Harbour Bridge et the Rocks

Vous allez encore me traiter de menteur et de manipulateur mais je vais de nouveau déroger à la chronologie. Pire, je vais fondre deux expériences en une seule, en vous faisant croire que les deux ont eu lieu le même jour. N’en croyez rien. Tout ça pour vous dire que ce Sydney Cove, j’y suis revenu un autre jour pour visiter le pont d’un peu plus près.

DSC_7641_DxOSi on continu sa promenade en provenance de l’Opéra vers le CBD, on parvient à Circular Quay, le nom des quais abritant les terminaux de ferries, au bout du CBD et au creux de Sydney Cove. C’est un lieu assez vivant (notamment car c’est une des stations de métros principales), qui doit l’être encore plus aux heures de pointe, d’où des ferries font de fréquentes rotations vers les différents endroits de la baie. C’est également ici que l’on peut s’acheter un billet pour une visite guidée sur bateau ou encore payer la somme astronomique de 200 à 300$, suivant la période de la journée, pour grimper au sommet du Harbour Bridge. C’est drôlement tentant mais c’est également drôlement astronomique. Tenez, je viens d’apprendre sur le web que des gens de la trempe de Matt Damon et Kylie Minogue l’on fait. Le jour où je serai connu, je veux bien y revenir. Peut être qu’on me le paiera.

Chose assez incongrue, une voie rapide et une ligne de métro chapeautent les terminaux. Fort heureusement, elle sont plutôt discrètes dans l’ensemble et un ascenseur ou un escalier permet DSC_7614_DxOde rejoindre le trottoir piéton qui la longe la voie routière. C’est en suivant ce trottoir que vous pouvez atteindre plus loin un autre escalier permettant de monter au Harbour Bridge. Mais ça, je ne le sais pas encore.

Moi, je continu au niveau de la mer à contourner Sydney Cove pour me retrouver en face de l’Opéra. Le Harbour Bridge (littéralement le pont du port) part également d’une péninsule (la baie de Sydney est essentiellement une répétition de péninsules encadrant de petites baies) abritant le quartier historique nommé les Rocks. Du côté de Sydney Cove, des vieux bâtiments et des entrepots de brique ont été restaurés pour héberger des restaurants, bars ou magasins. C’est également ici qu’accostent les bateaux de croisière et justement, aujourd’hui, un énorme spécimen blanc s’y trouve, histoire d’ajouter une nouvelle touche d’exotisme à un tableau déjà bien rempli.

DSC_7778_DxO DSC_7781_DxO

DSC_7780_DxOUn peu plus loin, au pied du vénérable pont, votre hôtel. Je dis le vôtre parce que moi je ne pourrait pas me le permettre financièrement. Le Park Hyatt vous propose un hébergement avec vue sur l’Opéra, quasiment au pied de l’eau. Carrément classe même si je constate qu’en fin d’après midi, il se retrouve à l’ombre des immenses piliers du pont. A ce prix là, je trouve ça lamentable.

Bien évidemment, je n’ai pas pu résister au plaisir de passer sous le pont, expérience facilitée par la présence d’une promenade piétonne, continue depuis Botany Park. Bon, c’est gigantesque. Il y a beaucoup de rivets, beaucoup de métal et ça fait mal au cou, à DSC_7786_DxOla longue, de regarder en l’air. Mais quelle perspective, quelles fuyantes, les amis. Regardez-moi ça ! Moi, je ne m’en lasse pas. Il a été construit dans les années 30 et relie le nord et le sud de la baie. Je me demande bien ce qu’il y a au nord pour que ça mérite qu’on le relie au CBD. Pour les collectionneurs de chiffres, c’est le pont métallique à arche le plus large du monde avec 49m de large. C’est totalement inutile de savoir ça, donc je vous le livre. Il n’y DSC_7788_DxOa pas de quoi.

Un truc marquant, je trouve, est de voir à quel point cette baie est active. Il y a bien entendu les ferries mais également des voiliers, petits bateaux à moteurs et même des tankers qui vont et viennent sous ce pont. Allez, je craque. Il y a 49m de dégagement entre la mer et la base de la voie. Oui, je trouve ça également fou que ce chiffre 49 revienne une nouvelle fois en sachant que c’est 7 fois 7 (une enclume sur la tête de ceux qui ne le savait pas). C’est mystique au carré.

