La faune et la flore de Hampi

Réjouissez-vous amoureux de la nature, voici venu le moment du billet animaux spécial Hampi, spécial Hampo (mais pas Hampa, c’est malsain).

Mon court séjour (mais au combien intense) me permit quelques rencontres intéressantes de ce côté-ci. Bien entendu, j’ai croisé moult vaches, toujours aussi placides et fourrageant dans les ordures à la recherche de restes végétaux. Les restes animaux sont quand à eux plutôt du domaine des chiens errants, toujours aussi présents et également toujours aussi sympathiques qu’à Mumbai. En Afrique, les animaux se retrouvent le matin autour d’un plan d’eau pour boire. En Inde, on se retrouve autour d’un tas d’ordure pour manger. Que bella la nature. Mais assez de ces animaux domestiques, exigeriez-vous. Soit. Parlons donc des animaux sauvages. Ceux qui ont planqué leurs enfants suite à l’épisode « Hampa » peuvent maintenant les ramener. Ça va être très mignon. En tout cas, pas pire qu’un documentaire animalier sur France 5.

DSC_5212_DxOEn premier lieu je vous présente, les seigneurs de Hampi, les maîtres des rochers, les cousins à la face expressive… les singes. Il y en a parait-il deux sortes l’un à face rouge (plutôt rose d’ailleurs) et l’autre à face noir. En ce qui me concerne, j’ai surtout côtoyé ceux à face rouge qui sont également pas très farouches. A vrai dire, la tenancière de ma guest house avait l’air de les considérer comme des nuisibles chapardeurs. J’ai pu sans problème m’approcher à moins d’un mètre de certains, suivant que c’était des femelles avec un petit, ou pas. Mais surtout ils peuvent très facilement passer en bande à côté de soi, à les toucher, juste en levant des yeux curieux vers vous. Ils ne sont pas bien gros (environ 50cm assis) quoique ceux à face noire me semble un poil plus costauds. Généralement, on les trouve sur les gros rochers autour du village, dans les DSC_5164_DxOgrandes tours du temple ou bien dans les arbres avoisinant. Au bout d’un certain temps cependant, j’ai appris à ne pas les regarder trop longuement. Ils me fixent alors de leurs yeux expressifs et j’y lit une profonde et millénaire tristesse. Ce doit être l’équivalent en singe de « 100 roupies, please? ».

Plus joyeux, je vais vous présenter l’extraordinaire acrobate du lieu : l’écureuil. Tout de suite, je sens comme une vague de déception chez vous. Il est où l’exotisme, il est où le dépaysement ? Un vulgaire écureuil, qui ressemble étrangement à ceux que l’on a chez nous, il DSC_5157_DxOfaut bien l’avouer. J’étais comme vous, je ne lui prêtait pas beaucoup d’attention. Mais je crois bien qu’ils cachent leur jeu. Je ne jurerai de rien, mais, pendant un moment d’observation plus attentif, j’en ai vu un effectuer un saut très étrange vers un arbre voisin. Je ne vous cacherai pas que j’ai fait quelques études de physique donc les corps en chute libre, ça me parle. Il est possible que j’ai mal vu, mais suite à ce saut, j’ai poussé un cri d’étonnement (heureusement, j’étais une nouvelle fois seul) : l’écureuil venait de contredire les lois de monsieur Newton (et non, ce n’était pas un saut relativiste. Blague de physicien). En clair, il avait sauté en ligne droite, sans aucune chute. J’ai donc la quasi conviction que ces petites bêtes déguisées en écureuils français sont dotées du pouvoir de vol. Ou alors ils sont drôlement doués pour planer.

En parlant de rochers (si, si, j’en ai parlé plus haut. Faut suivre), l’autre habitant des lieux avec le singe est le lézard. En catalogue, il y a le noir à bande rouge sur le dos, le noir à bande jaune et le gris marron standard. Je n’ai absolument aucune idée de ce que c’était mais j’ai comme dans l’idée que les deux colorés n’ont pas très bien observé leur environnement car leur camouflage est particulièrement raté. Joli, certes, mais peu efficace. Il me semble qu’ils seraient beaucoup plus adaptés à un match de foot.

