Aussie conclusions

DSC_7823_DxOIl est temps de faire une petite pause photo et de prendre un peu de recul intellectuel sur ce mois passé en Australie, ne pensez vous pas ? Même si vous ne le pensez pas, je ne vais pas m’arrêter maintenant alors que je viens à peine de commencer ce nouveau billet (et peut être même que ce sera le dernier sur l’Australie, tiens, je vous livre un scoop). Non, c’est le moment de la réflexion, de la synthèse et du bilan. Puisque je vous le dis.

Parlons tout d’abord géographie. Je n’ai pas arrêté de le ressasser (je crois même avoir écrit une partie de billet à ce sujet) mais ce pays est vaste. Finalement, j’ai la sensation d’en avoir vu une fine tranche pas bien épaisse, contrairement au Vietnam voir, dans une moindre mesure, l’Inde, la faute au temps mais aussi à la faible densité de ce pays. Le paradoxe c’est que malgré ces étendues gigantesque, pendant très peu de moments ai-je eu une sensation d’espace. Mon explication à ce phénomène tiens à l’extrême platitude du terrain dans les zones immenses que j’ai traversé. On est toujours le nez au ras du sol. Pour avoir une sensation d’immensité, il faut que le regard porte loin. La seule fois où j’ai vaguement ressenti cela était au sommet d’un pont routier enjambant la Great Khan Railway au milieu de nul part. J’étais à tout péter à cinq mètres au dessus du sol.

DSC_7426_DxOSuis-je déçu par les paysages ? Honnêtement, un peu. Je m’attendais à plus grandiose mais peut être suis-je devenu difficile. Hormis Uluru et Kata Tjuta qui resteront gravés dans ma mémoire comme les lieux les plus uniques que j’ai jamais eu la chance d’approcher, les autres sites étaient fort jolis mais pas au niveau que je m’étais préparé. Parfois, il vaut mieux ne s’attendre à rien, finalement.

Il me reste également une grande frustration côté culture aborigène que je n’ai quasiment pas approché. La faute m’incombe sans doute. J’aurai pu après tout faire des efforts supplémentaires dans le domaine. Les cartes postales nous vendent un pays rouge à la culture millénaire où kangourous, didgeridoos, boomerangs et bushs entourent un sympathique aborigène à la barbe touffue. En vérité, la quasi-totalité de l’Australie que j’ai croisé était à mille lieux de ça, moderne, occidentale et avec une population venant des quatre coins du monde extérieur. C’est d’ailleurs plutôt cela qui m’a surpris. Je ne m’attendais pas à un pays aussi multiculturel que cela, surtout dans les grandes villes.

DSC_7075_DxOC’est encore plus marquant à Melbourne et encore plus à Sydney où une très grande partie de la population que l’on croise dans la rue est d’origine asiatique. En conséquence, j’ai pris conscience de l’ancrage profondément asiatique de l’Australie. Ce n’est pas qu’un partenaire économique, c’est également en train de devenir un berceau culturel comme l’Angleterre l’a été. Toutes les cuisines asiatiques se trouvent dans la moindre petite ville : thaï, vietnamienne, chinoise, indonésienne, philippine, malaysienne.

DSC_6888_DxOD’ailleurs, puisque je parle de bouffe, je peux vous affirmer que pendant ce mois ici, je n’ai pas eu à me plaindre d’elle. Hormis, un prix parfois un peu exagéré à Darwin et Alice Springs, je n’ai eu que des bonnes expériences avec des mentions spéciales pour cet incroyable potage aux châtaignes d’Apollo Bay et les plats du jour de Fitzroy à Melbourne. Non, la seule véritable faute que j’ai commise a été de commander ce fish’n’chips au MCG avant le match d’aussie footbal. Rien que d’y penser, j’ai les doigts gras.

Pour revenir à des sujets plus profonds, l’économie, ce lien asiatique, notamment vis à vis de la Chine, est à double tranchant. Comme je l’ai dit dans un précédent billet, le pays a bénéficié longuement du boom économique chinois en tant qu’important fournisseur de matière première. Lorsque l’économie chinoise ralentie, l’Australie en ressent immédiatement les conséquences. Encore une fois, en pleine campagne électorale pour le nouveau premier ministre, le sujet est brûlant, le citoyen australien étant maintenant obligé de se serrer un peu la ceinture, ce qui n’était pas arrivé depuis une bonne dizaine d’années.

DSC_7749_DxOL’autre sujet politique brûlant, concerne l’immigration illégale. Je n’en avais pas conscience mais il y a encore une très forte immigration clandestine arrivant en Australie par bateau, comme à l’époque des boat-peoples vietnamiens, notamment vers Darwin car c’est la ville la plus proche du Timor. Sans surprise, le sujet est aussi épineux et polémique qu’en France ou plutôt comme en Italie qui voit arriver des bateaux directement sur les plages de Lampedusa. En Australie, la grande proportion des immigrants échouent sur les îles Christmas, petit territoire australien 400km au sud de la pointe ouest de Java.

De ces deux sujets, j’ai longuement discuté avec Romain, Veronika mais également Adam, mon guide à Kakadu ou les deux petits vieux croisés à Mount Gambier. Paradoxalement, Veronika était la plus extrême dans ces jugements. Pour Adam, l’immigration fait parti, comme aux Etats-Unis, des gênes australiens, lui même étant d’origine écossaise (son nom de famille est McRae, comme Colin). Je n’ai pas eu l’impression qu’Adam était raciste mais il a quand même dit quelque chose que je trouve assez intéressant et qui mérite réflexion. Même si on n’est pas d’accord, il est toujours rafraîchissant de sortir de la pensée unique portée par les médias, chacun dans son propre pays.

