposition, nettement plus supportable pour l’estomac, portait sur les photographes de cette guerre avec notamment une vaste panoplie de leur photo, la plupart du temps en noir et blanc. A ce propos, j’aimerai tout de suite crever un début de bulle de romantisme. Non, ils n’utilisaient pas le N&B pour faire style. C’est juste que c’était à l’époque parfois le seul film disponible, mais surtout le seul film disponible à haute sensibilité permettant de prendre des photos avec des temps d’expositions courts, indispensable pour saisir l’action. Je vous prie de croire que la pression commerciale des grands magazines de presse auront tôt fait d’imposer la couleur dés que cela deviendra possible techniquement. Rhaaa, voilà que je m’énerve tout seul, dites donc. En tout cas, l’exposition était superbe et on est marqué par le nombre d’entre eux morts pendant cette période. C’est bien simple, toute une génération de grands reporters ont laissé leur peau au Vietnam, Cambodge et Laos notamment des géants comme Robert Capra, l’homme qui avait photographié la guerre civile espagnole et la seconde guerre mondiale, excusez du peu.

A l’époque, ils partaient embarqués dans des unités combattantes, sans pouvoir communiquer avec leurs éditeurs, une poignée de rouleaux de film et deux appareils dans une sacoche armé d’un unique pistolet, pour ceux qui acceptait. Chose incroyable maintenant, ils avaient une quasi totale liberté de mouvement et de sujet. L’armée américaine en tirera une vive leçon en ne reproduisant plus jamais ce mode de fonctionnement. On peu sans aucun doute affirmer que ce sont ces grands photo-reporters qui, en alimentant les grands magazines de l’époque de leurs photos et reportages « neutres », ont alimenté la contestation. Eux et la télévision. D’ailleurs à la fin de l’exposition, un tableau récapitulatif par nation liste les noms des reporters décédés pendant ces événements. La France est dans le top 4 avec les américains. De manière surprenante pour moi, et cela montre sans doute l’intérêt que portait l’opinion publique de chaque pays pour ces faits, les journalistes japonais ont également payé un important tribut.

Après cela, vous pouvez toujours vous réfugier dans un bar-karaoké pour vous changer les idées.

Sports tonkinois

Une, deux, une, deux. Flexion. Extension. Petite foulée. Hh, hh, hh, hh. Le sujet du billet du jour, hh, hh, est le sport. Hh, hh, hh. Repos. Pfffffffffffouuuuh. Respirez. Expirez. Pfffffffffffffouh. Ok.

Je l’avions déjà constaté à Hanoi mais mes soupçons se retrouvent confirmés à Saigon. Je peux donc m’en ouvrir auprès de vous sans craindre les railleries. Au fait, étirez-vous et buvez. C’est important de bien s’hydrater. Hors donc, tout autour de Hanoi, et même en plein cœur touristique on trouve des traces de terrains de jeu inscrits au sol dans des parcs ou même parfois sur les trottoirs. Moi qui suit extrêmement averti de la chose sportive pour lire assez régulièrement la presse écrite quotidienne spécialisée (je ne dédaigne pas non plus quelques rendez-vous hebdomadaires télévisuelles avec un magazine multi-sport), j’ai pu reconnaître des marques superposées de terrains de volley-ball et de badminton. Chose curieuse, à aucun moment ai-je pu assister à un match de ces sports. J’étais donc particulièrement troublé.

Il se trouve que je m’en suis ouvert également à Da Lat auprès du trio tchèque et du duo anglais. J’ai reçu confirmation de leur part que ces deux sports était au Vietnam relativement importants et pratiqués. Je ne connais pas leurs sources mais ils avaient l’air très sûrs d’eux. Mais alors ils refusent d’y jouer sur ces terrains publics puisque je n’en ai vu aucun les utiliser ? Bon, il faut bien admettre qu’avoir des limites de terrain au sol, c’est un bon début, mais que l’essentiel du jeu se fait autour d’un filet qui lui, est absent. Fort heureusement d’ailleurs car se serait pour le moins désagréable pour le passant de devoir en permanence se baisser pour emprunter un trottoir ou une place.

Néanmoins, il n’est pas impossible que le football devienne un sport majeur dans les années à venir. Pour le moment, l’enthousiasme et la volonté, y compris politique, y est mais les résultats ne sont pas encore au rendez-vous. Pendant mon séjour à Da Lat, notamment la veille de mon arrivée à HCMV, l’équipe nationale s’était faite, par deux fois, douloureusement fessée par une équipe d’Arsenal en rodage et tournée asiatique d’avant saison. Je vous parle ici de scores qu’on l’on associe plus habituellement au tennis comme des 6-0 ou des 7-1. Je ne vous parle pas d’ailleurs de la joie quasi coupe-du-mondesque du public lorsque l’équipe a réussi à marquer l’unique but des deux rencontres. D’ailleurs, je me contredis car je viens de vous en parler. Ce fut, notamment, un de nos sujets de conversation avec mon xe om, qui était fan de foot, à l’arrivée à HCMV. Oui, car maintenant je suis tellement en confiance quasiment nu-pied à l’arrière d’un deux roues que j’engage la conversation avec mon pilote.

Par contre, et là ça ne concerne que HCMV, j’ai pu être témoin d’un drôle de sport d’adresse un soir dans un des parcs hyper-central du district 1. Je soupçonne que ce soit pour des raisons d’exhibitionnisme. Gilly m’en avait d’ailleurs parlé comme une sorte d’hybride entre le badminton et le football qui consiste à se faire des passes à deux et au pied (pourquoi jamais personne ne conçoit que l’on puisse faire ça à coup de fesses et de hanches?) avec quelque chose qui ressemble à un volant de badminton, le tout sans filet, pour que le danger soit plus extrême.

Moi j’adore tout ce qui est hybridation car on est toujours à la limite de la bâtardisation, son pendant négatif. L’iPhone est un hybride entre un ordinateur portable et un téléphone. L’ornithorynque est un bâtard entre le canard et le castor. Donc quand je vois un sport hybride comme ça, je suis toujours curieux de connaître l’histoire de son invention. Mais surtout ça déclenche une foule d’idées dans mon cerveau imaginatif comme un sport hybride entre le croquet et le rugby ou entre le ping-pong et le saut à l’élastique. Les possibilités sont infinies et le potentiel marketing de ces deux nouvelles inventions de mon cru virtuellement sans limites. Je m’y penche dés mon retour.

Par contre, il y a un signe qui ne trompe pas concernant la situation économique du Vietnam. Je suis en train de théoriser un lien bijectif entre le statut de pays développé et la pratique du jogging. Même dans les nombreux parcs de Hanoi ou de Saigon, quasiment personne (hormis peut-être l’expatrié européen ou américain) ne court bêtement après sa forme physique. Il m’est avis que c’est un besoin relativement haut dans la pyramide de Maslow. Je peux donc conclure de manière quasi certaine que le Vietnam n’est pas un pays développé.

CQFD.