DSC_7606_DxO DSC_7608_DxO

DSC_7790_DxOBon allez, c’est pas le tout mais faut continuer. On passe donc de l’autre côté du pont pour pénétrer dans un quartier de pontons et entrepôts restaurés et transformés, encore une fois, en hôtel. Ceci dit, un peu plus loin, on pénètre dans une zone de veilles maisons pleines de charmes, tout à fait au calme. En tournant le dos au pont, je remonte une rue tranquille.

DSC_7791_DxO DSC_7792_DxO

Je tombe finalement sur un panneau indiquant un accès piéton au pont. C’est complètement irrésistible. Je monte donc des escaliers, passe dans un petit tunnel puis emprunte un nouvel DSC_7802_DxOescalier de l’autre côté (celui de Sydney Cove) pour me retrouver enfin sur un passage réservé. Rapidement, le vent se fait sentir. Au niveau du pilier, des ascenseurs payants permettent de monter encore un peu plus en hauteur. C’est déjà pas mal d’ici. De manière amusante, on marche quasiment au niveau du sommet de certains immeubles que l’on peut observer de près. En tout cas, la vue est vraiment superbe.

DSC_7795_DxO DSC_7805_DxO DSC_7808_DxO

Quelque part, le pont et la voie rapide qui le traverse coupent les Rocks en deux. Côté Circular Quay et Sydney Cove on y trouve notamment beaucoup de bars ou théâtres, contrairement à l’autre partie, nettement plus résidentielle. Si vous vous demandez pourquoi ce quartier s’appelle « the Rocks », n’allez pas chercher bien loin. Cette petite péninsule est assez rocheuse.

DSC_7793_DxO DSC_7816_DxO

Une fois revenu à Circular Quay, il ne nous reste plus qu’à plonger dans le CBD.

La maison à Opéra

Non, sans déconner, c’est vrai. Ben si, ça l’est, et même drôlement. Et puis, ne faites pas semblant d’être d’une inculture crasse, enfin. Ça va finir par être crédible. Il est indéniable que l’Opéra de Sydney est un des monuments modernes les plus reconnaissables au monde. Elle est complètement dans le top 10 avec la Tour Eiffel, la Statue de la Liberté et Big Ben. Lorsqu’on la voit, admettez que l’on est de suite convaincu de ne pas être à Strasbourg, Dunkerque ou Montastruc-la-Conseillère. Si en plus, dans la perspective, vous apercevez un grand pont métallique à l’allure de demi-cercle, les indices sont forts et convergents pour que vous soyez à Sydney.

DSC_7607_DxOPour mes retrouvailles avec la dame en forme de coquilles blanches, j’ai de la chance, il fait un grand soleil, plutôt bas sur l’horizon, et de plus, on est samedi. Il y a donc un peu de monde, mais rien de déraisonnable, sur la promenade. Bien évidemment, je me souviens très bien du lieu, même trois décennies plus tard.

Allez, hop ! Un peu d’anecdotes que, vous pensez bien, je n’ai pas sorti de ma mémoire. Ce bâtiment que je trouve, personnellement, fort joli, c’est construit dans la douleur. Dans les années 50, après un appel d’offre, on choisit le projet d’un architecte suédois, porteur du projet actuel. Pour le moment, ce n’est pas une cause de douleur, rassurez-vous. On avait choisi le lieu, situé au bout d’une petite péninsule comme il y en a de nombreuses dans la baie, entre Sydney Cove où se situe les terminaux de ferry et Farm Cove qui borde Botany Park. Il est important que vous vous représentiez les lieux. Bon, en fait, non. On s’en tape. La douleur fut la facture. A l’origine prévu à 7 millions de dollars australiens, la douloureuse s’éleva à plus de 100. Ça refroidit.

Je n’ai pas les détails du pourquoi et du comment de cette crevaison de budget, mais sachez que l’architecte d’origine (suédois, rappelez vous) quitta le projet avant la fin, suite à un différent avec le gouverneur de la Nouvelle Galle du Sud. Ça n’a pas du aider. Un groupe d’architectes locaux finit donc la construction qui dura plus de 10 ans. A sa complétion, le résultat fut décrié, mais franchement, malgré tout ces déboires, je pense que personne ne regrette. Rien de tel qu’un monument à la forme unique pour mettre une ville sur la carte. Ah, j’oubliai. Accessoirement, il y a des concerts et des opéras dedans. Ce n’est pas qu’une coquille vide pour faire joli.