DSC_6342_DxOCette curieuse réflexion portait sur le multiculturalisme australien qui est effectivement incroyable, notamment avec un énorme apport des différentes nations asiatiques et européennes. Bien que ce soit formidable de pouvoir, par exemple, goûter à toutes les nourritures du monde, du fait d’une culture australienne native faible (en sachant que la culture aborigène est vraiment à part), on se retrouve là bas avec une sorte de mélange ou d’une panoplie de cultures à poids plus ou moins équivalent que l’on peut choisir « à la carte » avec la conséquence inattendu que ce n’est plus, du coup, de la culture. Si je reprends les mots d’Adam, cela donne : « quand il y a trop de cultures, il n’y a plus de culture ». Vous avez quatre heures pour développer sur ce sujet. Pendant ce temps là, je poursuis.

DSC_7259_DxOPendant les trois semaines suivantes, ce qu’il a dit a trotté dans ma tête et c’est avéré exactement ce que j’ai ressenti, une sorte de vide culturel (bien que beaucoup moins que dans certains endroits de Californie que j’ai eu la chance de visiter il y a quelques années) dans un pays pourtant riche en diversité. La culture, tel qu’on l’entend en France et tel qu’Adam l’entendait, n’est elle pas finalement un sous-produit d’une homogénéité de comportement ? Il ne s’agit pas ici de conclure à un côté négatif ou positif du multiculturalisme, mais juste de lever un sourcil d’étonnement aux possibles conséquences.

Ça me paraît opportun d’introduire maintenant un paradoxe que je me suis amusé à constater en tant que touriste occidental. Lorsqu’on voyage, on aime d’autant plus un pays qu’il a une culture et une tradition marqué alors que lorsqu’on est chez soi, on ne souhaite qu’une chose, avoir le choix et ne pas être enfermé dans le traditionnel. Finalement, le multiculturalisme, il faudrait l’interdire aux autres.

DSC_7813_DxOSinon, l’Australie, ben j’aurai plein de trucs à dire mais en rapport à mon séjour en enfance car ces derniers jours à Sydney ont réveillé plein de souvenirs. Pensez, c’est le pays où j’ai découvert McDonald’s, les muffins, les crumpets, les kiwis (le fruit), les fruits de la passion, les ornithorynques et le duo Marmite et Vegemite, le tout bien avant que cela n’arrive en France (d’ailleurs dans cette énumération, deux de ces choses ne se mangent pas. Allez, jouez). Ça marque.

Allez, pour finir, de la musique (je vous épargne un zapping sans intérêt). La première, c’est l’hymne national officieux du pays, Waltzing Matilda et parce qu’on aurait tort de ne pas s’offrir de la qualité, voici une version rocailleuse interprétée par Tom Waits, qui lui, est américain (je brouille les cartes):

Et bien entendu, un grand classique de Men at Work :

G’day à vous !

 

PS : Si vous êtes particulièrement d’humeur badine, diverses photos (polluent) agrémentent ce billet. Saurez-vous retrouver dans quel lieu d’Australie elles ont été prises?

Romain et Veronika

J’étais arrivé à Sydney un samedi après midi. Le samedi soir je retrouvais Romain et sa femme, Veronika, que je ne connais pas, à l’intersection d’Oxford street et de Crown street. Depuis mon départ, ce sera la première fois que je croise quelqu’un que je connais.

Pour bien situer le personnage, j’ai croisé Romain lors de ma période chalonesque. J’étais ingénieur de recherche et vaguement donneur de cours. Il était étudiant en stage puis au mastère. Après plusieurs années à Paris et Marseille à se faire licencier par des boites d’effets spéciaux en difficultés financières, il accepte un poste à Sydney dans une grande société du domaine. Ça doit faire maintenant plus de cinq ans qu’il y est. Pour vous dire à quel point c’est parti pour être du temporaire qui dure, il s’y est marié.

C’est donc à la nuit tombée, assis au coin de la rue, que je vois arriver le Romain, toujours portant bouc, et orné d’une superbe casquette et veste en cuir digne des pionniers de l’automobile. A ses côtés, souriante, Veronika, petit bout de femme indonésienne d’origine chinoise. On se serre la main et se fait la bise, chaleureusement. Ça fait bien plaisir de le revoir après toutes ces années d’expérience hors de France. Après quelques minutes de marche, on se pose dans un bar pour boire un verre et entamer sérieusement les retrouvailles.

C’est toujours amusant de voir comment de jeunes étudiants innocents, quelques années plus tard, se retrouvent plein d’assurance, les idées un peu plus arrêtés sur certains points voir un poil plus cynique. C’est d’autant plus le cas que Romain avait à l’époque de son passage à Chalon-sur-Saône un enthousiasme et une certaine naïveté qui faisait plaisir à voir.

Nous poursuivons dans un restaurant thaïlandais et c’est l’occasion de faire un peu plus connaissance avec Veronika. J’apprend notamment que la population indonésienne est constituée d’une minorité d’origine chinoise, souvent propriétaire d’entreprises ou de commerces. Régulièrement, des vagues de xénophobie à leur encontre provoquent des tensions voir escaladent en de véritables pogroms. C’est à l’occasion d’un de ces pics de violence que les parents de Veronika décidèrent d’envoyer leur deux filles et leur fils poursuivre leurs scolarités en internat à Hong-Kong, puis plus tard, leurs études à Sydney alors qu’eux restent en Indonésie. Du coup, Veronika parle un anglais parfait mais également le cantonais et, pour être encore plus polyglotte, c’est mis au français, avec un résultat étonnant. Elle insiste d’ailleurs pour que nous discutions en français pour la faire travailler. Résultat, nous mélangeons allègrement la langue de Shakespeare et de Molière.

