Jour de marché

Pour ceux qui auraient raté un épisode, je me trouve actuellement au 21° parallèle sud (soit quasiment directement sur le tropique du Capricorne) et au 159° longitude ouest (soit pas très très loin de la ligne de changement de date). Il est bon parfois de rappeler que la Terre est une sphère et que je ne suis pas loin de me retrouver à l’opposé de mon point de départ.

Ce matin, je me lève frais, dispo et bien loin de ces considérations astronomiques dans ma grande chambre temporaire. J’ai la matinée de libre avant que la gérante du Paradise Inn vienne de nouveau me récupérer pour me transporter vers l’hôtel où je resterai définitivement. Enfin, jusqu’à mon nouveau départ en avion, malheureusement.

Aujourd’hui, c’est exceptionnel car c’est le jour du marché à Avarua, la bourgade principale de l’île. En tout cas, c’est ce que me vante Trip Advisor et la gérante du Paradise Inn. Je reprend donc le bus, cette fois ci dans le sens anti-horaire, et descend vingt minutes plus tard en compagnie d’une petite douzaines d’autres touristes à l’arrêt du marché. Cette fois-ci je tombe sur un chauffeur beaucoup plus taciturne.

Le marché d’Avarua, c’est un grand terrain vague entre la route et la mer occupé par des cahutes permanentes en bois. Imaginez un marché de Noël en plein été, tout en longueur, aux cabanes beaucoup plus aérées et vous aurez une bonne idée de la nature du lieu. On y croise en majorité des touristes reconnaissables à leur peau cramoisie bien qu’il attire également des gens du coin pour le côté « fête au village ». En sortant du bus, je parcourt en premier une série d’étals de fruits et légumes, certains m’étant totalement inconnus. Plus loin, un grand nombre de commerçants proposent des paréos ou des babioles pseudo-artisanales. Au centre, une estrade couverte abrite une petite animation musicale autour de jeunes filles dansantes. Autour, quelques autres personnes proposent de quoi manger sous la forme de hot-dogs, fish’n’chips et brochettes de bœuf ou poulet. Je craque pour les derniers. L’ambiance est plutôt souriante et carrément détendu.

Je suis toujours autant estomaqué par la quantité de vendeurs d’habits, ici surtout représentés par des paréos et des t-shirts aux couleurs saturées. J’ai la désagréable sensation d’un marché très orienté vers le touriste de base. C’est bien dommage car je suis à la recherche d’un étal de poissonnerie. La gérante du Paradise Inn m’a vanté le poisson local, frais et peu cher, notamment du thon de la meilleure qualité (manifestement pas en voie d’extinction, ici) et le mahi-mahi, un gros poisson tropical. De ce côté-ci, c’est choux blanc.

Après avoir atteint l’autre extrémité du marché, je retourne aux vendeurs de fruits et légumes. Il est certes sympathique ce marché, mais on ne peut pas dire qu’il soit extrêmement varié. Finalement, j’achète quelques petites oranges mais surtout des patates douces locales, les fameuses kumaras emportées par les premiers colons maoris. Longues et un peu tordues, elles ont la chaire rosée. Ce sera une première expérience culinaire.

DSC_8190_DxOJe repart à pied vers le Paradise Inn en traversant Avarua, le long de la mer. C’est vraiment tout petit et le centre ville se résume à quelques magasins, restaurants ou bars ainsi que deux ou trois bâtiments officiels. L’agglomération est tout en longueur, comme partout sur l’île, les reliefs étant très montagneux et couverts d’une dense végétation.

Je rejoint de nouveau ce qui aurait du être mon hôtel et retrouve la gérante à l’accueil. Elle est marrante car elle est totalement dans le rythme insulaire tout en donnant l’impression d’être stressée. J’attends donc quelques minutes qu’elle finisse ses occupations en cours avant que l’on monte, de nouveau avec son chien, dans sa petite voiture japonaise.

« Ça vous dérange, Oliver, si je passe acheter du poulet pour midi ?

  • Euh, non. Pas du tout.

Décidément, il n’y a pas de formalités ici. On repart donc en direction du centre d’Avarua pour se garer deux ou trois minutes plus tard devant le CITC Shopping Center, le petit supermarché du centre ville. Je l’accompagne à l’intérieur et la suit jusqu’au rayon rôtisserie. Elle finit par me convaincre et je prend également un volaille rôtie. Tant que j’y suis, je fait également quelques autres petites courses pour la semaine, sel, poivre, etc. C’est l’occasion de constater que la majorité des produits proviennent de Nouvelle-Zélande, notamment la viande congelée et même certains fruits et légumes.

Après avoir payé à la caisse, je retrouve la gérante et, alors que nous repartons en voiture, je l’interroge sur le peu de produits locaux. D’après elle, la majorité des fruits, légumes et viandes locales sont produits directement par les familles sur leurs terres. Ils sont donc destinés à la consommation des ménages et non pas à la vente. Seule une petite proportion se retrouve en vente sur le marché. La plupart des familles élèvent des poules et possèdent quelques porcs. Dans la foulée, elle me déconseille le poulet local, à la chaire trop ferme. D’ailleurs, nos poulets rôtis son néo-zélandais.

En continuant de discuter autour de l’argent, elle m’apprend également que les îles Cook bénéficient du niveau de vie le plus élevé des îles polynésienne. Voilà, qui me surprend. En même temps, il est vrai que les locaux que je croise m’ont l’air heureux et sains. Ce n’est pas non plus Dubaï mais j’ai la première impression d’une île paisible et humblement prospère. Nous en venons à parler de Tahiti, la plus grande île polynésienne (après la Nouvelle-Zélande). Une de ses amies tahitienne, installée à Rarotonga depuis quelques années, est repartie dans son île natale, le coût de la vie y ayant sérieusement chuté. J’étais resté sur l’image d’une île hors de prix, notamment à Papeete. Il semblerait que ce ne soit plus le cas. Ça mériterait d’être approfondi.

