Venus à la Fourrure

Après la nourriture du corps, laissez moi évoquer la nourriture de l’âme. Je m’étais laissé dire (je ne sais plus par qui ou par quoi) que Montréal était extrêmement dynamique culturellement. Ce n’est pas forcément en quelques jours hors de toute période festivalière que l’on peut véritablement confirmer ou infirmer ceci. Néanmoins, voici deux anecdotes qui me permettent, d’une moue plutôt conciliante, de ne pas contredire cela.

Commençons par l’incident le plus mineur. Lors de mon séjour montréalais, j’ai pu découvrir en deux occasions des pianos laissés gratuitement à la disposition des passants en des lieux de passage (qui sont généralement considérés comme les lieux de prédilection pour les passants). Permettez moi de balayer de suite toutes les petites remarques mesquino-cyniques de certains d’entre vous concernant l’impossibilité de voler un piano. Certes, néanmoins ils étaient attachés. On a beau être en général plus souriant qu’un français, un québecois n’est après tout qu’un homme et lui aussi peut être tenter de s’embarquer un piano, gratuitement pour chez lui. Devant cette démonstration de tant de confiance en son prochain, je n’ai pu m’empêcher de demander à la première passante croisée la raison de ces pianos publics. Il se trouve, que cette passante était une policière et au lieu de me regarder de haut en me répondant de manière glacée (comme on peut être habitué lorsque l’on vient d’hexagone), elle m’a gentiment répondu en souriant qu’il s’agissait d’une chouette initiative de la mairie. Un peuple qui donne gratuitement des pianos à disposition et dont les policières sont urbaines ne peut pas être foncièrement mauvais. Depuis, j’ai constaté en gare de Toulouse Matabiau une initiative similaire proposée par la SNCF. Bizarrement, ça n’a pas la même saveur.

Mais surtout, en ce qui concerne l’atmosphère culturelle de Montréal, voici un rapide résumé de ma dernière soirée en ville, après mon retour de La Malbaie. Comme un fou, je décide d’aller la passer dans le quartier des spectacles, là où, comme son nom le laisse supposé à l’esprit vif et logique qui caractérise mon lectorat, se concentrent la majorité des théâtres et salles de spectacles de la ville. Peu avant 20h, le long de la rue Sainte-Catherine à l’ouest de Berry-UQAM, se presse une quantité de gens recouvrant tout le spectre d’élégance, sortant des restaurants ou minables fast-foods servant d’atroces poutines hypo-lipidiques, pour aller se divertir d’une des nombreuses pièces, films, concerts, comédies-musicales ou boites de nuit des environs. En ce qui me concerne, j’hésite à tenter un bar lounge.

En remontant la rue encore plus à l’ouest, on arrive au cœur de ce quartier bordé au nord par la rue Sherbrooke et au sud par le boulevard René-Lévesque. La Place des Arts centralise en un lieu extérieur et couvert plusieurs salles de spectacles. Ici la foule est encore plus concentrée. Une envie subite me prend d’aller voir une pièce de théâtre et sans trop y croire, je commence à faire la queue à la billetterie dans le brouhaha du hall. Je feuillette rapidement le programme du soir et mon tour arrivé, demande d’un air goguenard s’il reste encore des places pour des spectacles. En sous-titre je tente de faire passer le message corporel que je ne suis pas né de la dernière pluie et que je sais qu’il est totalement illusoire (voir emprunt d’une grande et touchante naïveté) d’espérer (ne serait-ce que) avoir une place une demi-heure avant le début de la représentation alors qu’à Paris, ville lumière et phare culturel pour l’élite de l’humanité, il faut être provincial mongoloïde pour oser le penser.

« Oui, il nous en reste, me répond la guichetière avec un sourire.

  • Ah ?

<silence>

  • Ben euh, et pour la « Venus à la Fourrure », c’est combien ?
  • 35$.
  • Euh ben, d’accord, j’en prend une.