Ce qui est très intéressant c’est de confronter les points de vues de Romain et Veronika sur la situation particulière en Indonésie. Alors que Veronika a une vision très négative des indonésiens, les considérants presque dans leur majorité comme fainéants, Romain a une attitude très classique pour un français qui consiste à tempérer et à chercher des excuses / explications sur la situation. Quand à moi, je m’abstiens de tout jugement, ne connaissant absolument pas le dossier. Néanmoins, sans surprise j’apprend que l’Indonésie est gangrénée par la corruption.

A la fin de la soirée, nous nous quittons en nous donnant rendez vous pour le lendemain, pour ce qui est de Romain. Rappelez-vous, c’est le dimanche à Bondi. Le lundi, je dois retrouver le couple chez eux pour y être gentiment hébergé jusqu’à mon départ le vendredi. Bien qu’il faisait plutôt doux et chaud dans la journée, la nuit, il fait presque frais. J’en profite donc pour commencer tout doucement à attraper froid.

Le lundi, alors que je me ballade du côté de Rose bay, je m’arrête à un marchand de vins, histoire de venir avec quelque chose à partager chez mes hôtes du soir. Je profite de la présence d’un vendeur pour demander un Gewurtztraminer. D’une part, j’aime bien mon Gewurtz, mais en plus, Romain étant alsacien, je prévois de lui arracher une larme de nostalgie. Contrairement à ce que j’imaginais, le vendeur ne se démonte pas et, ouvrant une armoire climatisée, me tend une bouteille. Allons bon, c’est quoi ces histoires ? Il est australien votre gewurtz, monsieur ! Oui, oui, on en fait ici, également. Je ne suis pas un grand spécialiste mais je suis tout même bien étonné qu’ils emploient la même dénomination. Curieux, j’accepte la bouteille et l’amène avec moi pour le soir.

DSC_7836_DxOAprès un trajet en bus de la gare centrale, je descends à Maroubra Junction, non loin de l’appartement de mes hôtes. Le quartier est assez excentré du centre ville mais possède néanmoins une grande quantité de commerces. Ici, les immeubles sont plutôt bas, pas plus de trois ou quatre étages. Un bon deux kilomètres vers l’est se trouve Maroubra beach, une grande plage nettement moins couru que Bondi surtout DSC_7834_DxOlorsqu’on y va au milieu de la semaine.

Après quelques hésitations, je trouve l’adresse et est accueilli par Veronika. J’avais été prévenu, l’appartement est encombré de cartons, . D’ici quelques semaines, ils déménageront dans leur maison qu’ils ont acheté il y a quelque temps plus à l’ouest. D’ailleurs, histoire de rester en famille, l’appartement qu’ils louent appartient au frère de Veronika. Un peu plus tard Romain rentre et je sort la bouteille. On rigole et Romain part à la recherche d’un tire-bouchon. On se verse des verres. On goutte.

Bon. Moi j’ai une idée très précise de ce que doit être un Gewurtztraminer que je conçois plutôt comme un vin demi-sec penchant vers le doux qui se boit en traitre comme du jus de fruit. Ici, nous avons plutôt affaire à un vin sec, tendance bourgogne aligoté. Rien à voir. Après, ce n’est pas mauvais non plus. Ce n’est pas aujourd’hui que j’arracherai une larme de nostalgie à mon alsacien.

Je resterai donc quatre nuits chez Veronika et Romain, partageant le soir leur repas souvent concoctés par la première qui prend un grand plaisir à découvrir la cuisine française. Pour faire bonne mesure, l’avant dernier soir, je me colle aux fourneaux et leur bricole un seau de lasagne de mon cru. Pour finir, la veille de mon départ, ils m’amènent à un petit restaurant populaire indonésien, histoire de me faire découvrir cette cuisine. Pas mal.

Au rayon culinaire, c’est d’ailleurs chez Veronika et Romain que je goute pour la première fois au fruit à la plus effroyable réputation, le durian. Pour ceux qui ne connaissent pas la-dite réputation de ce met, sachet qu’il est autant haï qu’il est adoré. Certains ne jurent que par lui, sa saveur et son odeur unique alors que les autres ne ressentent que répugnance et dégoût pour le fruit. Soyons franc, c’est extrêmement difficile d’en décrire le goût si ce n’est que c’est justement, indescriptiblement, à la limite du dégueulasse. On s’attend à quelque chose de doux et sucré. Ce n’est certainement pas sucré mais en ne peut pas nier qu’il y ait une certaine douceur, à la manière d’une « vache qui rit » pourrissante. Si vous vous ôtez de la tête que c’est un fruit, que vous parvenez à faire le vide au prix d’un effort mental de bonze tibétain, l’expérience passe nettement mieux. Sinon, attendez vous à des réflexes nauséeux. Etant particulièrement doué pour faire le vide dans ma tête, je suis parvenu à en manger deux morceaux tout en y prenant un certain intérêt la deuxième fois. La troisième par contre eu été de trop. Bien entendu, Veronika gobait cela comme si c’était des moitiés d’abricot avec de grands « mmmmh » alors que Romain soutenait que c’était super bon, tout en avouant, l’hypocrite, que, certes, l’apprentissage est difficile. Pour vous dire à quel point ce fruit est étrange, il est interdit d’en amener dans certains lieux publics en Asie, de peur d’indisposer certaines personnes.

