Ce pays est grand. Ce pays est vaste. Ce pays est gigantesque. C’est un continent. Franchement, le français est une langue ambigu. Si vous relisez cette dernière phrase avec les bonnes liaisons « c’est un continent », vous constaterez qu’il est impossible de la différencier de « cet incontinent ». Ceci dit, il faut que j’arrête de me faire distraire par ma propre rédaction. Hors donc, l’Australie, c’est vachement grand. Non, il faut franchement que vous vous mettiez ça dans la tête car cela va avoir son importance dans quasiment tout les billets qui vont suivre. Multipliez les distances par un chiffre entre 5 et 10 et vous aurez un équivalent européen. Voici d’ailleurs une carte toujours fort instructive et metteuses d’idées en place :
C’est bon ? Vous avez l’échelle en tête ? Menteurs. C’est tout simplement impossible de se représenter les choses. Moi d’ailleurs, je l’oublie constamment. Par exemple, moi qui suit actuellement à Darwin (comme je vous manipule, c’est fou), j’ai plusieurs options pour aller visiter le parc national de Kakadu, soit disant très réputé pour ses paysages somptueux : louer un véhicule, me raccrocher à des gens ayant un véhicule ou bien m’inscrire pour un tour organisé. Ces trois options implique un bon gros paquets de kilomètres à parcourir. On a beau me dire que Darwin est la porte d’entrée pour les parcs nationaux de Kakadu et Litchfield, gna gna gna, elle est loin, la porte. Il faut se taper 100km pour pénétrer dans le plus proche au sud, et 250 pour celui à l’est. Franchement, atterrir à Toulouse pour aller visiter les vignobles du Médoc, ça me ferait mal. Sans parler que ces parcs nationaux sont eux-mêmes relativement vastes. Kakadu, c’est aussi grand que le Limousin (enfin, d’après Wikipedia).
Je crois que le plus extrême est le célèbre « Ayer’s Rock » (Uluru pour les aborigènes), ce gigantesque caillou rouge au milieu de nul part. Toutes les brochures vous explique que c’est à côté de la ville d’Alice Springs, en plein centre du continent. Mensongeries ! Le rocher est à 400 bornes de là! L’agent de voyage qui me fait atterrir à Paris pour aller visiter Lyon, je lui arrache sa certification. Bon certes, il n’y a pas d’autre ville aux alentours, mais quand même, on pourrait nous prévenir.
Résultat des courses, la plupart des touristes en Australie louent un véhicule, de préférence un gros 4×4 bien rustique avec tout ce qu’il faut pour survivre à trois jours d’autonomie totale. Parce qu’il faut également bien comprendre que là bas, dans ce continent rouge, le réseau routier se résume aux plus vitales liaisons inter-villes. Pour être plus précis, je devrais parler du réseau routier asphalté. Dans les Territoires du Nord, notamment, les trois quarts des routes sont en terre battue, légèrement gravillonneuse. Il est donc inutile espérer pouvoir les emprunter plus d’une demi-heure en véhicule de tourisme sans piquer une crise de frustration ou risquer une casse mécanique. Vous constaterez d’ailleurs la clause d’interdiction formel de les emprunter stipulé dans votre contrat de location.
Malheureusement, lorsqu’on jette un œil à la carte des parcs nationaux de Kakadu et Litchfield, on constate amèrement le très faible kilométrage de routes asphaltés. On s’interroge donc rapidement sur l’intérêt de louer une voiture si cela implique de ne pouvoir accéder qu’à la porte d’entrée du parc. Quand à louer un 4×4, le prix explose, le risque augmente, l’excitation et l’amusement aussi, certes, sans parler de la fatigue et de l’essence. Bref, j’en arrive vite à la conclusion qu’il n’y a pas d’autre options raisonnables pour entre-apercevoir ces paysages que de passer par un tour organisé.
Le seul soucis, et il est de taille, c’est que le tarif est darwinien, environ 650€ par personne pour trois jours / deux nuits. A ce rythme là, l’Australie va me ruiner. Bon pour être parfaitement honnête, à ce prix là, le transport, le guide, la nourriture et le logement en tente ou sac de couchage est compris. Il faut également que j’arrive à me convaincre que trois jours et deux nuits avec un groupe d’une quinzaine de personnes ne finira pas nécessairement en bain de sang.
Car ceci est également un point d’interrogation. L’Australie délivre des visas particuliers tout à la fois touristique et travail. D’une durée d’un an maximum, il est limité en âge, 35 ans si je ne dis pas de bêtises. Il y a donc un grand nombre de voyageurs étrangers d’une moyenne d’âge relativement jeune (autour de 23 ans) circulant à travers le pays en mode routard. Mon soucis est que je souhaite à tout prix éviter des tours organisés ambiance « spring break » principalement accès sur la fête et la picole avec une grosse quinzaine de jeunes en mode délire. Il y a un temps pour tout. Et surtout pas pendant trois jours de suite. Mon inquiétude s’est trouvé renforcé à la vu des brochures vantant ces tours, la plupart du temps arborant de superbes photos au grand angle de bandes de djeunes hilares pointant leurs mains vers l’objectif, l’index et l’auriculaire en l’air pour montrer au photographe à quel point tout ceci est vraiment trop cool. Accessoirement on aperçoit un peu de bush en arrière plan. Ça se trouve la photo a été prise sur fond vert et est vendu pour les tours opérateurs à Ibiza, Acapulco et Darwin.
C’est donc en marchant dans les rues du CBD en train de me triturer le cerveau pour trouver un moyen de visiter l’Australie sans me ruiner (il faut dire que je conserve encore de malheureux réflexes indo-vietnamiens qui consistent à manger tout les midis et soirs au restaurant, aussi petits soit-ils), que j’aperçois par hasard un panneau vantant une promotion sur un tour Kakadu-Litchfield. Pour 440€ les deux, voilà qui est potentiellement intéressant. Je rentre donc dans l’agence (car le panneau avait été fort astucieusement placé devant une agence de voyage) et m’enquiers des détails.
Une heure plus tard je ressort avec un billet pour la susmentionnée promotion. La jeune fille de l’agence m’avait certifié qu’il n’y avait pas que des jeunes défoncés et débauchés (pouaahh, l’infâme jeunesse décadente!) dans ces tours et qu’elle même l’avait particulièrement adoooorée. Oui, mais elle a à peine 30 ans, elle. Et en plus elle était particulièrement hyperactive et écoutait sa musique à fond en se trémoussant légèrement (au point ou, bien qu’étant assis en face d’elle à son bureau, je n’entendais pas ce qu’elle disait), en tétant continuellement un bidon de soda (sans doute du whisky-coca, la dépravée). Mais bon, à un moment, il faut faire confiance aux gens. J’ai tellement fait confiance que j’ai également acheté un autre tour pour « Ayer’s Rock » départ d’Alice Springs, également trois jours / deux nuits et une location de voiture pour rallier Melbourne d’Alice Springs. C’est pour vous dire comme je suis bon client.
Je crois bien que c’est à partir de ce moment là que ma carte bleue a commencé à déconner.