Si c’est pas un signe évident de dynamisme culturel, ça ? Parce qu’attention, là. Je ne vous parle pas d’un obscur spectacle de chant atonal d’une peuplade oublié de Sibérie oriental, mais d’une très ambitieuse et divertissante adaptation en français d’une pièce de l’auteur new-yorkais David Ives, elle même inspirée de l’oeuvre sulfureuse de Leopold Sacher-Masoch, qui fut à l’origine du terme « masochiste », que Roman Polanski, pour vous dire si ce n’est pas de l’étron faisandé, a lui même adapté au cinéma pas plus tard qu’il y a quelques mois !

Je me retrouve donc assis au cinquième rang de l’allée centrale, dans une salle quasiment comble, a suivre pendant deux heures un huis-clos entre deux excellents acteurs au doux accent québecois. C’est autre chose que le monologue ampoulé et emmerdant de ma dernière tentative théâtrale à Lyon, spectacle que j’avais du réserver trois mois à l’avance. Je ne vous raconte pas le sujet de la pièce, de peur de vous « spoiler » le film de Polanski mais sachez que c’était frais, amusant et pétillant, alternant entre des passages contemporains et des ambiances 19ème siècle où les acteurs basculaient sur l’accent français hexagonale pour se donner un genre aristocratique. Je ne sais pas s’il faut se vexer.

Donc, je ne sais pas si vous êtes d’accord avec moi mais une ville où l’on peut se payer une place de théâtre de bonne qualité, à un prix raisonnable, à la dernière minute ne peut pas être totalement provinciale. C’est même le contraire.

La Poutine

Bon assez esquivé, parlons bouffe. Il est grand temps que je vous raconte mes aventures culinaires dans la Nouvelle-France. Commençons par le petit-déjeuner.

Mon premier matin à Montréal, je me suis fait une joie d’expérimenter un copieux petit-déjeuner de pancakes dans un des nombreux petits cafés-restaurants de la rue Mont-Royal. Là, il n’y a pas à tergiverser, c’était impeccable. Généreux, varié, le tout accompagné d’un pichet de sirop d’érable à volonté que l’on peut utiliser pour gonfler les pancakes de sirop sucré jusqu’à ce qu’on ne puisse plus ouvrir la bouche sans produire d’épais filaments de salive caramélisée. Le plaisir ici est dans l’excès surtout que j’avais choisi l’assiette accompagné de petits beignets de pomme de terres. Par -20°C c’est indispensable. Ça commençait bien.

Mon premier midi, j’ai voulu goûter à ma première poutine, plat national québecois. Je me suis donc posé dans un petit restaurant fast-foodesque du centre ville de Montréal, légèrement après le rush de midi, pour être bien tranquille. J’ai pu donc commander en toute tranquillité une poutine « de base » auprès de la dame d’âge mur derrière le comptoir. Soyons clair, la poutine ne sera jamais au panthéon des mets fins et délicats. En cela elle est rejointe par la raclette, la tartiflette ou les patates au lard (et à vrai dire tous les plats basés exclusivement sur du cochon mort et des féculents). Laissez moi vous en expliciter la recette :

  • Faites des frites.
  • Coupez du fromage en petits dés (de la taille d’apéricubes).
  • Couvrez les frites des petits dés de fromage sus-coupés.
  • Nappez l’ensemble d’une épaisse sauce à la viande.
  • Baffrez.

Je vous avez prévenu, il n’y aucun raffinement là dedans. C’est donc non sans une certaine déception que j’attaqua ma première poutine car s’il y a bien une chose facile à rater c’est bien ce plat. Utilisez des frites industrielles congelées, des dés d’ersatz de mozzarella et une sauce à la viande bon marché à base de viandox, le tout servi tiède et vous passerez un quart d’heure douloureux à tenter de combattre vos réflexes vomitifs. Moi, comme je suis poli, je fini mes plats. Ça m’en coûte, mais là, je représentait la France est la commerçante était fort sympathique. C’est bien simple, ça n’a aucun goût hormis un vague goût salé porté par la sauce à la viande bien grasse. Encore une fois, ce plat doit se déguster sans doute exclusivement sous -20°C. Echaudé par cette expérience, je me suis fait un soir suivant un pho (fa) dans un restaurant asiatique du petit chinatown montréalais, histoire de retrouver le plaisir du goût.