En tout cas mon séjour chez ces deux exilés fut fort intéressant notamment grâce aux discussions que nous avons eu avec Veronika. Indéniablement, sa culture chinoise amène à des façons d’envisager certaines choses de manière notablement différente. Voilà qui est bien vague, vous dites-vous. Je le conçois. Pour avoir discuter du rôle et de la place de la famille avec elle, par exemple, je retrouve certains points communs avec la culture vietnamienne. Je retrouve également cette importance et ce respect fondamental pour les études, non pas comme un moyen d’épanouissement intellectuel ou comme voie menant vers un métier qui nous passionne mais comme un moyen pragmatique d’ascension social et de confort financier. En cela, c’est sans doute moi qui me fait des illusions, étant habitué à travailler dans des milieux de passionnés. D’ailleurs, ces frères et sœurs ont tous fait des études supérieures pragmatiques, elle étant experte comptable. Ce n’est pas dans ces familles d’origine chinoise ou vietnamienne qu’on verra des musiciens ou des poètes, ça j’vous l’dit ! Tas de fainéants, prenez exemple !

Pour changer de sujet, avec ces rafraichissements le soir, je crois bien que j’ai attrapé un mal de gorge carabiné.

A la recherche du temps perdu

Un peu plus tard dans la semaine, je décide d’aller faire une nouvelle excursion dans le passé. Après avoir revu mon ancienne école, je vais faire le tour des anciens lieux où nous avons habité. Bien qu’ayant passé que deux ans et demi à Sydney, nous avons emménagé trois fois. Les raisons en sont sans doute bassement techniques mais ce qui est fou c’est que de nombreux adultes crieraient comme des porcs qu’on égorgent à l’idée de déménager aussi souvent alors que moi, enfant, ça ne m’a pas du tout dérangé. Relativisons néanmoins. Je suis à peu près convaincu que les déménagement ont été réalisés par des professionnels, pouvoir d’achat d’expatrié oblige. C’est tout de suite beaucoup moins traumatisant. Moi, à six ans, je ne devais pas beaucoup participer non plus.

Lorsque j’ai évoqué auprès de Romain la liste des quartiers où nous avions séjourné, il m’a tout de suite gratifié d’un « ben mon salaud, vous vous faisiez pas chier », ou quelque chose d’approchant. On ne se logeaient pas dans des HLMs, pour sur. Enumérer les quartiers de Rose Bay, Elizabeth Bay et Woollahra à un habitant de Sydney doit ressembler au triptyque Neuilly – Auteil – Passy des habitants de Paris. Expatrié pour un grand groupe industriel français, à cette époque, c’était la belle vie. Malheureusement, nous n’avions pas de domestiques et croyez bien que je le regrette.

Au niveau géographique, ces quartiers haut de gamme sont tous situés en bord de baie, entre Sydney Cove et Bondi, côté sud de la baie. De toute façon au nord, je ne sais pas ce qu’il y a. Comme le relief est très vallonné de ce côté là, vous imaginez bien que le top du top consiste à posséder une maison avec piscine légèrement en hauteur mais néanmoins proche de l’eau afin de bénéficier d’un accès commode à son bateau. Avoir un bateau, c’est la base ici, enfin. D’ailleurs, mes parents, en avait un. Vous sachant jaloux, le but du jeu de ce billet et de vous écoeurer par un débordement indécent de richesses, vous l’aurez compris. Bon néanmoins, mon honnêteté intellectuelle m’oblige à préciser que ce bateau était en co-propriété avec deux autres couples d’amis et qu’il ressemblait à un jouet en plastique blanc et vert à moteur (mais avec une mini cabine) d’environ cinq mètres de long. N’empêche qu’avec ça, on peut aller explorer toute la baie et même attraper le mal de mer.

DSC_7699_DxOC’est donc un matin que je part à pied à la découverte de tout ces lieux, en commençant par le quartier de King’s Cross. King’s Cross c’est une sorte de mélange entre Pigalle pour les sex shops et Castro pour les revendications LGBT (Lesbienne, gay, bisexuel et transsexuel) saupoudré de junkies le soir. En journée, c’est plutôt tranquille et coloré avec un mélange de magasins, bars et d’habitations. Je remonte une rue en direction de la baie et redécouvre une DSC_7700_DxOfontaine en forme d’aigrette de pissenlit. Encore un souvenir qui se concrétise. Je regarde autour de la fontaine pour tenter de retrouver un petit musée de cire dont j’ai le souvenir pour y avoir été traumatisé par des scènes d’attaques de requins. Peine perdu, je dois me tromper. En tout cas cette fontaine est pour moi emblématique du Sydney de mes six ans. Grâce à Wikipédia, trente ans plus tard, je découvre que c’est un mémorial de la bataille d’El Alamein pendant la Seconde Guerre Mondiale.

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Je continue plus loin et retrouve la rue de notre première demeure, Elizabeth Bay road. Après un peu de marche je m’arrête devant le numéro. Sans soucis, je reconnais le parking de l’immeuble, situé sur le toit. En effet, l’immeuble est à flanc de colline et la rue au sommet. Autour, les habitations sont plutôt jolies même si ça n’évoque pas forcément le luxe. On est plutôt à Saint Cloud qu’à Auteil. Non, le véritable intérêt de cet appartement réside dans le parc et la baie juste en dessous. J’emprunte donc un escalier et me retrouve au pied de l’immeuble face à Rushcutters Bay. Comme dans toutes les petites baies qui constellent ce coin de Sydney, elle abrite une foultitude de bateaux. Des cours de tennis agrémentent le tout, précisément comme je m’y attendais.