Enfin, après un nouveau quart de tour de l’île, nous nous arrêtons au Muri Beach Resort. A l’accueil, elle me présente à l’employée qui me confirme que tout est arrangé. Je sert la main à mon ancienne gérante qui s’excuse une nouvelle fois de son erreur. Non, non, ce n’est rien.

C’est vrai. Ce n’est rien, surtout lorsque je vois sur quoi je suis tombé. C’est carrément beaucoup plus sympa.

L’arrivée à Rarotonga

Lorsqu’on arrive à Rarotonga, île principale de l’archipel des Iles Cook, on revient en arrière dans le temps. Peut être était-ce un temps fictif, mais en tout cas je parle du temps où tout était plus humble, chaleureux et à taille humaine.

L’aéroport international, tout d’abord, est aussi grand qu’une gare de ville moyenne (et pas nécessairement bourguignonne, pour changer). On descend de l’avion par un escalier, on traverse le tarmac, et on entre dans le bâtiment où la douane et l’immigration se résument à un portique de sécurité et deux employés qui regardent votre passeport. Chose très agréable, je ne suis même pas assommé par la chaleur, un idéal petit 27°C sous un ciel aux quelques gros nuages.

Notre vol Air New Zealand déverse son lot de touristes qui font patiemment la queue, la plupart avec déjà des caisses de bières dans les bras, achetés directement au magasin duty free, avant même le passage devant les deux employées de la douane, pour cause de législation spécifique. Il y a même quelqu’un du magasin pour nous prévenir que c’est la seule occasion pour payer moins chers les alcools. Manifestement, pour beaucoup de touristes, c’est quelque chose de connu et un passage obligé.

Pendant que je fais la queue, je profite pour compulser la vingtaine de flyers vantant les différentes activités sur l’île. Location de voitures, scooters, vélos, plongée, soirée spectacle à thème polynésien, restaurant de fruits de mers, trek en quad à travers l’île, le ton semble donné, il s’agit ici de divertir un maximum. Seul sort du lot un prospectus vantant les célèbres randonnées guidées à travers l’île d’un certain « Pâ », polynésien cinquantenaire en photo avec des dreadlocks, portant la mention « vu à la télé ». Je l’empoche.

Ce séjour dans une île du Pacifique, je l’attend impatiemment depuis la fraicheur de Melbourne. C’est également pour moi le seul moment, une semaine, où je vais rester à peu près sédentaire depuis Pondichéry. Accessoirement, c’est également l’endroit où je crains le plus de m’ennuyer. On verra bien. Et puis, passer une semaine dans une île polynésienne, c’est toujours ça de coché dans la liste des choses à faire avant de mourir.

Sans surprises, la plupart de mes co-touristes sont néo-zélandais ou australiens. L’archipel est plus ou moins indépendant mais administré par la Nouvelle-Zélande dans un mode qui semble similaire aux Territoires d’Outre Mer français. La monnaie ayant cours est le kiwi dollar avec sa variante à taux de change équivalent frappée localement. Plus dépaysant, le personnel local a la bonne bouille souriante polynésienne, les hommes ayant pour la plupart un physique de rugbymen et certaines femmes des fleurs dans les cheveux. On y vérifie sans peine l’origine ethnique des Maoris. C’est d’autant plus frappant que chacun parle anglais avec ce même accent néo-zélandais si amusant, quoique peut-être plus chantant.

Finalement, je me débarrasse des formalités, récupère mon sac à dos et sort du petit hall pour me retrouver directement sur le parking, à la recherche de l’arrêt de bus. D’après ce que j’ai compris sur internet, l’île possède deux lignes de bus. Les deux empruntent le même parcours, c’est à dire quasiment l’unique route qui fait tout le tour de l’île. L’une la parcourt en sens horaire et l’autre en sens anti-horaire. Il est à peine 16h et j’ai tout mon temps pour rejoindre le Paradise Inn où j’ai loué une chambre / studio pour la semaine. Des navettes proposent des billets plus chers pour aller directement à son hébergement mais moi, je trouve ça plus amusant de prendre le bus local, sans parler que c’est moins cher.

Je me dirige donc rapidement vers une dame de l’aéroport et je lui demande où se trouve l’arrêt du bus. Suivant ses indications je traverse le parking, traverse la route qui est à peu prêt aussi importante qu’une départementale française et me retrouve sur un dégagement en gravier devant un restaurant bar. Comme je vous l’ai dit en début de billet, ici, tout est plutôt simple. Je retrouve un petit peu l’excitation aventureuse de l’Inde. N’étant pas totalement débile, je me met du côté de la route correspondant au sens horaire, l’aéroport étant au nord-ouest de l’île et mon hôtel plutôt au nord-est, pas très loin du centre ville de la principale bourgade de l’île, puis je patiente sous le soleil. C’est également l’occasion d’admirer les rudes montagnes volcaniques couvertes de jungle du centre de l’île alors que derrière moi et le bar, à une vingtaine de mètres, j’entraperçoit l’océan.