Ce qui a de plaisant lorsqu’on se ballade autour de l’opéra, c’est cette vue exceptionnelle sur la baie, le pont et le CBD. Rien de tel qu’un grand espace dégagé rempli d’eau pour donner du cachet. Un peu de verticalité à un bout avec une masse de gratte ciel, un treillis métallique se découpant en ombre chinoise face au soleil sous la forme d’un pont et le cri des mouettes. Vous y êtes. Parce que, ce qui est vraiment classe avec cette opéra, c’est son intégration dans le décor. Je ne suis pas sur qu’elle aurait eu le même impact si elle avait été construite en pleine ville. La même chose peut être dite du pont, le Harbour Bridge, d’ailleurs, maintenant que j’y réfléchi. Bref, ce qui est magnifique c’est l’alliance de ces éléments : la mer, l’Opéra, le pont, les gratte ciels du CBD. Pris séparément, ils sont certes jolis mais pas exceptionnels. D’ailleurs, on passe plus de temps à tourner le dos au bâtiment en profitant du panorama.

DSC_7610_DxODSC_7613_DxO

Moi, c’est bien simple, j’ai envie d’acheter un appartement au 8ème étage d’un immeuble donnant sur Sydney Cove, au pied de l’Opéra avec vue sur le pont, le CBD et le terminal de ferries. En DSC_7619_DxOplus, étant plutôt attentif à ce genre de détail, lorsqu’on contourne l’Opéra (je persiste à mettre une majuscule) on note plusieurs bars branchouilles au pied de l’eau, avec DJ ou groupe musical le samedi ainsi qu’un cinéma plutôt art et essais à l’excitante programmation mais également un glacier. En somme, la base de la vie. Mais comme je ne suis pas foutu d’avoir des goûts différents des autres, il y a environ un million d’autres péquins qui ont la même envie que moi et qui font sottement grimper les prix jusqu’à rendre mon légitime souhait totalement inabordable.

Notez tout de même qu’il y a des villes, comme ça, je n’en citerai pas pour ne point vexer, qui ne DSC_7631_DxOprovoquent en moi aucun fantasme comme décrit juste au-dessus. Bon allez, si, je cite. Prenons Vierzon, par exemple et pour changer de Chalon-sur-Saône. J’y suis pourtant passé de nombreuses fois, notamment autour de la gare, chaque weekend pendant mon service militaire. Pendant tout ce temps, jamais je ne me suis dit « Té ! J’aimerai bien vivre là, dans cette magnifique maison de ville donnant sur l’église ». Pendant que j’y suis, Adélaïde non plus ne m’a pas inspiré de telles pensées, même si je confirme qu’elle est agréable et sympathique. Il faut autre chose du domaine du déraisonnable pour qu’une ville me fasse rêver, comme exploser un budget sur un opéra aux tuiles auto-nettoyantes posée comme une proue dans une baie.

Je peut donc vous le dire, si jamais vous avez de l’argent à perdre : passer quelques mois de l’année sur Sydney Cove, je ne dis pas non.

DSC_7627_DxO

Retour à Sydney

Le temps file, finalement. J’arrive dans un pays et j’ai un mois devant moi. Je peine à trouver des idées pour occuper ces jours, hésitant entre maximiser les choses à découvrir et prendre son temps, et puis tout à coup, un matin on se retrouve avec plus qu’une petite semaine de jours dans le pays. C’est assez écoeurant de dire ça lorsque la plupart des gens n’ont, justement, qu’une seule petite semaine de vacances en un endroit mais je suis dans un autre rythme.

Pour ma dernière étape australienne, j’ai gardé quelque chose de spécial pour la fin. Je retourne à Sydney, plus de trente ans après. Oui, car pour ceux qui ne connaissent pas mon background, j’ai eu la chance d’habiter deux ans et demi, petit enfant, dans la capitale de la Nouvelle Galle du Sud au tout début des années 80. Autant dire que je vais redécouvrir la ville, re-parcourir des lieux déjà vu mais dont je ne me souviendrai pas ou bien retrouver (ou pas) des sensations oubliées.

Autre particularité de mon séjour à Sydney, je vais également revoir l’ami Romain, un ancien étudiant que j’ai eu à Chalon-sur-Saône, immigré ici depuis quelques années. Ce sera parfait pour faire un point comparatif avec lui de ce que j’ai ressenti dans le pays.