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DSC_7741_DxOFinalement, je quitte ce charmant parc et reprend de l’altitude. Prochaine étape, les hauteurs de Woolhara. Sur ces rues à proximité du nœud de transport de Bondi Junction, les habitations sont plus hétéroclites. Je croise à la fois des immeubles en briques et des petites maisons aux ferronneries si typiques de l’Australie. Par contre, les commerces sont rares hormis un petit centre commercial. DSC_7746_DxOJ’emprunte finalement Edgecliff road et le décor devient plus cossue et boisé. Les eucalyptus et les arbres exotiques (ce qui est une façon discrète d’indiquer que je ne connais pas la marque) bordent la rue. Au numéro prévu, je reconnais sans soucis notre troisième et dernière habitation, une très jolie town house, c’est à dire un immeuble en pente, blanche à flanc de colline. Avec culot, je rentre dans la résidence, non fermée, histoire d’entre-apercevoir l’appartement et le jardin que je sais être en contrebas. Pour l’appartement, c’est peine perdue mais j’atteins sans être héler le jardin et l’accès à la piscine commune derrière une porte vitrée. De nouveau, hormis les proportions, tout semble identique. Tiens, non, maintenant que j’y pense. Je n’ai toujours pas entendu un seul kookaburra depuis que je suis ici alors qu’on en avait régulièrement dans ce jardin.

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Dans le doute, mais sans vouloir vous sous estimer, je précise que les kookaburras sont des oiseaux typiquement australiens (et sans doute unique à l’Australie comme quasiment toute la faune) dont le chant ressemble à un rire. Comme le dit la chanson, « laugh, kookaburra laugh under the old gum tree ». Là, c’est une bonne pleine tranche de culture australienne populaire que je vous donne. Tenez, pour une playlist typique, vous pouvez vous enchainer the Kookaburra Song, G’Day et Waltzing Mathilda le tout en plaçant un nuage de mouches autour de votre tête histoire de vous croire dans le bush.

DSC_7753_DxOMais revenons à mes moutons. Après quelques instants de méditation, je quitte la résidence et reprend ma route pour mon troisième arrêt, Rose bay. Je précise que je fais tout ceci à pied. D’ailleurs, ça commence à se ressentir. Quelques temps plus tard, je suis redescendu au niveau de la mer et longe un grand terrain de golfe. Tout de suite, ça pose le standing du quartier. Au bout, j’atteins une nouvelle baie, Rose bay.

DSC_7754_DxOCette fois-ci, une rue longe le front de mer mais surtout, les maisons ici sont hyper luxueuses. Grandes baies vitrées sur design épuré. Je traverse la rue et me dirige vers la marina où nous ancrions notre bateau. Ici se concentrent des souvenirs de départs pour des dimanches ou samedis entre amis, glacières remplies de salades et sandwichs, en t-shirt et maillot de bain pour une anse ou plage encore inexplorée de la baie. DSC_7752_DxOEn tout cas, pour un enfant de six-huit ans, ça avait un petit parfum d’aventure. De plus, l’endroit abrite quelques pélicans, ce qui n’est pas commun dans nos contrées. Ça change des canards et des mouettes.

Pour le coup, j’ai du mal à reconnaître les lieux. Globalement, je me repère mais les bâtiments on changé. Surtout, comme pour les deux autres lieux, je me rend compte que ma mémoire est très sélective. Chaque souvenir est isolé et j’ai du mal à replacer les choses relativement les unes aux autres. Tenez, par exemple, je suis infoutu de retrouver la direction de la rue où nous habitions, Beresford road. Je suis obligé de m’abaisser à demander ma direction à une dame qui doit s’en remettre à son smart phone pour m’aider.

Je rebrousse donc chemin et m’engage dans la rue. Il doit y avoir une erreur. Les maisons ici sont d’un standing inatteignable. Je poursuit en m’éloignant de la baie et deux cent mètres plus loin, DSC_7758_DxOreconnais notre ancienne maison. Tout autour ne sont garés que de gros SUV et 4×4. Ben merde alors. Si j’avais su j’aurais demandé une augmentation de mon argent de poche. La rue est extrêmement boisée et trois rues plus loin, j’aperçois le terrain de golfe. Pas mal. Derrière la maison, une colline domine la baie. Je monte un escalier pour tenter d’apercevoir le jardin d’en haut, sans grand résultat. Finalement, je repart en continuant mon ascension.

DSC_7773_DxOPlus haut, ça devient l’orgie immobilière. Je croise des résidences incroyables, notamment de certains consuls. Rien d’étonnant lorsqu’on voit la vue. Un peu plus loin je remonte le long d’une école privée réservée aux garçons, chacun en uniforme identique quelque soit l’âge. Il y en a même habillés en treillis militaire assemblés sur le terrain de sport. Ça sent l’école privée sélective à plein nez.

A la vue de toutes ces riches maisons, jai d’autres souvenirs qui remontent de goûtés d’anniversaire chez le consul libanais, un drapeau orné du cèdre vert au fond d’un couloir alors que je cherchait les toilettes (c’est fou parce que depuis, j’ai une affection toute particulière pour le Liban. Oui, bon. Ça mais également car j’étais pris d’affection pour la fille du consul). Je vous rassure, j’ai également des souvenirs de fêtes d’anniversaire beaucoup moins glamours mais tout aussi amusants chez McDonald’s. Mais j’en mettrais ma main au feu, je crois bien que mon empreinte libanaise a eu lieu dans ce quartier.

En tout cas, à l’époque, indéniablement, on savait vivre. Je ne vous parle même pas des gens de qualité que nous fréquentions.

Bondi

Si vous êtes un peu versé dans le surf, ou tout simplement doté d’une flatteuse connaissance géographique, vous n’êtes pas sans savoir qu’à Sydney, on trouve de nombreuses plages. Ceux qui répondent à l’un des deux critères précédents doivent me voir venir à des kilomètres, surtout au vue du titre de ce billet. L’une des plus célèbres, si ce n’est LA plus célèbre, voir la SEULE connue (j’arrête les majuscules, ça me donne mal à la tête de les lire) est Bondi beach.