Je suis d’un naturel patient lorsqu’il s’agit de faire la queue. Je patiente donc une demi heure. Je vois passer devant moi à intervalles régulières des voitures, des scooters et des vélos, certains portant des employés de la douane et de l’immigration quittant l’aéroport. Tout laisse à croire que le trafic aérien est suffisamment clairsemé pour s’autoriser quelques pauses. D’ailleurs, depuis notre arrivée, aucun avion n’a décollé ou atterri.

Finalement, j’aperçois un vieux bus à moitié rouillé arrivant dans la bonne direction. Je lève donc un bras et attrape mon sac à dos alors que le véhicule se range sur le gravier dans un couinement de freins. A l’intérieur, quelques touristes en t-shirt, short et coups de soleil occupent les bancs en skaï verts parmi quelques autochtones. Le chauffeur, un souriant polynésien me dit bonjour et je lui achète un ticket avant de m’asseoir derrière lui.

Il s’en suit alors une bonne heure de trajet dans ce bus cahotant, temps pendant lequel je peux avoir un premier aperçu de la totalité de l’île, avant de revenir à mon point de départ, devant l’aéroport. Que c’est-il passé entre temps ? Et bien, tout d’abord, je n’ai pas bien compris au début qu’il fallait que j’avertisse le chauffeur du nom de mon hôtel afin qu’il s’y arrête. Toute la périphérie de l’île est constellée d’hôtels, complexes, resorts et restaurants (même si on est très loin de la côte varoise) dans une sorte de continuité en pointillé sans qu’il en ressorte de véritable ville hormis la capitale, Avarua, grande comme un village. Ensuite, j’étais en état de semi-somnolence en train de profiter du trajet. Finalement, le chauffeur s’est avéré être principalement un comique, se moquant gentiment de chaque nouvel usager avec des blagues récurrentes (au bout d’une heure, j’avais compris le principe, moi qui pensait au début qu’il improvisait) ou racontant des blagues parfois incompréhensibles (sauf pour les néo-zélandais à bord) sur les maoris (qui ont l’air d’être les belges du coin). Bref, je profitai du spectacle dans tout les sens du terme sous 27°C, température que nos politiciens devraient imposer par la loi.

Après un tour complet de l’île, je me dit qu’il est peut être temps de me poser, surtout que j’ai déjà vu le spectacle. Je me penche donc vers mon chauffeur et lui demande s’il peut me déposer au Paradise Inn. Je m’en sort bien, il ne cherche pas à m’humilier devant tout le monde en se fichant ma tête. Ceci dit, il est bien sympathique, et prend même la peine d’avertir son patron qu’un des clients a oublié son iPhone, ce que moi, personnellement, je n’aurai pas fait.

C’est donc vers les 18h que le bus s’arrête de nouveau devant mon hôtel et je quitte mon chauffeur-comédien-humoriste en le remerciant. L’hôtel est un bâtiment en bois blanc, sorte de grande maison tout en longueur, entre la route et la mer comme il se doit pour la plupart des hébergements pour touristes de l’île. A l’accueil je pose mon sac et cherche un être humain pour interagir. J’aime bien ça, moi, l’interaction. Personne. Bon, bon. J’attends un peu, étant encore une fois plutôt stoïque. Rien. Je cherche une sonnette. Echec.

Finalement, après dix minutes, je décide de faire le tour de la grande maison pour croiser quelqu’un. Je longe le bâtiment où donnent les chambres et pénètre dans le salon commun donnant sur la plage. Sur la terrasse, une bonne vingtaine de personnes sont confortablement assises en rond, un verre à la main, écoutant attentivement une dame anglo-saxonne d’âge moyen en paréo. A mon arrivée, tout le monde se retourne et la dame se tait. J’ai l’impression que je dérange.

« Bonjour, je cherche quelqu’un pour l’accueil ?

  • Euh, c’est moi, répond, un peu surprise, la dame en paréo. Quel est votre nom, s’il vous plait ?
  • Olivier Prat, j’ai réservé pour une semaine sur Agoda.
  • Ah, répond-elle après quelques secondes de blanc. Euh… je vous rejoint et je m’occupe de vous dans quelques minutes.

Je me replace donc à l’accueil et attend donc qu’on s’occupe de moi. Quelques minutes plus tard, la dame me rejoint avec un petit chien blanc et un air interrogatif.

« Alors, à nous maintenant. Vous pouvez me rappeler votre nom, s’il vous plait ?

  • Olivier Prat, j’ai réservé par Agoda.
  • Bon, voyons voir, dit-elle en se penchant sur son ordinateur. Je vous avoue être perplexe car nous sommes complet et je n’attendais plus personne. Ceci dit, votre nom me dit quelque chose.

C’était donc cela. Effectivement, après quelques minutes de recherche sur son ordinateur, la vérité éclate au grand jour : ma réservation est passée à la trappe. Avouez tout de même qu’il y a de pires endroits au monde où se retrouver sans toit qu’une île paradisiaque où la température ne descend pas en dessous de 25°C. Je n’éprouve donc même pas de colère ou de panique, mais plutôt un certain amusement.

Fort heureusement, après des explications au sujet d’ordinateur en panne et de disque dur changé, la tenancière m’assure gentiment qu’elle va s’occuper de moi en appelant les autres hôtels de l’île, à sa charge bien sur. En attendant qu’elle trouve une solution, elle m’invite à me poser confortablement sur la terrasse avec une boisson offerte par la maison. Chic.

Quelques secondes plus tard, me voilà donc assis en terrasse sur une chaise face à la mer, au dessus d’une petite plage, en train de profiter des premières gorgées d’une bière bien fraîche. De la vingtaine de personnes à mon arrivée ne restent que deux jeunes hommes à une table, également munis de leur bouteille de bière.

