Encore la guerre

Et si on parlait encore un peu de guerre, tueries et autres massacres de masse ? Ouaih, je me doutais bien que vous aimiez ça, petits pervers.

Au nord de la ville de Dong Ha, elle même au nord de la ville de Hué, elle même au nord de la ville de Da Nang (elle même au nord de la ville de Hoi An, mais je sens que vous commencez à vous lasser), se situe la DMZ. Mais que veut dire cet acronyme. Non, non, interdit de regarder sur Wikipédia, vous êtes à moi. Voilà. Regardez moi dans les yeux. Bien. DMZ veut dire « demilitarized zone », autrement dit en français, zone démilitarisée, ce qui est une façon plus jolie de dire « ligne de démarcation ». En vérité c’est plus qu’une ligne car c’est une bande de terre courant de la mer à la frontière du Laos séparant le Vietnam du nord du Vietnam du sud. D’où la zone. Vous l’avez compris, de nos jours cette DMZ n’existe plus mais c’est néanmoins un lieu majeur de la guerre américaine car un nombre important de batailles y eu lieu pendant cette fameuse « Offensive du Têt » (A ne pas confondre avec un coup de boule : wah vaz’y, comment qu’j’vais t’mettre une offensive d’la tête, la vie d’ma mère !).

Côté mer, on trouve un grand nombre de réseaux de tunnels creusés à main d’homme (et de femmes, bien entendu, les nord vietnamiens étant particulièrement peu sexistes dans ce domaine) qui permettait de s’abriter des bombardements quotidiens. Cela ne protégeait pas d’un coup au but mais augmentait drôlement le taux de survie. Ce qui est assez amusant, maintenant que les bombardements ont cessés (en tout cas, quand j’y étais. C’était sans doute un dimanche), c’est de constater l’étroitesse et la hauteur sous plafond de ces tunnels, clairement construits à l’échelle du vietnamien moyen de l’époque. Au passage, cela permet de goûter à la touffeur qui y règne et à l’angoissant manque de lumière. Pendant un bombardement, ça ne devait pas rigoler.

Si on sort dehors et qu’on s’élève un peu dans les airs, ont peu constater dans le paysage aux alentours, plutôt plat à cet endroit, un nombre très importants de cratères dans les rizières. C’est bien simple, cela ressemble à la surface lunaire. Fort heureusement, la végétation recouvre partiellement tout cela, et au sol, c’est plutôt imperceptible. Il n’y a que les buffles d’eau qui s’en réjouissent en profitant des multiples mares circulaires. Ça, pour se vautrer dans de la flotte boueuse, ils savent y faire. En plus, s’il y a un cratère, c’est que la bombe a explosée. Il n’y a donc aucun risque pour l’animal.

Contrairement à la Corée où un savant technocrate choisit de couper le pays en deux selon une jolie ligne droite le long d’une latitude, au Vietnam on se dit que c’était quand même drôlement plus pratique de prendre un élément naturel que l’on ne risque pas de ne pas voir comme séparation. C’est vrai, le 40° parallèle nord, j’ai beau me fatiguer les yeux, je n’en voit pas la trace au sol. On choisit donc de prendre la rivière Ben Hai comme ligne de démarcation, ce qui n’était pas bête vu qu’elle coure à peu près d’ouest en est.