Petite précision, on prononce pas cela à la française « bondi » comme dans « petit » mais à la je ne sais pas quoi en y rajoutant un peu d’ail au bout pour que ça donne « bondaï ». Pour être tout à fait précis, la formulation correcte selon les critères autochtones serait plus particulièrement « bond » comme dans « James Bond » suivi de « aïe ». Tout ceci est extrêmement important. Je suis là pour vous faire voyager. Faudrait pas prendre ça à la légère car vous seriez capable de vous ridiculiser lundi matin à la pause café en parlant de « bondih bitch ».

DSC_7680_DxOBondi beach donne sur l’océan Pacifique ce qui est, encore une fois, une façon anthropocentriste de dire que le Pacifique lèche Bondi beach. Hors, ce n’est pas la seule à Sydney. Tout le côté orientale de la ville est ponctué de plages, des grandes et des petites, en arc de cercles voir au fond de petites criques charmantes. Il se trouve que Bondi est une des plus grande, notamment du côté sud de la baie (là où tout ce qui vaut d’être vu ce trouve, je dirai, en m’avançant un peu vu que je n’ai pas foutu les pieds au nord depuis 30 ans) mais elle est surtout connu car c’est un bon spot de surf et parce qu’on y trouve les historiques « lifeguards » avec leur ridicule bonnet de bain. C’est bien d’ailleurs la seule chose ridicule chez eux, car hormis cela, ils sont dotés de physiques et d’aptitudes sélectionnés de manière drastique. Un jour plus tôt, un jeune de 17 ans est mort en se préparant aux épreuves de sélection. Et dire qu’on trouve que l’entrée à l’ENA est sélectif.

Ces « lifeguards » sont là pour protéger les gentils baigneurs et surfeurs de moult dangers, notamment du requin au regard vide et morne mais également à la lippe molle car il a toujours la bouche entrouverte. Je dis ça mais en me relisant je me rend compte que c’est complètement débile. Ce n’est pas un « lifeguard » qui va protéger qui que se soit d’un requin. Au mieux, il ramène votre tronc amputé des deux jambes dare-dare à la plage. Non, il est surtout là pour sauver des noyades et siffler au soupçon de présence de squale en tout genre mais tout ceci, depuis 1913, excusez du peu. Je ne précise même pas que ce ne sont pas les mêmes depuis 1913 sinon ce serait extrêmement condescendant.

Mais Bondi, c’est également le quartier autour et derrière la plage. Ce dimanche, deuxième jour à Sydney, nous avons décidé avec Romain (que j’avais finalement vu la veille au soir avec Veronika, sa femme, mais je vous en narrerai les détails plus tard) de passer la matinée à longer la côte en partant de la célèbre plage. Nous nous retrouvons tout les deux à Bondi Junction, un nœud de transport mais également un grand centre commercial (je sais qu’il y en a que ça intéresse de savoir cela), pour ensuite prendre le bus vers Bondi beach.

Faire cette balade un dimanche, c’est l’assurance d’avoir un petit bain de foule. Fort heureusement, c’est loin d’être la cohue et c’est même particulièrement vivant. De plus, la météo a décidé de nous faire plaisir : 25°C et franc soleil sous un ciel bleu profond. Ici, c’est déjà l’été. On comprend ensuite pourquoi l’Australie souffre d’un nombre important de cancers de la peau.

DSC_7681_DxODans le rayon « lieux dont je me souviens », Bondi beach tient le haut du pavé. A ceci, une raison très simple : mon école se trouvait un peu plus loin sur les hauteurs. Nous y allions donc de temps en temps et notamment dans une pizzeria qui faisait une pizza aux fruits de mers à tomber. Les souvenirs d’enfant ne sont absolument pas hiérarchisés. Je ne suis pas allé vérifier si elle existait encore. En tout cas, je me souviens parfaitement de ce croissant de sable entouré de hauteurs couverts de maisons et habitations qu’une rue sépare de magasins et restaurants. Autre souvenir très précis, la piscine à un bout de la plage alimentée en eau de mer, toujours présente et même rénovée.

DSC_7682_DxOEn ce magnifique dimanche de fin d’hiver, des gens se baignent et des surfeurs attrapent les quelques vagues en combinaisons néoprène. Mais Bondi, c’est également le lieu à Sydney dédié au culte du corps. Toute proportion gardé, ça n’a rien à voir avec Venice beach, à Los Angeles. Non, ici c’est moins extravagant même si c’est un endroit pour voir et être vu, surtout si on est jeune, beau et musclé. A Melbourne la culture et l’art, à Sydney les biceps, le surf et la plage. Je caricature, bien entendu.

Une foule de badauds se promène le long du front de plage ou du front de mer en empruntant le fameux chemin que nous allons suivre. La côte ici est plutôt rocailleuse et de petites falaises dominent l’océan. Les plages sont situés dans de vastes anses comme Bondi ou dans de plus petites criques. L’eau y est d’ailleurs magnifique.

DSC_7685_DxOOn peut comme cela marcher sur plusieurs kilomètres au dessus de l’océan pour ensuite redescendre vers une nouvelle plage, successivement Tamarama, Bronte, la minuscule Clovely puis Coogee, la cousine par la taille de Bondi, au sud. Encore un peu plus loin, on peut rejoindre la grande Maroubra. Tout ceci est bordé de maisons et petits appartements, les environs étant extrêmement courus, bien évidemment. D’après Romain, l’immobilier est hors de prix par ici et j’ai une pensé pour Adam, mon guide à Kakadu, ainsi que Nick et Jane, les deux néo-z rencontré là bas, qui ont tous les trois une maison par ici.