Assez rapidement, la conversation s’engage, suite à mon arrivée un peu surprise. Je leur apprend ma situation en rigolant et très facilement, nous commençons à parler d’autres choses. L’hôtel est au complet car il héberge pendant un mois une vingtaine de jeunes instituteurs stagiaires australiens, venus ici pour parfaire leur formation dans le cadre d’une convention avec le gouvernement des îles Cook. Ils interviennent dans les écoles primaires de l’île tout en profitant d’un cadre plus qu’agréable. Alors que le soleil décline rapidement, comme c’est légitime sous les tropiques, nous sommes rejoint par un troisième larron de la bande, un grand gaillard blond et costaud.

Une bière à la main, un couché de soleil dans le dos, une température idéale et une conversation agréablement intéressante, voilà ce qu’il faut pour bien finir une journée de voyage. Les trois gars viennent de la région de Melbourne et nous parlons fatalement de la ville et de sport. C’est eux qui m’apprennent qu’une grande partie de la population de leur région est férue de sport et qu’il n’est pas rare d’aller voir des matchs de toutes les compétitions au stade plusieurs fois par semaine. On plaisante également sur le caractère un peu « snob » et « trendy » de Melbourne, tel qu’il est perçu par les gens habitant la campagne autour.

En cours de route, du balcon, deux jeunes femmes, toujours institutrices stagiaires, participent à la conversation. Elles m’apprennent qu’elles doivent, en plus de leurs cours, rédiger un mémoire, ce qui bien entendu, vu les conditions, est bien la dernière chose qui leur fait envie. Je suis d’ailleurs surpris par l’âge de ces stagiaires qui vont de 20 à 30 ans. Certains ont d’ailleurs déjà pratiqué des métiers et sont venus à l’enseignement après coup, bénéficiant des bourses octroyés par le gouvernement australien. Sans vouloir conclure trop hâtivement, je trouve ça assez rafraichissant par rapport à tout les instituteurs et professeurs français, directement sortis des études, sans autre expérience professionnel. Mais peut être suis-je tombé sur un lot très particulier. Déjà, ils sont en stage sur une île paradisiaque.

Alors que je fini de bien sympathiser avec cette dynamique bande, la responsable de l’hôtel revient et m’annonce avoir trouvé une solution. Elle s’est arrangé pour m’héberger cette nuit dans un autre hôtel et les nuits suivantes dans un troisième. Elle me rassure, j’y serai beaucoup mieux qu’ici. C’est peut être vrai d’un point de vue purement fonctionnel et luxueux, mais j’avoue déjà regretter ces jeunes australiens et l’ambiance détendu de l’endroit. Je les quitte donc en les remerciant et en leur souhaitant un bon stage, alors que le blond barbu m’invite à les rejoindre boire un verre si on se recroise. Sait on jamais avec cette île tout en cercle.

Nous nous retrouvons donc à trois, la gérante, son chien et moi, dans sa petite voiture japonaise en route vers ma prochaine étape. Enfin, pas tout à fait. Elle me propose d’abord de s’arrêter en route pour s’acheter un fish’n’chips. Elle meurt de faim et il 20h, il est vrai. Soit, allons-y, je ne suis pas pressé. Je discute donc un peu avec elle et j’apprend qu’elle est néo-zélandaise, installée ici depuis quelques années. Elle loue le bâtiment de son hôtel car la loi des îles Cook interdit la vente de terrain aux étrangers. A vrai dire, c’est même plus simple que cela car la terre n’est pas réellement une propriété privée. Elle appartient aux familles élargies et ne peut être vendue sans l’accord d’un comité. D’après elle, c’est une bonne chose qui a permit de contenir le prix des logements tout en préservant l’hébergement des habitants locaux. Aux îles Fidji, qui suivait jusqu’ici une loi similaire, il a été décidé de libéraliser le marché de l’immobilier, à la mode occidentale, avec pour résultat une inflation terrible et des autochtones mal logés.

Elle se gare alors sur un parking en gravier et nous descendons en laissant le chien, placide à l’arrière. D’après elle, ici se font les meilleurs fish’n’chips de l’île et pendant qu’elle part se chercher sa portion, je m’approche de habitués. Le lieu s’avère être une sorte de bar / restaurant en plein air et ce soir, l’affluence est plutôt importante. Sur un écran géant, un match de rugby du championnat néo-zélandais est diffusé, suivi passionnément par les clients. Je tente de suivre.

Régulièrement, je surveille ma chauffeuse, occupée à avaler son plat avec les doigts tout en discutant avec des connaissances. Finalement, une demi-heure plus tard, elle me retrouve dans la foule et nous remontons en voiture. On peut dire qu’elle a attrapé le rythme des îles, elle.

Enfin, quelques minutes et un petit quart de tour de l’île plus tard, nous nous arrêtons une nouvelle fois, cette fois-ci devant un hôtel plutôt luxueux en bord de mer (mais est-il besoin de le préciser), le Pacific Resort. La gérante du Paradise Inn résume la situation à la préposée de l’accueil et cinq minutes plus tard, après avoir remercié la première de ces efforts, je suis la seconde vers ma chambre, à l’étage d’un bâtiment isolé, de l’autre côté de la route.

Pour ce soir, j’ai le droit à une grande chambre classieuse avec une belle salle de bain et une petite kitchenette. Pour ne rien gâcher, la gérante de mon ex-hôtel m’a même offert le diner. Je fini donc ce périple au restaurant soigné et lounge du Paradise Inn, à l’air libre, entouré d’une végétation tropicale et bien entendu, toujours sous 27°C.

Côté conversation, par contre, c’est beaucoup moins agréable.

