Le problème en Australie (et pas qu’en Australie d’ailleurs) c’est qu’il ne savent plus camper de manière rustique. Tout de suite il faut qu’ils y aillent avec leur salle de jeu, leur cuisine et barbecues, le tout sur une pelouse manucurée et rasée du matin. D’ailleurs lorsqu’on demande un emplacement sans électricité, un grand nombre de fois, on me regarde avec des yeux ronds, comme si j’étais un homme des cavernes. De ce point de vue là, je crois bien que Brett Sinclair l’a définitivement emporté sur Dany Wilde. Non pas que je n’aime pas mon petit confort mais c’est juste que parfois j’aimerais bien ne pas payer un emplacement de camping qui correspond vaguement aux trois mètres sur cinq de ma voiture (plus un petit espace pour poser la chaise pliante afin de déguster une bière en toute quiétude) au prix d’une petite chambre d’hôtel deux étoiles. Bon j’exagère, mettons une nuit en dortoir.
Je grogne, je grogne mais je dois bien vous avouer que je suis quand même bien content lorsque les lieux proposent un accès WiFi. Je le suis d’autant plus lorsqu’il se met à dracher des hallebardes dans une température pré-arctique de 14°C (je ne supporte plus la non-chaleur) et qu’un abri chauffé commun proposant cuisine, table et chaise est accessible librement. Là, je suis bien content de payer plus de 30$ la nuit.
Ce soir ci, à Mount Gambier, je suis bien content de le faire, par exemple. Déjà que le couchage bricolé à partir de planches d’aggloméré est moins confortable qu’un bête tapis de mousse, mais en plus mon duvet certifié confort jusqu’à 10°C commence à montrer des signes de faiblesse. Avec tout ça, je passe une nuit limite et me réveille de bonne heure, une fois n’est pas coutume.
Heureusement, alors que je rentre dans la partie commune où je m’apprête à petit déjeuner, je salue les deux vieux messieurs assis à leur table, en train de se préparer un solide en-cas saucisses et œufs brouillés. Après les salutations d’usage et un moment de silence, nous brisons la glace. De manière assez amusante l’un des deux est bavard alors que l’autre est taciturne.
L’autre grande surprise de ce matin est une brume flottant dans les vallées alors qu’un magnifique soleil s’annonce. Pour ne rien vous cacher, le camping est sur le fameux mont Gambier qui se trouve être un volcan, petit mais tout de même. D’ailleurs trois cratères sont visibles à cinq minutes de marche, dont un très joli rempli d’eau appelé Blue Lake. Je me dépêche donc de profiter du spectacle tant que la lumière dorée est là. Que la nature est belle, souvent. Ce matin elle me régale de grands bols de brouillard coincés au fond de cratères percés par les rayons de soleils que viennent dessiner les silhouettes des arbres. Une petite rosée recouvre la végétation mais malgré un petit air vivifiant, le soleil commence déjà à me réchauffer.
Finalement, je reprend la route vers la côte et retrouve rapidement un relief plat. C’est vraiment étonnant ce continent où on a l’impression que les reliefs ont été posés sur un terrain plat préexistant. D’ailleurs après un quart d’heure de route, j’aperçois une sorte de colline à l’aspect conique à gauche suivi rapidement d’une pancarte indicatrice marqué « Mount Schank ». Ni une, ni deux, ni pi, je met le clignotant, ce qui provoque l’activation des essuies glaces, et emprunte la route. Je me gare à un petit parking sous les arbres et décide d’aller faire une petite marche sur le sentier qui monte au sommet.
Arrivé en haut, je constate un fort vent mais surtout découvre que le mont en question est lui aussi un cratère volcanique. Encore plus étonnant et sa situation isolé au milieu d’un paysage de pâturages toujours aussi plat. Au loin on aperçoit les reliefs de Mount Gambier ainsi qu’un autre cône à l’aspect nettement volcanique. A part deux filles que je croise, je me retrouve tout seul à faire le tour du cratère, profitant de la vue. Au loin, on aperçoit même quelques éclats étincelants sur l’océan.
Malgré l’intérêt certain du lieu d’un point de vue géologique et paysager, je suis particulièrement fasciné par l’activité agricole que j’aperçois en bas. Des troupeaux de moutons broutent tranquillement une herbe qui même à cette distance me paraît bien grasse. Tout à coup j’aperçois un petit véhicule à quatre roues s’approchant vers eux. Scrutant plus attentivement, je reconnaît un quad. Il s’approche des moutons et commence à les repousser vers l’autre bout du champs en effectuant des grands mouvements autour. Une petite forme noire suit plus ou moins la trajectoire du quad, sans doute un chien de berger. Cette petite scène vue du ciel est tout à fait fascinante. Une pensée me vient quand même à l’esprit : ils sont quand même bien bourrins ces australiens de faire ça au quad. Certes, c’est en net progrès par rapport aux immenses cattle ranch de l’outback qui se servent d’hélicoptères pour regrouper les vaches.
Finalement, m’arrachant au spectacle, je redescends à la voiture puis reprend le chemin de la côte. Aujourd’hui, c’est la Great Ocean Road !