Je quitte donc Melbourne un samedi matin très tôt et, par voie aérienne parce que, parfois, il y en a marre d’être terrien, atterri de nouveau à Sydney. Pour le moment, aucun déjà vu. Un aéroport est un aéroport. Après avoir récupéré mon gros sac à dos, je prend le train pour le centre ville. A travers la vitre, rien de spécial ne déclenche un souvenir. Heureusement, il fait beau et doux.

DSC_7777_DxOJe descend à la gare centrale et me met en route le long d’Elizabeth street à la recherche de mon auberge de jeunesse. Je suis devenu complètement accroc à ce mode d’hébergement. Enfin, disons que moi et mon portefeuille on s’est mis d’accord pour trouver ça chouette. Au loin, à quelques centaines de mètres, de grands immeubles en verre signalent le CBD. Toujours rien de familier. Je récupère les clés de la chambre, pénètre dans un dortoir sombre de trois lits superposés où un type est encore en train de dormir en fin de matinée.

Je prend cinq minutes pour appeler Romain au téléphone et on se met d’accord pour se rappeler plus tard afin de se synchroniser pour se retrouver ce soir en ville boire un coup et manger. Depuis le téléphone portable, on note un pic de procrastination en ce qui concerne la prise de rendez vous. Je repart aussitôt à la recherche d’un coiffeur recommandé par la fille de l’accueil. Quelques rues plus loin je repère la petite échoppe de barbier tenu par deux types d’origine moyen oriental. Je suis le seul client et l’un d’eux pose son magasine pour s’occuper de moi. En dix minutes, il règle mon affaire et pour 15$, je repart avec la nuque fraiche. Ca tombe bien, le temps est printanier. Ceci dit, je n’ai toujours pas reconnu quelque chose de familier.

Je part ensuite faire quelques courses de base (brosse à dent et dentifrice, preuve que je me soucis encore de mon hygiène) et après avoir passé sous les voies de chemin de fer, me retrouve aux portes de Chinatown. L’endroit est vivant et riche en magasins mais je n’ai toujours aucun souvenir de l’endroit. Pourtant, Chinatown, ça devrait DSC_7566_DxOmarquer. Le truc c’est que j’ai des images précises de choses mais tant que je ne tomberai pas dessus, il n’y a aucune chance que je sache où elles sont.

Je revient à l’auberge déposer mes achats puis repart faire une première véritable ballade touristique en direction du CBD. En remontant Elizabeth street, assez rapidement les immeubles deviennent plus imposant et je me retrouve soudain au pied de grands bâtiments en verre.

Je longe un parc avec un monument en son centre. Je m’approche pour voir si ça ne déclencherai pas un flash. Rien. Par contre, j’aperçois plus loin,DSC_7570_DxO longeant le parc, un grand bâtiment à l’allure néo-classique. Première émotion. Ce pourrait-il que ce soit ce musée où, enfant, j’avais effectué une sortie scolaire pour y voir une exposition géologique et surtout un gigantesque squelette de baleine suspendu en l’air ? C’est bien lui, l’Australian Museum, sauf qu’il a sérieusement rapetissé par rapport à mes souvenirs. Me voilà rassuré. Je ne me suis pas trompé de ville.

Je poursuit mon chemin jusqu’à la cathédrale qui ne m’inspire rien. C’est une cathédrale vaguement gothique comme il en existe de nombreuses. Deux ou trois couples en habits de mariés et à la face bienheureuse se font mitrailler par des photographes accompagnés de leur assistants luttant contre l’ennui en tenant d’un air détaché un DSC_7578_DxOréflecteur dans la main. Les gens n’ont donc aucune imagination. C’est d’un triste de faire un demi tour de la planète pour constater les mêmes clichés.

Sur le parvis, j’aperçois de l’autre côté du parc deux immeubles qui me disent vaguement quelque chose. L’un d’eux ressemble à une tour radio gigantesque et l’autre possède une forme octogonale. J’ai un souvenir de diner pris dans un restaurant panoramique rotatif, au sommet d’une tour comme celle-ci. Rassurez-vous, ce n’est pas moi qui payait.