Le petit écran

Ça fait quelque temps que je souhaite vous parler de ce curieux phénomène constaté depuis l’Inde. Aussi bien en Inde, au Vietnam, en Australie et en Nouvelle-Zélande je constate que les émissions de télévision se ressemblent toutes. Pour les deux derniers pays, cela n’a rien d’étonnant du fait de leur proximité mais pour les deux autres, je ne m’attendait pas à cela.

Je ne passe pas mon temps à regarder le petit écran, c’est même d’ailleurs exceptionnel, mais à chaque fois que j’effectue un petit zapping, je remarque les mêmes similitudes. Tout d’abord, je ne sais pas pour vous, mais j’ai les yeux qui pleurent à force d’être hyper stimulé par les éclairages violents et plats des plateaux de journal télévisé ou talk-shows, à croire qu’il n’y a qu’une seule façon d’éclairer ces émissions, sans subtilité de préférence. J’ai l’impression que c’est la chasse à l’ombre. Ah non de dieu, Robert, il y a une petite ombre sous le menton de Jennifer ! Attends, bouge pas, je lui rajoute un quinzième projecteur par en dessous. C’est d’un triste. Pour ne rien arranger, le chefs décorateurs sont tous portés sur les couleurs vives ce qui n’arrange rien sous les éclairage massifs des plateaux. Bon sang, mais qui a lancé cette mode et surtout pourquoi a t-elle était reprise partout dans le monde ?

Je ne vous parle même pas du standard qu’est devenu la pose raide comme un piquet du présentateur de journal. Ils sont d’ailleurs tous recruté chez Elite, surtout les femmes, à voir leur plastique étrangement haut dessus de la moyenne, y compris en Inde. Mince, où est passé le sympathique moustachu bedonnant ? N’y a t’il plus de place nul part pour le ou la présentatrice au strabisme divergent ?

Bon, ça encore, je m’énerve juste pour m’énerver car le plus triste dans toute cette histoire d’uniformisation et que l’on retrouve quasiment les mêmes émissions partout, la faute à Endemol, la titanesque société de production hollandaise. J’ai l’impression que l’émission de télévision calibrée est devenu le premier produit d’exportation des Pays-Bas (même si je vient de découvrir grâce à Wikipédia que l’entreprise a été racheté par Telefonica, société espagnole). Que ce soit « Qui Veut Gagner des Millions » (moi, pour commencer), « Star Academy », « Big Brother » ou d’autres, chaque émission est produite dans tout ces pays avec absolument tout similaire que ce soit la musique, les décors, l’éclairage et le concept. Tu parles d’un dépaysement.

Lorsque l’on va sur le site d’Endemol France, on découvre d’ailleurs ce magnifique slogan sans fard et d’une touchante sincérité : « Endemol, producteur de flux ». Tout est dit. On n’est pas là pour faire des émissions les gars, on est là pour remplir les tuyaux.

La pizza d’un poète

Au cours de ce long voyage, et je ne parle pas seulement de l’étape néo-zélandaise, il m’est arrivé d’être surpris par l’environnement traversé. Que ce soit des paysages, des villes ou des gens, ces moments là sont les moments de grâce du voyage, ce dont on se souvient le plus. De plus, lorsqu’on voyage seul, ce qui a de vraiment satisfaisant, c’est qu’on est en grande partie responsable du contenu. Si c’est ennuyeux, on ne peut s’en prendre qu’à soit même et si on passe des moments géniaux, on se félicite de s’être foutu un grand coup de pied au cul, métaphoriquement parlant, pour s’être forcé à faire deux heures de bus pour voir des ruines dans une chaleur apocalyptique. Corollaire de tout ceci, on s’en veut parfois de ne pas s’être fait violence et ne pas avoir assisté à une fête de pécheurs alors qu’on y était cordialement invité.

Et puis parfois, on se surprend soit même. Tout ces déplacements nous conduisent dans des situations que le vocabulaire branché qualifierai « d’improbable » alors que, lorsqu’on est confortablement chez soi dans la routine du travail, jamais ceci n’aurait pu arriver (ou alors, justement, de façon peu probable). Tout ces voyages, ces changements de cultures nous ont finalement changé d’une façon subtile, peut être pas irrémédiablement, mais dans le contexte de ce périple on sent qu’on a atteint un certain degré de compétence, d’agilité et de détachement. A ce moment là, certaines choses que l’on n’avait pas prévu nous arrive.

Je sens que vous ne voyez pas trop où je veux en venir. L’introduction est longue, permettez moi donc de revenir un peu en arrière. Et pour que ce soit plus vivant, passons au présent narratif. Ça ne coute pas plus cher, et ça m’évite de désagréables ennuis de concordance des temps.

Le YMCA d’Auckland est un grand bâtiment austère à plusieurs étages identiques. Sur chacun, un long couloir droit donne accès aux multiples dortoirs alors que deux salles de bains et deux salles de toilettes procurent le restant de confort moderne abrité derrière des fenêtres en simple vitrage. En dehors de cela, point de fioriture. On se croirait dans une résidence étudiante des années 60.

Après m’être enregistré à l’accueil, de manière fort sympathique, je monte au quatrième étage et remonte le couloir à la recherche de ma chambre, mes sacs à dos sur les épaules. Ce moment là est toujours un peu spécial. J’imagine qui seront mes collègues de chambrées, deux allemands en vadrouille ou un camionneur de cinquante ans, et de vieux réflexes casaniers me font discrètement rêver d’un dortoir vide. Ça c’est déjà vu. J’ouvre la porte et rentre.