Comme je ne suis pas de ceux qui se forgent un avis sur une unique expérience (il m’en faut au moins trois), j’ai retenté le coup à trois nouvelles occasions. C’est presque de l’entêtement. Expérience numéro 2, un midi aux chutes de Montmorency dans une sorte de dinner sans âme. Nouvel échec. Expérience numéro 3, le midi de mon arrivée à La Malbaie dans le bar-billard-restaurant familial du centre ville, au Veilleux, institution du coin. Mention spéciale pour le lieux, situé en sous-sol dans une quasi-ambiance de bar miteux du middle-west américain. Des employés désabusés y servent des burgers et poutines à une clientèle peu gastronome. La qualité de la poutine est ici jugé au monticule de frites noyés sous une cascade de « gravy » quasiment aussi sirupeuse que du sirop d’érable, le sucre en moins. Pour m’éviter une catastrophe digestive j’y commande une petite mini-poutine comme accompagnement d’un cheeseburger. Troisième échec heureusement limité par la taille restreinte du plat. Comme je suis un peu con, je redonne une dernière chance au Québec en commandant, mon dernier soir avant de partir pour New-York, une ultime poutine dans les quartier des théâtres de Montréal. Certes, à chaque fois, je commande le plat dans des petits troquets bas de gammes. Peut-être que les vrais poutines se dégustent chez l’équivalent québecois de Fauchon. En tout cas, la dernière poutine a failli me faire vomir, frites tièdes sous fromage caoutchouteux froid et sauce tiède. L’infarctus me guette. Détrompez-vous si vous pensez que le plat est une vaste joke pour touriste parisien. A vrai dire, c’est plutôt l’inverse. J’avais même l’impression d’être le seul touriste à en commander contrairement aux autres consommateurs de la chose, québecois. Je serai donc clair, en ce qui me concerne, la poutine, c’est dégueulasse. D’ailleurs, un ami de Maxime, lors d’une soirée à déjeuner en comptoir d’une tartine bien grasse m’a fait découvrir le terme qui correspond parfaitement à cette cuisine : sale. Après une poutine, on se sent répugnant, collant de l’intérieur, les artères souillées de gras. Et en plus, ça n’a aucun goût.

Bon, fort heureusement, tout n’était pas aussi peu à mon goût. Je peux par exemple citer de mémoire le « Cochon Dingue » à Québec Ville, un des forts appréciables restaurants de la basse-ville, sans parler que son nom est en lui même une vaste blague. Ce n’est pas non plus un restaurant hyper bon marché mais comme partout en Amérique du nord, j’ai l’impression, les restaurants sont plus chers qu’en France. Tout ça mis bout à bout, je suis bien navré de devoir décerner à mon expérience québecoise la palme du pire séjour gastronomique. Pour des francophones, ça me coûte, mais qui aime bien, châtie bien.

Fort heureusement, si côté bouffe nos cousins ne m’ont pas laissé estomaqué de stupeur admirative, il en est autrement côté boisson. Je vais être d’ailleurs encore plus spécifique : côté bière, ils sont fortiches. C’est très simple, on dirait des belges. Il y a un très grand nombre de micro-brasseries dans la belle province, chacune produisant deux ou trois bières de personnalité différente, ambrée, blonde ou brune. Du coup, on leur pardonne cet immonde plat national.