DSC_7683_DxONous continuons notre très agréable promenade en papotant, Romain ayant maintenant un très bon aperçu de la vie australienne. Ça fait déjà cinq ans qu’il y est, même si côté accent, c’est encore un peu frenchie (Romain, ne prend pas ça personnellement). Arrivé à un nouveau promontoire où se trouve un petit monument, j’aperçois un grand gaillard appuyé sur un bloc rocheux, prenant le soleil, les yeux mi-clos. Intrigué, je m’approche. Pas de doute, je reconnais Samjin, l’anglais d’origine bosniaque de Stoke-on-Trent, rencontré à Melbourne pendant ce fameux pub crawl. Hey ! Je lui sert chaleureusement la main et lui présente Romain. Il est arrivé à Sydney hier soir et est hébergé à Bondi par des amis à sa sœur. C’est sa première sortie dans la ville et je lui propose donc de se joindre à nous pour poursuivre la ballade.

DSC_7684_DxOC’est donc maintenant en trio que nous bavardons, notamment de politique australienne, la campagne pour l’élection du premier ministre étant toujours en cours, tout en suivant le chemin. Pour changer, nous longeons un club de lawn bowling, où de vieux messieurs (et des moins jeunes personnes des deux sexes) s’amusent à ce jeu proche de la pétanque. Parce que cela a été inventé par les anglais qui ne sont pas les derniers pour inventer des règles tordues, le lawn bowling (littéralement le bowling sur pelouse) se joue avec une grosse boule non sphérique à la trajectoire hasardeuse. Avec la mer et le soleil, c’est tout un parfum colonialiste anglais qui se dégage.

Finalement, nous redescendons de nouveau vers une grande plage semblable à Bondi, en plus modeste néanmoins, mais également longée par une rue où se massent des restaurants et des cafés. Voici Coogee beach. Il est juste midi et je suggère d’aller manger une pizza, histoire de profiter un peu de cette ambiance estivale. On se décide sur un restaurant italien et, dans un soudain changement d’humeur, je commande des spaghettis bolognaises (et non pas gabonaises comme me le suggère idiotement mon correcteur orthographique). Ça faisait très longtemps que je n’avais pas parlé de nourriture, tiens. Vous allez finir par croire que je ne me sustentait plus. En tout cas, tout ceci est un cul de sac narratif car les spaghettis n’ont absolument aucune espèce d’importance dans ce qui va suivre.

Une fois rassasié en cette bonne compagnie, nous repartons en sens inverse, toujours le long du chemin côtier. C’est une fois revenu à Bondi beach que nos chemins se séparent. Romain s’en retourne chez lui, non sans m’avoir invité à passer mes quelques nuits restantes chez Veronika et lui, alors que Samjin poursuit plus au nord. Quand à moi, j’ai un but, retrouver mon ancienne école et clore ainsi le chapitre Bondi par un brin de nostalgie. Ou pas, finalement.

Je tente de me repérer et de rassembler mes souvenirs pendant quelques secondes. Ma mémoire me souffle qu’il faut que je monte sur les hauteurs, l’école dominant la mer à bonne distance de la plage. J’ai une vision d’une rue qui descend vers la plage au sud. Je regarde autour de moi et aperçoit deux candidates, dont une qui monte plus fort que l’autre mais surtout qui se nomme « Bondi road ». Ça me paraît pas mal. Je l’emprunte.

DSC_7695_DxOAprès une montée un peu raide, la rue se poursuit en ligne droite dans un long faux plat montant. Des commerces de chaque côté ne m’évoquent rien. En même temps, en trente ans, il peut se passer beaucoup de choses. Je continue à suivre la rue même si j’avais souvenir que l’école était vraiment proche. Je me raisonne en me disant que je faisais le trajet à l’arrière d’une voiture. Aujourd’hui, je suis à pied.

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DSC_7690_DxOFinalement, un panneau indicateur accroche mon regard : « Bondi Public School ». Je suis la direction dans une rue perpendiculaire et quelques dizaines de mètres plus loin, m’arrête. Damn, je reconnais ce bâtiment derrière cette grille. Même s’il est plus petit que dans mes souvenirs. Je ne nierai pas qu’une certaine émotion s’est emparé de moi, même si elle n’était pas d’une violence extrême. Je poursuit en longeant la grille pour finalement atteindre l’entrée principale. Deux jeunes adultes jouent au basket à l’intérieur et une jeune mère accompagné de son petit garçon discute avec une autre femme plus loin. Dommage pour la discrétion. Je vais passer pour un pervers à roder autour d’une école primaire.

C’est toujours assez étrange de voir des bâtiments de longues années après. Dans l’ensemble rien ne s’est transformé alors que des détails ont changés. On est presque vexé que les choses DSC_7693_DxOchangent en notre absence. Ou alors, pour faire une phrase facile et creuse, c’est nous qui changeons. Certes, tout paraît plus petit mais indéniablement, certains bâtiments ont été restaurés, d’autres construits ou les panneaux de baskets posés. Ce n’est pas que moi. Finalement, je suis un peu déçu quelque part. Ça me paraissait plus grandiose, plus inquiétant. Quel est l’intérêt de revenir, finalement, hormis de remettre les choses en proportion, de combler des trous, d’affiner les souvenirs ou de se retourner pour replacer tout ceci dans un contexte plus large. Comme dans un film, j’ai des flashs de moi dans la cour, là bas, DSC_7694_DxOjouant à chat perché ou sortant d’un atelier de menuiserie de ce bâtiment au fond, ou encore de la voiture de ma mère, une Mazda 323 grise, m’attendant sur le trottoir.

Au final, je n’ai aucune nostalgie. Ce qu’il y a à faire m’intéresse plus. Je prend quelques photos discrètes pour la famille et repart vers Bondi Junction, sans me retourner. En chemin, je repense quand même aux institutrices et camarades de cette époque. Et dire que j’étais en uniforme gris, là bas. Pfff.