Raté. Ce ne sont pas deux sœurs suédoises en visa tourisme-travail. En fait, je n’en sais trop rien car la chambre est vide même si des signes évidents d’occupation m’ôtent tout espoir d’être seul. Une cafetière électrique, des biscuits sur les casiers ainsi que plusieurs gros sacs et une guitare sur un des lits superposés me font supposer que mon collègue est ici installé. Je pose donc mes affaires sur le lit en face, en bas, histoire de marquer mon territoire. Je m’installe et sort ma liseuse électronique pour me détendre sur le lit.

Quelques minutes plus tard, la porte du dortoir s’ouvre et un type de taille moyenne, cheveux courts, barbe naissante, petits yeux, portant un haut de survêtement à capuche et dans la trentaine tardive, entre de manière dynamique. On s’échange des « Hi » dans des demi-sourires. Histoire de ne pas faire l’ours je lui demande confirmation que le lit est libre. Pas de soucis, c’est bien le cas et il enchaine en me demandant d’où je viens. Je réponds et ravi, il m’apprend que les précédents occupants étant espagnoles, il trouve cela formidable toute cette diversité. Ben merde, j’aurai bien voulu voir ça. Ça m’aurait changé des allemands.

Il faut indéniablement que je fasse des efforts de mémorisation ou au minimum que je sois rigoureux dans mes prises de note car je n’ai aucune trace du nom de ce personnage. Pour fluidifier la narration (et je crois bien avoir déjà usé de ce subterfuge), prénommons le Jack, même si tel n’est pas sa véritable identité. Hors donc, Jack s’exprime de manière relativement rapide et euphorique avec une certaine volubilité. Généralement, je trouve ça suspect et fatiguant. Magie des circonstances, est-ce parce que je viens de passer sept jours en bagnole ? En tout cas, je relance la conversation sur les sujets classiques.

Jack est de Wellington. Nous parlons donc de sa ville et je partage avec lui le peu de choses que j’ai pu apprendre là bas. En parallèle, je le vois en train de s’activer à ranger des affaires dans la chambre, signe supplémentaire qu’il est bien installé. Au cours de cette rapide conversation, je découvre un garçon sympathique mais bavard avec ce mélange étonnant d’ouverture et de méfiance que traduisent, pour moi, ces demi-sourires.

Je me remet alors à lire (toujours du Richard Bolitho, ça ne change pas). Du coin de l’oeil je le vois attraper sa guitare, la brancher sur un petit ampli et se coiffer d’un casque. Avec entrain, assis sur son lit, il se met alors à slapper ce qui s’avère être en réalité une basse dans un curieux silence hormis les petits claquements sourds de ses doigts sur la corde. Je tente de me re-concentrer sur la manœuvre en cours de mon héros favoris, occupé à abattre de deux rumbs avant d’engager l’ennemi par le flanc babord.

Quelques minutes plus tard, il repose sa basse et je ne résiste pas à ma curiosité. Je lui demande s’il est musicien. Jack me répond par la négative et m’explique qu’il est poète mais qu’il apprend la basse depuis quelques temps. Très gentiment, il me demande si cela m’a dérangé. Non, non, point du tout. C’est amusant, il se comporte comme s’il était chez lui, ici, mais tout en s’attachant à ne pas trop déranger. Tout naturellement, nous parlons un peu musique.

Alors que nos relations deviennent cordiales, il me demande si j’ai déjà mangé. Effectivement ce n’est pas le cas. Voilà, il s’apprêtait à descendre acheter une pizza et si ça me dit de l’accompagner, ce sera avec plaisir. En peu embêté, je lui explique que ç’aurait été avec plaisir si je n’avais pas des problèmes de soucis d’argent qui m’oblige à rester frugal le temps que mon p***** de banquier daigne me donner de ses nouvelles. Je doit donc refuser.

Magie, c’est à toi, là, maintenant. Jack, sans une hésitation, propose de me l’offrir. On se connait à peine depuis un quart d’heure et il m’invite à venir partager une pizza sur ses deniers personnels. Il faut bien avouer que je ne suis pas très habitué à ces mœurs ! Je lui explique de nouveau que je ne pourrais pas forcément le rembourser vu que je part dans quelques jours mais malgré cela, il insiste de manière très naturelle. Ma curiosité prenant un peu le dessus, j’accepte.

En attendant, chacun n’ayant pas encore faim, Jack me demande si ça ne me dérangerait pas de l’écouter déclamer un de ses poèmes. Dans quelques jours il va participer au deuxième tour d’un concours de poésie, et il souhaiterai s’entrainer et avoir un avis extérieur. Tout surpris et bafouillant presque, j’accepte. Je me lève donc et m’assoie sur le rebord de fenêtre alors que Jack se place debout à deux mètres de moi. Il se lance alors dans sa tirade dont je ne me souviens plus des mots même si c’était drôlement imagé, métaphorique et renvoyant fichtrement à notre condition mortelle, le tout me fixant intensément dans les yeux avec de grands gestes un peu forcés et de timides envolées puissantes de la voix. Moi, je passe d’un état d’extrême concentration afin de pas rire à une sorte d’abandon, captivé par l’énergie et la flamme qu’il met. C’est certes perfectible, maladroit mais c’est particulièrement sincère et courageux. Je suis admiratif et tente quand bien que mal, avec la même sincérité de lui donner mon avis, notamment sur son interprétation, point sur lequel il doit travailler, d’après lui. Moi, je trouve qu’il devrait encore un peu forcer sur la dynamique, alternant les moments doux et les moments forts. La dynamique, c’est l’émotion, aussi bien en musique qu’en théâtre. Le plus fou, c’est qu’il est d’accord et m’avoue qu’au premier tour du concours, c’est la remarque qu’on lui a fait. Je vais peut être devenir critique de poésie, moi, tiens ?