Au p’tit hôtel sympathique

Finalement dans le voyage, le plus intéressant, en ce qui me concerne, ne consiste pas forcément a faire de grandes visites majestueuses. Parfois, il s’agit simplement de se poser à un endroit et de progressivement se laisser gagner par une routine (à ne pas confondre avec la poutine, que je détaillerai longuement dans un futur billet et qui n’a absolument aucun lien avec un dirigeant politique) ou une atmosphère. Dans ce cas, le cadre revêt un aspect primordial dans ce ressenti. Vous l’aurez deviner, voici le moment de parler de la maison d’hôte où je suis hébergé à La Malbaie.

« La Maison des Rives », car telle est son nom (ce qui vous permet de le taper sur votre internet), c’est une jolie maison en bois blanc dans le secteur Pointe-à-Pic de La Malbaie. Arrivé à pied avec mon sac à dos une fin d’après-midi, je fut accueilli par un jeune adolescent rouquin qui, non sans compétence, me mena jusqu’à ma chambre, « La Vendéenne », à l’étage, donnant sur le balcon supérieur de la maison. Je passerai rapidement sur la décoration intérieure, peu à mon goût puisque directement issu d’un catalogue Laura Ashley ou la quantité de froufroutement, petits nœuds inutiles et coussins décoratifs semblent être le critère majeur de bon goût. Accessoirement, cela semble également être devenu une norme esthétique occidentale pour la majorité des maisons d’hôtes ou de gites. Non, moi, mon truc c’est plus le design épuré du grand nord scandinave ou du Japon zen. La perfection est atteinte quand on ne peut plus rien enlever donc je vous assure qu’il y avait matière à grandement perfectionner de mon point de vue dans « La Vendéenne ». Ceci dit, la chambre est confortable, le lit idem et il y a un accès facile sur le balcon où l’on peut s’asseoir à une petite table pour faire semblant de travailler sur son ordinateur portable (ce qui ne manquera pas d’attirer quelques regards admiratifs du propriétaire).

La maison se situe entre la route (peu passagère, rassurez-vous) qui longe le Saint-Laurent et mène vers la Pointe-à-Pic où se trouve le casino et une rue qui concentre la grande majorité (environ une dizaine) des maisons d’hôtes et restaurants (environ une poignée). J’ai bien tenté d’échantillonner ces établissements le soir, mais sans vraiment qu’un ne ressorte du lot. Ah si, maintenant que j’y réfléchit, il y en a bien eu un qui a bénéficié par deux fois de mon auguste présence pour la très rationnelle raison qu’il servait de la « Vache Folle », une excellente bière d’une micro-brasserie de Charlevoix. A part ça, c’est essentiellement des plats de viandes d’une qualité honorable. Mais je réserve pour plus tard la dissertation sur la nourriture. Pour un autre soir, j’ai orienté mes critères de sélection de restaurant selon sa capacité à retransmettre le derby entre les Canadiens de Montréal et les feuilles d’érables de Toronto (Maple Leaf en version originale). C’est du hockey sur glace, bien entendu, et la foule (enfin, ceux qui suivaient) était majoritairement pour les Canadziens de Monréeul. Moi, je comprend toujours rien à ce sport. Ça va beaucoup trop vite lorsqu’on suit attentivement, alors imaginez lorsqu’il faut manger en plus.

Mais revenons à la « Maison des Rives ». Son grand attrait réside en son copieux petit-déjeuner servi dans la salle à manger. Au programme, salade de fruits, cake, pain, œufs durs, café, thé, jus de fruit, le tout à volonté. Comme tout ceci est à l’échelle familiale, c’est surtout le moment privilégié pour papoter avec les propriétaires et les quelques hôtes de passage qui remontent le Saint-Laurent. Sans surprise j’y croise quelques couples de retraités français et des québécois. Je vous ai déjà dit que les propriétaires sont sympathiques et bien figurez-vous qu’ils sont également français. Pour l’immersion c’est raté. Je ne dois pas être doué pour reconnaître les accents.