Sydney CBD

DSC_7660_DxOJe crois qu’il y a quelque chose de biaisé dans le constat que je m’apprête à faire. Attention, c’est d’une grande généralité mais, avec toutes les pincettes dont je peux me fournir, je trouve, moyennant les précautions d’usages, que le centre ville de Sydney, soit le fameux CBD (Central Business District selon la terminologie australienne, je vous rappelle), est bien… il est drôlement inintéressant.

DSC_7821_DxOAttention, attention. Si vous n’avez jamais vu de ville avec de grands gratte-ciels en verre à l’américaine, allez-y, régalez vous. A part cela, c’est certes photogénique lorsqu’on lève le nez en l’air, surtout si vous aimez l’architecture moderne (moi, par exemple, je suis un grand amateur de ciels bleus nuageux se reflétant dans les immeubles en verre) mais force est de constater qu’au niveau du sol, on y trouve essentiellement des banques, des assurances ou des magasins de luxes. Je caricature énormément. En tout cas, je trouve le CBD de Sydney froid, distant et, sans être anarcho-communiste à tendance bolchévique dur pourfendeur du grand capitalisme, fort distant de certaines de mes valeurs qui fluctuent un peu en fonction de mon humeur autour d’un point vaguement central. J’m’y sent pas chez moi, quoi.

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DSC_7668_DxOPour faire encore plus simple et totalement dans l’émotionnel au premier degré, ça a le goût et l’odeur de Wall Street sans en avoir l’attrait sulfureux. Si on exclu les banques, j’ai toujours un certain sentiment d’écoeurement en voyant tous ces mégas magasins ultra lisses et clinquants dédiés à des marques d’ultra luxe ou ces voitures haut de gammes d’où sortent des messieurs aux costumes trois pièces dénués d’imagination (en tout cas, à première vue, vestimentaire). Ça fait parti de mes paradoxes d’admirer le travail sans concession DSC_7675_DxOnécessaire à la création de ces admirables produits alors que je suis rempli de réprobation quasi méprisante pour les gens qui les achètent. En vous disant tout cela, je sais que je ne suis pas du tout objectif. Bien que le CBD de Melbourne héberge également des grandes corporations financières et des magasins de grand luxe, il y a un côté arty culturo-trash que je trouve sympathique. Au CBD de Sydney, je ne l’ai point vu.

Car, si je suis honnête intellectuellement, j’admet que la comparaison est injuste, n’ayant pas vraiment visité ce centre ville de Sydney de la même manière qu’à Melbourne. Ici, point de pub crawl ou de visite guidée gratuite par un passionné de sa ville. Un schéma se dessine : la comparaison est impossible tant qu’on ne reproduit pas à l’identique un mode de visite. Au final, je peut donc dire que je n’ai pas aimé mon expérience dans le CBD de Sydney alors que j’ai été enthousiaste par celle vécu dans celui de Melbourne. Je ne peut pas être plus honnête DSC_7665_DxOintellectuellement que cela.

Maintenant que j’ai déversé mon fiel et mon dégoût, place à des images et quelques trucs plus positifs. Tout d’abord, j’ai le souvenir de mon précédent passage ici d’une petite place dans le CBD où avait lieu régulièrement des concerts gratuits. Je ne l’ai pas retrouvé. Mes souvenirs doivent être flous sur ce point. Il y a bien quelques endroits qui ont fait tilt mais, par exemple, je n’ai aucun souvenir de l’hôtel de ville, qui est pourtant imposant. Quand on est gamin, on ne s’intéresse pas à ces choses là. Autre souvenir du CBD, l’Alliance Française où on allait régulièrement emprunter des livres ou des bandes dessinées. Bon, certes, je n’ai pas passé la journée à la chercher. N’empêche que j’aurai eu les yeux embrumés de tomber dessus par hasard. On n’est pas fait de bois, tout de même.

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Tiens d’ailleurs, maintenant que j’en parle de mes souvenirs, j’en avais un vague d’un train mono-rail en construction dans le centre ville (Je viens de vérifier sur internet, sa construction a été terminé en 1988. C’est donc fort possible que je ne divague pas). Effectivement, les voies sont toujours là, suspendues au dessus de la route et pénétrant parfois directement dans les immeubles. C’est d’ailleurs en les voyant que j’ai eu un flash (Ahaaaaa!). Par contre, malchance ultime, il a fermé en juin de cette année. ‘Tain, à deux mois près. Non, parce que c’est pas tout les jours qu’on peut faire un tour de train monorail, je suis désolé.

DSC_7673_DxODans le registre de choses vues dont je n’ai aucun souvenir, dans une rue piétonne, j’ai eu la chance de tomber sur un jeune homme, doué, en train de réaliser une performance musicale, lui, sa guitare, sa bouche et un enregistreur en boucle. Il y a peu de chance que je m’en souvienne vu qu’il était pas né en 1980. En tout cas, sur le cul j’étais (notez cette terrible inversion sujet verbe des plus classieuse). Je trouve ça toujours impressionnant de voir des gens avec un talent incroyable (qui n’est que du travail motivé par la passion, d’après moi et d’après Jacques Brel qui disait si justement « le talent, c’est l’envie ») être en représentation, là, juste en bas de chez moi (façon de parler). A Toulouse, je n’en croise pas des masses des gens comme ça ou alors l’occasionnel joueur de flûte de pan ou d’accordéon qu’on a envie de payer pour qu’il se taille. Mon Jack, lui, je lui ai filé des dollars, parce qu’il est trop fort. En plus il a pris le temps de me remercier, devant tout le monde alors que je n’étais pas le seul. Et brave garçon avec ça.