Un seul pont permettait de traverser la rivière proche de son embouchure mais comme il était en plein dans la DMZ, il était très peu utilisé. La DMZ était également une « no man’s land » ce qui implique que toute personne y pénétrant était potentiellement considérée comme un assaillant. Autant vous dire que le tourisme y était peu fréquent. Néanmoins, et c’est toujours aussi fascinant de voir à quel point l’humanité peut être absurde parfois, le nord Vietnam décida de placer des haut parleurs de leur côté du pont pour diffuser des messages défaitistes : « Rendez-vous, sales impérialistes, en plus votre pho (fa) est dégueulasse de votre côté ! ». Quand il s’agit de jouer au con, il y a toujours des volontaires donc le sud Vietnam installa sa batterie de hauts parleurs avec un supplément de wattage pour diffuser des contre-messages également défaitistes : «Non, vous, rendez-vous, sales rouges mangeurs de chiens ! ». Cela dura quelque temps où chacun installa un nouveau surplus de puissance: « C’est à babord, qu’on gueuleuh, qu’on gueullleeeeuh ! C’est à babord, qu’on gueule les plus forts ». « C’EST A TRIBORD QU’ON GUEULE, QU’ON GUEUU-LEUH !! C’EST A TRIBORD, QU’ON GUEULE LES PLUS FORTS !! ». Et cetera. Fascinante humanité. Les vendeurs de matériel audio devaient se frotter les mains. Accessoirement, je vous invite à relire la BD « Le Grand Fossé », aventure d’Astérix pour se rendre compte, encore une fois, comment la réalité peut dépasser la fiction.

Mais malheureusement, le plus triste dans tout cela, c’est que ce n’est pas drôle. Car hormis ces moments de sympathique absurdité, la guerre Américaine, comme toutes ses cousines, recela un bon gros paquet de saloperies. Je vous rappel cette célèbre phrase tirée d’Apocalypse Now : « I love the smell of Napalm in the morning ». Oui, car pour rendre la vie plus difficile aux Viet Congs, les américains firent tout ce qui était en leur pouvoir pour déforester un maximum de territoire, notamment autour des lignes d’approvisionnement. Vous connaissez tous la célèbre photo de Nick Ut d’une petite fille brûlée au napalm courant nue vers le photographe qui fit basculer, entre autres, l’opinion public américain (et lui octroya le prix Pulitzer en 1972). Je n’en dirais donc pas plus sur le sujet.

Ce fut également l’occasion de tester à grande échelle de nouveaux types de défoliants à base de dioxine. On sait maintenant que la dioxine est une des substances les plus cancérigène au monde et ayant une durée de vie particulièrement longue. Il y a donc dans la campagne vietnamienne de longue bande de végétation à l’aspect neuf voir de longues bandes de prairies dans les montagnes, traces de ces défoliants. La star d’entre toutes les stars de ces produits porte un doux nom semblant directement issu d’un épisode de « X-Files » : l’agent orange. Si vous avez le cœur à ça et surtout bien accroché, je vous invite à chercher des photos d’enfants mal-formés de parents ayant été exposés à l’agent orange. C’est particulièrement indicible et l’exposition sur le sujet au musée de la guerre à Ho Chi Minh City laisse un sale goût en bouche et une sensation désagréable à l’estomac. Pensez « Elephant Man », membres en plus ou en moins, problèmes mentaux et déformations du squelette. Bien entendu, ça, c’est dans le pire des cas, quand l’enfant est viable. On imagine sans peine l’incroyable charge financière que cela représente pour un pays, sachant que cela peu courir sur plusieurs générations.

Sans vouloir faire dans l’accusation simpliste, car la chaîne de responsabilité est bien évidemment un peu plus complexe que cela, ce magnifique produit (trèèès efficace pour ce qui est de défolier, il est vrai) a été conçu et produit par l’extrêmement sympathique et humaniste compagnie Monsanto. Oui, celle des brevets sur les OGM, entre autres. D’ailleurs une « class action » intentée contre elle a été remportée par une association d’anciens combattants américains exposés à l’agent orange. Malheureusement, le gouvernement vietnamien a été débouté lorsqu’il a tenté de se raccrocher à cette action en justice. Encore une fois gardons nous d’une stigmatisation trop abrupte mais je ne résiste pas à l’envie de conclure par cette nouvelle très fraîche à propos de cette honorable entreprise. Elle aurait très récemment fait acquisition de la société « Blackwater » qui se trouve être une entreprise privée para-militaire notamment utilisée en Irak par l’armée américaine.

Bonne nuit les petits.

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