Chaque matin est l’occasion d’en apprendre un peu plus sur cette famille de rouquins (dans la famille rouquin je veux le père, la mère, le grand frère, le petit frère et la minuscule fille) qui s’avèrent être originaires de Vendée côté La Roche-sur-Yon. Le mari, un grand gars costaud entre 40 et 50 ans, après des années comme transporteur routier à travers l’Europe pour diverses ONG telles que la Croix-Rouge, décide de tenter l’aventure au Québec avec sa femme. Huit années plus tard, ils y sont toujours et depuis deux ans ont décidé de se lancer dans l’hôtellerie. Fatalement, c’est l’occasion de discuter avec eux (et elles lors de mes deux transports gratuits) de leur installation et de leurs rapports avec les québecois. Si ça vous intéresse, j’ai inondé la propriétaire de questions concernant la gestion d’une maison d’hôte. J’ai également posé LA question que tout méridional (même si Montréal est à la même hauteur que Paris) se pose: peut-on survivre au rude hiver canadien sans perdre de phalanges? Leur réponse, que je concise (nouveau verbe du premier groupe que je viens d’inventer) est: « oui, avec un bon 4×4 et un skidoo ». Tout est une question de bête logistique dans la vie, c’est déprimant.

Côté immersion dans la vie locale, je conclurai par cette petite aventure chez le coiffeur. Oui, ça fait des années que je ne vais plus chez le coiffeur en France mais depuis que je voyage, parce que je n’ai pas de tondeuse, certes, mais également car je trouve ça intéressant de se faire couper les tifs à la mode locale, je n’arrête pas (enfin, trois fois en quatre mois, moi, je trouve ça super fréquent). Coupons court à tout suspense, je suis ressorti les cheveux proprement coupés. L’aventure, je vous l’ai un peu sur-vendu puisqu’il s’agissait essentiellement d’écouter à la dérobé la conversation entre mon coiffeur et un retraité, tout les deux québecois (et par la même occasion, me soulageant du pénible poids de tenir une conversation avec mon coiffeur). J’ai été outré, trahi, choqué en apprenant que ce vieux retraité vivait la moitié de l’année en Floride pour échapper à l’hiver canadien. Manifestement, ce n’était pas le seul. Ouaih, ouaih, ouaih. Après, qu’on ne vienne pas chercher à me convaincre que les hivers ne sont pas rudes au Québec.

Tadoussac

Les propriétaires de leurs maison d’hôte où je suis hébergé à La Malbaie sont sympathiques. Mais, ça, il me semble bien vous l’avoir déjà dit. En plus du parc national des Hautes-Gorges de la Malbaie (majuscules placées de manière non contractuelle), à mon arrivé, on me demanda si je souhaitais aller voir les baleines. Des baleines ? Quelles baleines ? Après une courte réflexion (un peu comme les éléphants, les baleines, c’est pas tout les jours que l’on croise ça en France), je répond que, oui, je veux voir les baleines mais que voyez-vous, je ne suis toujours pas motorisé.

Quel rapport y a t’il entre des baleines et une voiture me demanderiez-vous ? Le centre touristique de tout ce qui touche aux baleines se trouve plus haut, en aval du Saint-Laurent, au village de Tadoussac. Le village se situe à l’embouchure du fjord de la Saguenay où les eaux douces de la Saguenay et du Saint-Laurent rencontrent les eaux salées de l’Atlantique, formant un environnement attrayant pour toutes sortes de cétacés qui viennent ici pour se reproduire.

Toujours aussi sympathique, on me propose de réserver une place sur un bateau et me promet de m’emmener à voiture le jour dit. Pour voir ces fameuses baleines (à bosse, blanche ou bleue, tout est encore mystérieux), j’ai le choix entre emprunter un zodiac ou un petit yacht. Parce qu’on est ici pour s’en prendre plein la chôle (pour toi, public jurassien), j’opte pour le zodiac. Avec un peu de chance, on pourra jouer aux Moby Dicks avec des harpons émoussés.