Je continu en passant derrière la cathédrale et rejoint le coin d’un nouveau parc. Un bâtiment à l’aspect curieux titille quelque chose en moi. C’est le conservatoire de musique. Allez savoir, peut être y suis-je déjà DSC_7594_DxOaller. Par contre, si je ne suis pas complètement abruti, je ne devrai pas être loin de Botany Park, le parc jouxtant le CBD et l’Opéra (avec un « o » majuscule car il s’agit de l’Opéra de Sydney, pas n’importe quelle vulgaire salle d’opérette) et abritant un jardin botanique. Ça, je m’en souviens car il faisait parti du circuit touristique classique lors de la venue de membres de la famille venu d’Europe. Aucune chance que je me souvienne du nom des arbres et des essences qui s’y trouvent, par contre.

DSC_7598_DxO

J’emprunte les sentiers du parc et observe les nombreuses personnes posées sur les pelouses, profitant de ce chaud et agréable soleil de fin d’hiver. La température doit avoisiner les 22°C. Irrésistiblement, je suis attiré vers l’eau. S’il y a bien quelque chose qui m’a marqué à Sydney, c’est l’omniprésence de la baie. Elle était partout, à chaque coin de rue, pleine de recoins et d’activité, de ferrys et de voiliers, obstacle coupant la ville en deux mais également voie de transport. Je m’approche du muret et profite quelques instants de ces retrouvailles. Moi, l’eau, je crois que ça m’apaise.

DSC_7599_DxODSC_7601_DxO

Je suis le chemin qui longe la rive, sachant pertinemment que chaque pas me rapproche de la reine des lieux, le co-emblème de la ville et un des monuments mondiaux les plus reconnaissables entre tous. De l’Opéra et du Pont, je garde un souvenir très vif. Et puis d’abord, c’est simple, tout le monde s’y dirige.

DSC_7593_DxO

Australian Football

Melbourne c’est une capitale culturelle. Ca va bien finir par rentrer à force que je vous le répète. Ceci dit, pour beaucoup d’australiens, les sorties en soirée sont plutôt l’occasion d’aller se divertir au stade. De ce côté ci, ils sont plutôt vernis, ayant le choix entre le cricket (pour les plus léthargiques), le rugby (à 13 ou à 15) mais surtout, le football australien, également surnommé « footy ». C’est d’ailleurs extrêmement perturbant au début car les gens vous parlent de « football » en se référant à sa version locale, l’AFL (Australian Football League) mais comme le football européen est encore un peu timide ici, pour eux, il n’y a pas d’ambiguité.

Hors donc, pour mon dernier soir à Melbourne, je me suis inscrit pour aller assister au match du vendredi soir pour un prix complètement dérisoire de 15$ (soit environ 10-11€). La sortie est organisée par le Greenhouse Backpacker et, oh surprise, notre chef de bande est Molly, notre guide pour le Pub Crawl. C’est d’ailleurs elle l’instigatrice de cette sortie. Elle est fan de footy. En plus, ce soir, ça tombe bien, son équipe, Collingwood, joue et pour que la soirée soit encore plus dingue, c’est un derby de Melbourne, Hawthorne vs. Collingwood, deux quartiers de la ville.

A ça, il n’y a rien d’étonnant. En discutant un peu avec Molly, mais aussi grâce à mes papotages avec les trois Brisbanais de hier soir, j’apprend que ce sport est joué majoritairement au sud du pays, avec une forte concentration d’équipes à Melbourne. La ligue compte 18 équipes, dont 9 sont basées dans la capitale du Victoria, voir 10 si on rajoute Geelong, une ville mitoyenne. C’est d’ailleurs à Melbourne que le sport a été créé. Molly nous a d’ailleurs raconté qu’historiquement, il s’agissait d’un sport d’entrainement hors saison pour les joueurs de cricket. Je suis drôlement sceptique à ce sujet car je ne voit pas bien en quoi le fait d’être hors de forme impacte en quoi que ce soit la performance d’un joueur de cricket. Si c’était un sport physique, ça se saurait. Je crois que je vais lancer la rumeur que le rugby a été inventé par des joueurs de pétanque pour maintenir leur condition physique pendant l’hiver.

Du coup, la saison est hivernale est courte. Comme un grand nombre d’équipes est de Melbourne, aux alentours des weekends il y a des matches quasiment tout les soirs. Il y a d’ailleurs deux stades dédiés, des plus modernes, l’Etihad Stadium à l’ouest du CBD et le MCG (Melbourne Cricket Ground) à l’est mais les deux sont en centre ville et facilement accessibles à pied de Federation Square.