On se donne donc une dizaine de minutes pour s’occuper de diverses petites affaires puis nous voici tout les deux quittant le YMCA dans la nuit, sous une petite pluie fine bretonne bien que pourrie. Nous descendons la rue en direction du centre ville. Aujourd’hui c’est le jour de la promotion chez Pizza Hut, la pizza classique pour 5$ (soit à près 3€), m’explique t-il. Nous reprenons donc la discussion en marchant et je commence à questionner Jack sur ses occupations. Je suis comme cela, j’aime bien savoir à quoi les gens s’occupent. De plus en plus curieux, il me révèle qu’il est en train de changer de vie. Sans trop rentrer dans les détails, il m’avoue être juste sorti d’une grosse période de galère personnelle. D’ailleurs, ce soir, après la pizza, il doit assister à sa réunion hebdomadaire des alcooliques anonymes.

Voilà. C’est aux alentours de ces moments là que je me surprend. Je me surprend a être intensément passionné par la vie de ce garçon, a être heureux d’avoir accepté de l’accompagner et, quelque part, je suis également flatté qu’il me parle de tout cela, moi, quasi-inconnu. La conversation se poursuit alors que nous arrivons devant le petit stand Pizza Hut où se pressent une poignée d’étudiants sans le sou et d’autres individus en recherche de bons plans. Un peu mal à l’aise, j’attend que Jack achète la pizza et le remercie chaleureusement. Il n’y a pas de quoi. Ben si, mon gars, j’insiste.

Nous allons nous poser un peu plus loin sur un banc en bord de trottoir luisant de pluie, les lumières multicolores se réfléchissant sur le bitume humide alors que de rares passants se hâtent vers des lieux plus cléments. Ce n’est pas luxueux mais les Alcooliques Anonymes sont à deux pas et moi, je trouve qu’on est dans le ton. Nous reprenons notre conversation et Jack me parle de son projet de devenir acteur ou poète pendant que nous mâchonnons nos parts. Il y a des gens que je trouve admirable par leur envie, leur rêve et leur détermination. On discute du milieu culturel et artistique d’Auckland qu’il me dit plein d’opportunités. Moi qui ne suit pas très branché poésie, je me surprend une nouvelle fois à trouver cela fascinant. A mon tour je lui explique mon tour du monde, ma situation d’indépendant, mon envie de dégager du temps, de réaliser mes propres projets et advienne qui pourra. Nous parlons même religion et partageons une vision commune sur le sujet.

Finalement, nous finissons notre repas et repartons vers le YMCA. En route, j’abandonne Jack a sa réunion et me retrouve seul dans le dortoir. En voilà une soirée vraiment étonnante.

Le lendemain matin, Jack me propose des biscuits et un café. Aujourd’hui, il quitte le YMCA pour un autre endroit moins cher. Etonnant personnage. J’aimerai bien savoir ce qu’il adviendra de lui. Nous nous quittons en se serrant la main chaleureusement, je ne manque pas de le remercier une nouvelle fois pour la pizza et surtout, je lui souhaite toutes les chances possibles pour son concours. Il y a des dîners fast-foods qui valent de grandes soirées au restaurant.

Auckland

Finalement, une semaine dans un pays ça file vite. Po, po, pop. Avant que vous vous mettiez à hurler comme des putois, je prend les devants. Oui, la plupart d’entre nous n’avons qu’une semaine pour visiter un pays, pour qui se prend-il ? Je ne dis pas le contraire. N’empêche que j’ai déjà fait une semaine dans d’autres pays (notamment l’Ecosse) où ça passait moins vite. Finalement, le fait de se balader seul en voiture, c’est certes pratique mais on passe beaucoup de temps à rouler.

Me voilà donc de retour à l’aéroport d’Auckland où j’ai déposé ma voiture. Dans trois jours, j’y retournerai pour m’envoler pour la destination suivante mais, en ce moment, je prend le bus pour le centre ville. De nouveau, j’ai réservé un lit dans un dortoir sauf que cette fois-ci c’est dans un endroit rendu mondialement célèbre par une bande d’énergumènes chantant en playback sur une musique disco et habillés chacun dans un costume représentant un métier plutôt physique (oui, je constate à chaque fois qu’il n’y en a pas eu un déguisé en cadre supérieur ou en professeur d’université). Si vous avez un minimum de culture, vous aurez reconnu les Village People et leur célèbre tube, YMCA. Ouaip, je peut maintenant annoncer fièrement que j’ai dormi dans un YMCA à Auckland. Mais assez parlé, logement, car je détaillerai cela dans un billet suivant.

Toujours est-il, qu’avant d’arriver à destination, j’ai l’occasion d’avoir un premier aperçu de la capitale économique du pays. Tout d’abord, c’est assez vallonné. D’ailleurs le centre ville où se situent la majorité des immeubles, le reste se contentant de bâtiments relativement bas, comme cela semble être la norme dans ces pays neufs où chacun s’étale, et bien ce centre ville est entouré de collines. La colline la plus haute, le mont Eden, au sud du centre ville, héberge un parc. Le seul endroit plat se situe en toute logique proche du port, au nord. D’ailleurs, on se pâme devant la baie de Sydney (moi même, j’ai cédé à ce travers) mais vu sur une carte, la baie d’Auckland elle n’est pas à vomir non plus. Elle est même à placer dans la même catégorie, je trouve. Là où la ville néo-zélandaise se démarque, c’est que, techniquement, elle est au bord de deux baies, l’une au nord, que borde le centre ville, donc, et qui donne sur le golfe d’Hauraki et l’autre, au sud, sur le port de Manukau. Avouez que c’est assez exceptionnel, tout de même ?