Deux jours plus tard, après un copieux petit-déjeuner (mais je détaillerai tout cela dans un billet qui immine drôlement, à force), je monte dans le 4×4 familial conduit par la propriétaire et nous empruntons la route côtière ver l’aval du fleuve. A vrai dire la route est mi-côtière, mi-forestière DSC_8902_DxOmais en cette fraîche matinée, toujours aussi ensoleillée, la journée commence bien. Une heure de route plus tard (pour vous dire à quelle point elle est bien sympathique cette propriétaire), à la faveur d’un virage à gauche en descente, nous atteignons les rives sud de l’embouchure du fjord de la Saguenay.

La route, en cul de sac, mène au quai du traversier (en français de France, un traversier est un ferry-barge, note du traducteur). La propriétaire me quitte alors, avec comme convenu une récupération vers les 18h au même endroit. Je me retrouve alors avec trois autres piétons à DSC_8912_DxOembarquer après qu’une poignée de voitures et de gros trucks nord-américains aient vidé le pont. Ceux-ci sont rapidement remplacés par un nombre approximativement équivalent de leurs congénères. Manifestement, il n’y a aucun pont sur la Saguenay sur de nombreux kilomètres. Dans des claquements métalliques et des vrombissements de gros diesels, nous entamons la traversée, alors que je me poste sur le toit. Tenez, mettez vous dans l’ambiance, ça ne fait jamais de mal.

DSC_8906_DxOLe fjord de la Saguenay n’est pas aussi impressionnant que ses cousins norvégiens. Ne le dites pas à un québecois, ça risquerait de le vexer. Il m’est avis qu’il a obtenu sa dénomination de fjord par la présence d’eaux salées de l’Atlantique et non pas pour de vertigineuses montagnes encadrant son cour. Ceci étant dit, le spectacle est néanmoins très joli (largement au dessus des rives de la Loire par exemple, histoire d’être provocant), surtout dans DSC_8911_DxOcette matinale lumière automnale et le relief des rives légèrement plus prononcé qu’à La Malbaie. Nous nous dirigeons sur la rive d’en face où on aperçoit quelques bâtiments et petites maisons constituant les avant-postes de Tadoussac. Je trouve d’ailleurs ces rives vraiment charmantes avec de grandes dalles de granit roux polies plongeant dans l’eau alors que la forêt timidement multicolore couvre tout les reliefs.

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Après une petite traversée de cinq minutes le traversier accoste sur le quai dans les remous de l’inversion des hélices. Piétons, je suis libéré de suite et remonte la route pour atteindre le cœur du village. La route quand à elle continue encore plus au nord-est et les semi-remorques, pâles cousins des road-trains australiens, poursuivent leur chemin. 

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DSC_8915_DxOJe vais être bref, pour une fois. Tadoussac, c’est chouette. C’est vraiment très chouette. Je vous rappel qu’il fait toujours ce temps paradisiaque et celui-ci n’est certainement pas étranger à ce sentiment. Hormis cela, ne soyons pas fine bouche, ces petites maisons en bois colorés ont un cachet indéniable. On sent néanmoins une présence touristique accrue dans un périmètre beaucoup plus restreint qu’à La Malbaie, le premier étant vraiment DSC_8914_DxOminuscule. Je dis ça mais n’allez pas imaginer une situation hystérique à la Saint-Raphaël au mois d’août. C’est calme, avec une grosse proportion de retraités. Un grand hôtel du début du 20ème siècle et une petite église en bois blanc font face à l’anse qui abrite le petit port sur le Saint-Laurent. La plage invite à la sieste. Je résiste.

DSC_8917_DxO DSC_8916_DxO DSC_8918_DxO DSC_8923_DxO DSC_8926_DxO DSC_8927_DxO DSC_8936_DxO DSC_8933_DxO DSC_8930_DxO DSC_8929_DxO

Mon embarcation au sein du zodiac n’étant pas avant 13h30, j’ai largement le temps de déambuler et de visiter rapidement le petit musée dédié aux cétacés tenu bénévolement par les chercheurs du centre de recherche local. C’est l’occasion d’en apprendre un peu plus sur les espèces fréquentant les environs, notamment les belugas, ces petites baleines blanches au visage souriant. En sortant, j’aperçois un zodiac rempli de touristes harnachés dans de gros cirés et pantalons oranges accoster. Voilà ce qui m’attend.