Je me retrouve donc de nouveau à l’accueil de l’hostel, attendant que tout le monde se rassemble. Un groupe de trois anglaises sont déjà là, à moitié peinturlurées en noir et jaune, les couleurs de Hawthorne. Agréable surprise, je retrouve Samjin, également intrigué par ce sport. Sous le chaperonnage pressant de Molly, nous prenons la route à pied. Manifestement, elle est pressée d’arriver un peu tôt malgré des places numérotées.

C’est d’ailleurs franchement agréable de pouvoir tout faire à pied lorsqu’on est en centre ville. Le stade est à peine à dix minutes de marche le long de la Yarra River. Hormis deux rues traversées, le reste du parcourt se fait sur un chemin piéton et sur une très jolie passerelle en bois. Nous profitons de ce moment de ballade pour discuter de nouveau football avec Samjin. A l’approche du stade, nous croisons de plus en plus de personnes aux couleurs des deux équipes. La foule est extrêmement variée, familiale et calme.

Le MCG, également stade de cricket, comme son nom l’indique, est vraiment immense et moderne. Après s’être fait refoulé à une entrée pour une confuse raison (je crois que Molly avait ses habitudes et que pour ce match, ce virage n’était pas autorisé pour les non abonnés), nous refaisons un demi tour de l’enceinte pour finalement pénétrer au rez de chaussé. Tout est nickel et propre avec une ribambelle de vendeurs de nourritures et de boissons. Nous grimpons des marches et j’ai pour la première fois une vue de l’intérieur du stade.

C’est immense. Ce stade peut contenir jusqu’à 100000 spectateurs et pour vous donner une idée, c’est plus que le Stade de France qui est le plus grand stade français. Il est parfaitement oval de forme, à l’image du terrain de cricket qu’il contient. De plus les tribunes sont très inclinées ce qui assure à tout le monde une vue superbe sur l’action.

On poursuit donc notre ascension et nous nous retrouvons quasiment aux deux-tiers en haut, dans un des coins du terrain. Enfin, comme il est oval, on ne peut pas vraiment parler de coin. En tout cas, on est super bien situés. Le stade est déjà bien rempli alors que le match ne commence que dans trente minutes.

C’est le moment dont profite Molly pour nous expliquer un peu les règles de ce sport. En espérant ne pas me tromper, disons que c’est une sorte de mélange entre le rugby et le football. Je pourrait vous renvoyer vers la page Wikipédia, mais je préfère quand même vous balancer moi même quelques généralités. Tout d’abord, le sport se joue sur un terrain de 185m de long sur 100 de large. C’est gigantesque. Si, si. C’est beaucoup plus qu’un terrain de football ou de rugby. On y met, à des endroits stratégiques, bien entendu, deux fois 18 joueurs. Ca fait du monde. Vous habillez ces joueurs de petits shorts courts façon Michel Platini, années 70, ainsi que de marcels laissant saillir les muscles des épaules.

Les joueurs peuvent se passer la balle soit à la main, soit au pied. S’ils choisissent la première option, ils doivent impérativement la taper par en dessous, à la manière d’un service de volleyball lorsqu’on ne sait pas servir au volleyball. Contrairement au rugby, d’ailleurs, on peut très bien effectuer une passe en avant. Au pied, c’est beaucoup moins restrictif et on peut faire ce que l’on veut. Là où ça devient franchement divertissant, c’est que le joueur portant le ballon peut se faire plaquer, y compris lorsqu’il est en l’air. Finalement, pour que tout ceci prenne encore plus l’allure d’un sport inventé par une romancière au chômage, vous pouvez porter le ballon mais sur pas plus de 15m. Ensuite vous pouvez dribbler pour repartir pour 15 nouveaux mètres. Oui, vous avez bien lu : on peut dribbler avec un ballon oval. Je l’ai vu faire.

Pour donner un sens autre que de se foutre sur la gueule, on a placé quatre poteaux de chaque côté du terrain. Pourquoi quatre, me demandez-vous (je vous entends d’ici) ? Tout simplement car les deux du milieu rapportent un maximum de point si vous parvenez à passer du pied (et non pas de la main) la balle entre, alors que si vous la passez entre un des poteaux extrêmes et ceux du milieu, ça ne rapporte qu’un point. Si vous la shootez n’importe où, c’est encore plus drôle car cela donne une touche. Mais contrairement à tout les autres sports de la planète où la balle revient à l’équipe adverse qui la remet en jeu, dans ce sport c’est l’un des arbitres qui s’en charge. Pour garantir l’équité de la remise en jeu, il se place alors sur la ligne, se retourne dos aux joueurs, face au public, et d’un grand jet par dessus sa tête qui n’est pas sans rappeler la gestuelle du lanceur de tronc d’arbre, l’envoi valdinguer à l’aveugle très loin dans le terrain. Je crois bien que c’était mon moment préféré du match.