C’est encore plus amusant lorsque l’on constate que la ville d’Auckland occupe toute la largeur de l’isthme à la pointe nord de l’île du nord. Au delà, c’est le Northland et si vous souhaitez y aller du sud, il n’y a pas d’échappatoire, vous êtes obligé de traverser l’agglomération. Mais assez de considérations géographiques qui, j’en suis sûr, n’intéressent que moi et les autres passionnés de cartes.

DSC_8123_DxOQue vaut Auckland d’un point de vue touristique ? Encore une fois, l’état d’esprit dans lequel on se trouve au moment de la visite compte pour beaucoup. Il fait frais, il pleuviote par intermittence et comble de malchance, j’ai des petits soucis de paiement (je consacrerai d’ailleurs un prochain billet vert et pas mûr sur mon banquier). Je ne suis donc pas dans les meilleures dispositions mentales. J’ai même d’ailleurs plutôt l’esprit tourné vers l’étape suivante, comme c’était le cas des derniers jours dans mes précédents pays. Disons que c’est une agglomération moderne, assez classique et similaire à Wellington, mais en un peu plus vaste. Grâce à Wikipédia, j’apprend que l’agglomération concentre un quart de la population néo-zélandaise. Mazette. Si le verre est à moitié plein, on peut dire que ça fait beaucoup de monde mais s’il est vide, j’affirme que c’est le désert en dehors, dans ce cas.

DSC_8110_DxOJ’aurai bien voulu visiter la baie en bateau et même m’arrêter sur une des îles pour une demi-journée, mais mes moyens de paiement ne me le permet pas. Je me contente donc de marcher et de prendre des photos. Au dessus du YMCA, le quartier est plutôt agréable et humble. La rue rejoignant Queen’s Street, la grande artère qui plonge vers le port, est vivante et commerçante. De multiples petits restaurants de toutes les cuisines du monde proposent des plats pour pas trop cher.

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DSC_8151_DxOLe centre ville, et bien, c’est beaucoup de hauts immeubles. A part cela, il ne m’a pas transcendé. La seule chose notable qui m’y soit arrivé est que deux dames portant foulard m’ont offert une rose pour la journée de sensibilisation à l’islam. C’est donc la fleur en boutonnière que j’ai arpenté ces rues à la recherche de quelque chose de particulièrement original. Fort heureusement, j’aime beaucoup les immeubles en verre qui reflètent le ciel bleu, comme je vous l’ai déjà dit. Malheureusement, le ciel bleu se fait un peu rare ces temps-ci. J’y ai tout de même une révélation. Attention, vous allez me traiter de naïf, mais… est-ce que c’est moi où les immeubles des centre villes de grande villes appartiennent tous à de grandes institutions financières ou multinationales?

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Du coup, je quitte assez rapidement l’endroit pour une des collines autour. Le quartier de Parnell est, d’après Trip Advisor, un quartier résidentiel sympathique aux jolies maisons et magasins d’artisans, le tout dans une ambiance tendant vers le bourgeois bohème. DSC_8134_DxOEffectivement, le long de la rue principale en montée, astucieusement nommée Parnell road, sur deux cent mètres, de jolies petites maisons abritent des magasins de décoration ou des galeries d’art bien propres sur elles. Tout ceci est un peu trop lisse, je trouve. Sur les rues parallèles, je constate quelques vieilles maisons en restauration mais le quartier n’est finalement pas bien grand. Je m’arrête dans un salon de thé pour lire un peu au chaud en avalant une pâtisserie afin de faire durer l’expérience. Parnell, c’est un poil décevant, en réalité.

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DSC_8152_DxOLe jour suivant, toujours à pied, je vais à la découverte du quartier de Ponsonby, également situé sur une colline de l’autre côté du centre ville à l’ouest. Le quartier est plus vaste que Parnell et dans un dédale de rues perpendiculaires on y constate un grand nombre de vieilles maisons aux ferronneries travaillées. D’ailleurs la plupart sont en piteux état hormis certaines en restauration, signe d’une gentrification en cours. Finalement, je tombe sur DSC_8155_DxOune rue commerçante et le quartier prend un tout autre aspect, plus vivant. On retrouve toujours ces bâtiments bas et une variété de petits magasins ou restaurants. L’endroit me paraît un peu plus humble que Parnell avec une très légère tendance à la Fitzroy de Melbourne par certains côtés penchant vers le cradingue. Ceci dit, ce n’est pas non plus Florence et je ne vous invite par à traverser la moitié de la Terre juste pour venir ici.

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Pour finir avec ma rapide découverte d’Auckland, je passe un peu de temps le dernier jour dans le centre ville du côté du port, arpentant les quelques centre commerciaux rutilants à la recherche de petites choses utiles pour dépenser mes quelques kiwi-dollars. Si vous êtes à la recherche du DSC_8125_DxOdépaysement, ce n’est pas le bon endroit. Non, le seul truc amusant que j’ai vu de ce côté-ci, c’est un immense paquebot blanc à quai. C’est tout bête mais je me suis mis à penser à « La Croisière s’Amuse », cette sympathique mais simpliste série télévisée des années 80. Le bateau de la série s’appelle le «Pacific Princess » et le mien, à Auckland, le « Sea Princess ». C’est pour vous dire comme je m’ennuie ces dernières heures là bas.