A l’heure prévu, je rejoint les bureaux de la compagnie en charge de ma « croisière » et après avoir signé une décharge (super, l’angoisse) je m’habille de ces pantalons et cirés imperméables DSC_8955_DxOet chauds pour rejoindre une poignée d’autres touristes sur notre zodiac attitré. Chacun est assis serré les uns en face des autres, de part et d’autre de l’embarcation. Seule notre capitaine, est debout dans sa cabine de pilotage, à l’abri du vent derrière un parse brise. Et oui, notre capitaine est une capitaine, de son prénom Janice, rigolote et sportive jeune québécoise qui exceptionnellement reprend du service aujourd’hui. Elle son truc, d’habitude, c’est plutôt les chiens de traineaux sous deux mètres de neige. Il y a des femmes précieuses, fragiles ou capricieuses et il y en a d’autres comme Janice, sures d’elles, drôles et charmantes. A notre retour, elle c’est même amusée à balancer une vanne aux quatre sauveteurs en mer en train d’effectuer un exercice de chavirage dans le port. En même temps, nous vous ai-je pas dit que les femmes québécoises été libérées ?

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En ce qui concerne cette sortie en mer proprement dite, je pourrait vous la narrer en quasi temps-réel, mais ça n’aura que peu d’intérêt. En résumé, sachez que ce fut un mélange de vent, d’embrun, de mouvement oscillant du puissant zodiac sur un fleuve d’huile, d’arrêts ou ralentis à la DSC_8971_DxOrecherche d’un fanal qui dépasse, de touristes indisciplinés qui se lèvent à la moindre queue d’un cétacé pour un espoir de photo raté (et bouchant par la même occasion la vue à leurs congénères de l’autre bord), le tout agrémenté de l’humour moqueur de Janice. A vrai dire, j’étais surtout à admirer le paysage et notre capitaine. Les baleines, c’était juste un prétexte. D’ailleurs, permettez moi d’écarter de suite ce sujet.

DSC_8968_DxOOui, j’ai vu des bouts de baleines, surtout des dos et quelques queues. C’était d’ailleurs des baleines bleues, mastodontes des mers, notamment la baleine Blanche Neige nommée ainsi par la tâche d’une couleur qui devrait être évidente au bout de sa queue. La plupart des baleines revenant régulièrement en ces lieux, les chercheurs ont eu le loisir de les identifier et de les nommer. Après, il faut quand même dire que ces baleines passent la grande majorité de leur temps sous le niveau de l’eau ce qui pose d’énorme soucis pour les observer lorsqu’on est de l’autre côté, au dessus. Pour rendre la chose encore DSC_8958_DxOplus difficile, interdiction est faite, en toute logique, aux bateaux touristiques de s’approcher à moins de 50m des animaux. Reste quand même l’excitation du repérage, légèrement facilité par la présence de deux autres bateaux de compagnies concurrentes faisant des ronds dans l’eau sur le fleuve. Il m’est avis que les vrais, les purs, vont à la quête de la baleine en kayak des mers.

DSC_8957_DxOHors donc, moi, mon plaisir c’est de me brûler les yeux sur le vaste dôme de ciel pur parsemé de quelques grands nuages blancs qui surplombe les eaux incroyablement calmes et lisses du Saint-Laurent, immense comme une mer. Janice elle même m’avoue que ce temps est vraiment incroyable. Parce qu’elle est particulièrement taquine, alors que je cherche à la piéger en lui demandant le nom du village dont on voit très au loin dans la brume sur la rive sud le clocher qui dépasse, elle me reprend : « J’sais pas, c’est un sous-marin allemand ». Mais là où elle me fait vraiment sourire, c’est quand elle se met à parler anglais. On critique les français qui n’ont aucun talent de prononciation, mais je dois avouer qu’une québécoise manifestement peu motivéDSC_8954_DxOe, c’est encore plus terrible. Non seulement elle ne fait aucun effort mais en plus ses connaissances de la langue sont de manière surprenante, très approximatives. Résultat, j’ai la joie incroyable de pouvoir assister à quelques savoureux passages dignes d’un sketch des « Têtes à Claque », façon vol « ouane seurti tou ».