Il y a encore plein de subtilités que je vais passer sous silence, principalement car je ne les ai pas comprises. Heureusement, Molly était là pour répondre à la majorité de nos interrogations. Tout ceci se déroule sur quatre quart temps de 20mn, avec des pauses au milieu ce qui fait qu’on passe quasiment deux heures au stade. Ceci dit, au vu de la taille du terrain et les distances parcourus par les joueurs (sans parler des placages), c’est un des sports les plus physiques que je connaisse. Il n’y a pas à mégoter, ces joueurs sont de sacrés athlètes.

Mais revenons à notre match. Pour faire couleur locale, je redescend me prendre de quoi manger et opte pour un fish’n’chips. Je crois bien que je rend perplexe Samjin devant ce choix, lui qui est habitué à fréquenter les stades de football anglais. Ce doit lui paraître aussi peu dépaysant que de commander un jambon beurre. J’apprend d’ailleurs qu’il a joué à un très bon niveau et qu’il y a encore un an, jouait en amateur dans l’équipe de sa ville. Un peu plus et il m’avouait avoir participé à la Ligue des Champions ou connaître personnellement Wayne Rooney.

Enfin, le match commence après un petit cérémonial. Le stade est quasiment plein et les supporters de Hawthorne et Collingwood, plutôt mélangés. D’ailleurs, on repère très peu de véritables groupes organisés et globalement l’ambiance est incroyablement calme et retenue. Par rapport à un stade de football, c’est incomparablement plus silencieux, et c’est peu dire. L’avantage est qu’on peut se concentrer sur le match sans être sans cesse dérangé par une ola. Par contre, il faut bien l’avouer, c’est assez terne. Samjin, en habitué, tente de se mettre dans l’ambiance en lançant des « Come on, magpies ! » mais la sauce ne prend pas. Les couleurs de Collingwood sont le noir et le blanc, d’ou le surnom donné à l’équipe de « magpie », la pie commune. Sinon, vous pensez bien que ça n’aurait aucun sens ce qu’il dit.

Comme Molly supporte Collingwood, nombreux sont les gens qu’elle a rallié à sa cause. Moi j’attends de voir qui va gagner. D’après notre guide, Hawthorne, banlieue plus fortunée, est favorite mais l’enjeu du match est essentiellement pour Collingwood qui peut, en cas de victoire, se qualifier pour la phase finale du championnat. Quelle tension. J’espère bien que vous vibrez avec cette mise dans le contexte.

En tout cas, le jeu est franchement divertissant, toujours en mouvement et avec très peu de temps morts. Je dois dire que les impacts me semblent beaucoup moins violents qu’au rugby sans doute car les joueurs ont moins de vitesse. De toute façon, la plupart des mouvements de ballons se font par des passes au pied, avec très peu de courses.

Pendant la moitié du match les équipes sont au coude à coude. J’en profite d’ailleurs pour repérer un joueur de Collingwood, répondant au joli nom de Harry O’Brien qui, comme son nom pourrait laisser croire, n’est pas un grand roux à tâche de rousseur originaire de Limerick ou de Galway, mais un grand black à rasta originaire de Rio de Janeiro. Comme c’est le seul black des 36 joueurs sur le terrain, c’est relativement facile de le reconnaitre. De plus, il marque un superbe but, histoire de se faire remarquer. Finalement, à partir du troisième quart temps, les choses se gâtent pour Collingwood. Les espaces sont font en même temps que se fait sentir la fatigue (parce que ça cavale, croyez moi) et la défense prend l’eau. Je me retourne et Molly semble de plus en plus déçu par la tournure des évènements.

Au coup de sifflet final, c’est un score proche de la fessée qui s’affiche au panneau principal, en faveur de Hawthorne. Nous repartons dans le calme, toujours dans une ambiance tranquille et conviviale. C’est un sport intense mais on ne peut pas dire que les supporters soient déchaînés ici.