Premières expériences en Xe Om

Parce qu’il faut toujours tenter de repousser ses limites et essayer (j’ai bien dit essayer) de se confronter à ses angoisses, je me suis dit qu’il était temps de tenter le transport en xe om. Petit rappel pour les moins assidus, un xe om, prononcé certainement pas comme cela s’écrit, est un moto taxi. La plupart du temps ce sont d’ailleurs des mobylettes taxis ou plus précisément des 125cm3 à embrayage automatique, pour les puristes. Et j’imagine que ceux qui aiment faire mal aux mouches par derrière sont nombreux. Si vous tapez « xe om » sur internet, ce que j’ai fait donc épargnez vous cette peine, c’était uniquement un effet de style, vous découvrirez que cela se traduit littéralement par « embrasser le conducteur » ou plutôt « faire un câlin au conducteur ». Le terme vient sans doute de la position qu’on est tenté d’adopter une fois assis à l’arrière consistant à agripper la personne de devant.

Maintenant il est temps de vous avouer que je vous ai menti sans trembler, tout ça pour une phrase d’introduction que je voulais accrocheuse. En vérité je ne me suis absolument pas de moi même confronté à ma peur du xe om. On m’a traîtreusement et sans me prévenir mit devant le fait accompli. Je vous explique.

Pour pouvoir aller visiter les fameux tombeaux hyper-classieux des empereurs Nguyen, je me suis inscrit à un tour guidé à mon hôtel. C’est d’ailleurs drôlement pratique et les indiens devraient en prendre de la graine plutôt que de dépenser des millions dans des publicités télévisées bourrées de mensonges par omission, diffusées dans les chambres d’hôtels d’Heathrow à des touristes candides. Et avec toute cette digression je ne vous ai toujours pas dit ce qui était pratique, en l’occurrence le fait que chaque hôtel vous propose un choix d’excursions que l’on peut réserver et payer directement à l’accueil. Certes c’est un peu un truc de fainéant et on ne maîtrise pas forcément la qualité du tour. Mais peu importe, dans ce cas présent ce qui m’intéressait était un moyen de transport (fluvial et routier) pour visiter les principales tombes dans la journée. Je demande donc à la fille (souriante) de l’accueil où se situe le point de départ de l’excursion, ce à quoi elle me répond quelque chose de l’ordre de : « non, ne vous inquiétez pas, le bus vient vous chercher ». Parfait, un soucis et de la marche en moins.

Le matin de l’excursion, j’attends donc l’arrivée du bus dans la petite ruelle abritant l’hôtel (je vous avoue qu’il me tardait de voir un bus se frayer un chemin dans ce passage étroit mais je savais les vietnamiens plein de ressources pour ce qui est de conduire des véhicules), tout en digérant ma délicieuse pancake à la banane qui constituait l’essentiel de mon petit déjeuner. A l’heure prévue un motard s’arrête devant l’hôtel et l’hôtesse d’accueil me sort de ma torpeur matinale pour m’indiquer que le transport prévu est arrivé. Comment, euh ? Faut que je monte là dessus ? Oui, oui. Ah bon.

Telle une vache menée à l’abattoir et sous le regard de l’hôtesse qui me fait au-revoir et bonne journée avec un grand sourire, je me dirige en déglutissant vers le motard qui fait redémarrer son véhicule. Je m’assoies derrière le conducteur et pose mes schlappes / slache / gougoune / claquettes / tongs sur deux excroissances métalliques que je prie ne faisant pas parti du circuit d’échappement. Mon pilote a un casque mais il ne songe pas une milliseconde à m’en proposer un. Comme nous ne sommes pas encore très intimes je décide que c’est un peu tôt pour lui agripper ses poignées d’amour et saisi donc plutôt la métallique située derrière moi.

« Ok ? », me demande-t-il ?

  • Euh… yes, yes. Glups.

Brrrrraaaaaawwww. Rha le salaud. Il aurait pu compter jusqu’à trois avant de démarrer. Fort heureusement, j’avais déjà eu l’expérience d’être passager sur une moto donc très rapidement j’ai déconnecté la zone du cerveau généralement associé à l’instinct de survie. Il valait vraiment mieux car mon pilote avait décidé de prendre mon sac à dos et de le mettre sur ses genoux tout en parlant dans son téléphone portable, le tout en roulant.

Nous remontons donc la ruelle sur 200m à un petit 40km/h largement suffisant pour se faire quelques émotions sur la moindre bosse et irrégularité du bitume. Arrivée à l’intersection sur la rue principale, je serre la poignée à m’en faire blanchir les jointures et me repositionne un peu mieux en profitant de l’arrêt.

« Ok, you go down, me dit alors mon chauffeur.

  • What, here ?
  • Yes, bus comes over there, me réponds-t-il en me montrant le trottoir opposé.

Ah ben d’accord. C’était donc la course en xe om la plus courte de l’histoire. C’était bien la peine. Je reprends donc mon sac à dos et remercie mon chauffeur.

Le lendemain, je récidive en décidant de faire une excursion sur des sites associés à la guerre du Vietnam (je vous en parlerai bientôt d’ailleurs). Pareil, l’hôtesse me précise que l’on viendra me chercher mais cette fois-ci, je suis préparé psychologiquement. C’est donc sans surprise que je vois arriver à l’heure dite un nouveau motard qui se dirige vers moi et m’invite à le suivre.

Je prends mon sac à dos, et légèrement plus assuré, le lui tends. Cette fois-ci il extrait un deuxième casque de sous la selle et me le donne. Il ne s’agit bien entendu pas d’un casque intégrale mais bon, c’est toujours mieux que hier. Il enfourche sa bécane et je fais de même derrière lui en tentant de bien me positionner.

« Ok ? »

  • Ye….

Braaawwwwwww. Salaud. Nous remontons une nouvelle fois la ruelle, toujours avec mon sac à dos sur ses genoux mais lui, au moins, ne téléphone pas. Par contre, arrivé à l’intersection, il s’engage à droite dans la rue principale et nous plongeons dans le trafic matinal. Sa conduite et vive mais globalement assez dosée pour éviter les gros freinages et brutales accélérations. J’arrive donc à me tenir mais je dois dire qu’il y a parfois quelques petites décharges d’adrénalines aux intersections quand nous nous faufilons entre le trafic venant de la voie opposée ou quand il zigzag pour essayer de doubler les autres deux roues. Le trajet dure bien cinq minutes et je crois que c’est largement suffisant pour une deuxième session. Il s’arrête sur un quai de la rivière des Parfums, je descends et il m’ordonne avec fermeté d’attendre là. Pendant la demi-heure qui suit, j’assiste à un va et vient matinal de xe-oms déposant des touristes tétanisés ou le sourire aux lèvres à côté de moi.

C’est sur que ça réveille.

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