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Avec tout ça, une bonne journée sous le soleil, en mer et en bonne compagnie, ça fait une journée bien remplie. Accessoirement, ça donne envie d’aller s’installer à Tadoussac en compagnie de québécoises à l’humour fin et caustique.

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Quoi, « et les baleines » ?

Hautes Gorges de la Malbaie

La propriétaire de ma maison d’hôte est sympathique (A ce propos, notez comme le français est étrange. Bien que n’étant pas moi-même propriétaire de cette maison d’hôte, j’emploi le possessif. Ne devrait-on pas dire la propriétaire de sa maison d’hôte?). Je vous en parlerai encore plus longuement plus tard mais à mon arrivée, j’étais vierge de tout à priori sur les environs. Mon seul souhait était de voir quelques arbres au feuillage rouge et or dans une température clémente d’été indien. Fort heureusement, soucieuse de faire plaisir, elle s’est empressée (la propriétaire et non pas la température clémente) de me lister tout un tas de choses à voir et à faire dans les alentours. Alors que je lui objectai que j’étais non motorisé, elle s’est empressé de me proposer de m’amener en voiture à tout ces points d’intérêts. Voilà qui est sympathique, vous dis-je.

Un matin, me voilà donc à bord du vieux 4×4 familiale conduit par la sus-mentionnée propriétaire de sa maison d’hôte en direction du Parc National des Hautes-Gorges de la Malbaie. J’apprend par la même occasion que La Malbaie est donc également le nom de la petite rivière qui se jette au niveau du village du même nom, rivière qu’il faut que je cesse de traiter de « petite » car elle a quand même réussi à creuser des gorges, elle.

Après des remerciements, la propriétaire me dépose à l’entrée du parc avec promesse de revenir vers 18h me récupérer. A l’accueil, je choisi une randonnée tranquille le long de la rivière. La randonnée star sur les hauteurs des gorges est malheureusement trop longue pour le temps imparti.

Comment résumer cette journée de marche ? Magnifique, paisible, coloré, tranquille, vivifiant. Voilà. En prime, je croise un porc-épic et deux autres marcheurs à trois heures d’intervalle, parfait pour les agoraphobes. Sous une météo toujours aussi idyllique, je suis un chemin tapissé de feuilles jaunes bordé par des bouleaux et quelques rares érables (A ce propos, j’ai un gros faible pour les chemins tapissés de feuilles mortes en automne sous un climat ensoleillé. Si vous ne savez pas quoi m’offrir pour la Noël…). Un peu plus tard, le chemin s’élève progressivement pour atteindre un promontoire rocheux qui domine l’entrée des gorges. En redescendant, on atteint la rivière qu’enjambe un pont de bois. Malheureusement, la randonnée s’arrête ici, le pont étant en réfection et interdit au public. Je rebrousse donc chemin après un déjeuner de sandwich au bord de l’eau.

Une marche le long d’un chemin jaune. Ça me rappel un film…

DSC_9011_DxODSC_9015_DxO DSC_9019_DxO DSC_9021_DxO DSC_9023_DxO DSC_9024_DxO DSC_9025_DxO DSC_9026_DxO DSC_9029_DxOPetit jeu, dans une des photos ci-dessous se cache un porc-épic. Sauras-tu le retrouver?

DSC_9048_DxO DSC_9054_DxO DSC_9055_DxODSC_9058_DxO DSC_9056_DxO DSC_9083_DxO DSC_9097_DxO DSC_9107_DxODSC_9100_DxO DSC_9119_DxO DSC_9120_DxO