Enfin, pour l’exotisme, j’ai en stock du serpent. Oui, j’ai vu un serpent de taille respectable que j’évaluerai à plus d’un mètre de long. Fort heureusement, il était très très pris à cet instant donc je n’étais pas son soucis principal (même s’il était le mien). Il essayait de se défendre contre une attaque aérienne menée par deux oiseaux de la taille de gros moineaux complètement fous-dingues qui pratiquaient l’attaque en piqué, façon Stuka. Il est parti à l’abri dans un fourré pendant que les deux volailles complètement remontés à bloc repartaient en direction de l’arbre le plus proche en piaillant comme des hystériques :

« Chef, chef, on l’a bien niqué ce salopard, hein ?

  • Et comment. On lui a bien foutu sa branlée.
  • Chef, chef, vous avez vu comment je lui ai bien défoncé sa tête à coup de bec, là ?
  • C’est bien, c’est bien petit. Tu es enfin prêt. Demain on attaque un crocodile. »

Mais pour les crocodiles je suis navré de vous décevoir. Je crois bien que c’était une blague pour touristes.

Le chaud et le froid à Hampi

Hampi est un petit village, même à l’échelle européenne. Au centre trône le temple. Un peu à l’écart on trouve le vaste terre-plein où les bus arrivent et où l’on peut trouver des marchands de bananes et autres légumes. Puis entre le temple et la rivière, on trouve le village proprement dit d’une cinquantaine de maisons. A côté de l’arrivée de bus se trouvent les plus grandes maisons toutes un peu carrées en parpaings peints (très joli à dire, ça) et donc les guest houses les plus cotées. C’est là que j’avais la mienne car je le vaut bien. N’aller pas imaginer des trucs. J’avais juste le droit à la climatisation dans la chambre fermée par une porte en contreplaqué et sécurisé par un gros verrou extérieur. Mais c’était propre et il y avait une douche.

Dans le village on trouve quelques autres guest houses ainsi que plein de restaurants « multi-cuisine » (comprendre cuisine indienne familiale et quelques trucs de base du reste du monde), le tout végétarien car la viande est interdite. Tout ça est relié par des routes et chemins en terre battue, d’un niveau de propreté à l’indienne et saupoudré de quelques mendiants, vaches, chèvres et chiens errants. L’éclairage public est limité mais la bonne nouvelle c’est que les auto-rickshaws n’arrivent que le matin et restent du côté de l’arrivée des bus. Voilà pour le décor.

Il m’est arrivé plusieurs choses à Hampi : du magique, du symptomatique, du casse-couille et du glauque. Mais commençons d’abord par le symptomatique. Parce que c’est moi qui décide.

On le sait, l’Inde est impitoyable pour le touriste. La légende raconte que c’est le seul pays au monde doté d’une cellule psychologique au sein de l’ambassade de France. J’ai rencontré une touriste au bout du rouleau. Elle était assise sur un rocher en bord de chemin, le bras dans le plâtre, entourée de trois indiens qui tentaient de la soutenir. Son bras, elle se l’était cassée deux semaines auparavant pendant son séjour de quelques mois en Inde. Fatiguée, ayant mal à son bras, avec un mal de tête naissant, elle a craqué. En pleur, elle attendait un auto-rickshaw pour l’amener voir un médecin en gémissant à intervalle régulière « j’veux rentrer en France ». Heureusement, les indiens en question était manifestement des amis et tentaient de la rassurer pour l’un, et de savoir ce que foutait l’auto-rickshaw pour l’autre avec son portable. Oui car les auto-rickshaws sont chiants jusqu’au bout. Toujours là quand on s’en fout mais jamais là quand on a besoin d’eux. En compatriote français, car c’était une française, j’ai vainement tenté de la rassuré en lui disant qu’elle devait avoir le droit à un rapatriement avec sa carte bleue (alors que j’en savais rien du tout) mais je sentais bien que j’arrivai après la bataille. Et d’autant plus que je ne me sentais pas plus légitime que trois autres indiens beaucoup plus moustachus que moi, quoique plus frêles. Je l’ai donc laissé à sont sort. A mon retour de ballade elle avait disparu, sans doute emportée par Shiva, le téléporteur (nom d’un dieu, mais c’était quoi son boulot à lui?).

Pour ce qui est du casse-couille, laissez moi vous dire que dans certaines contrées un peu reculées comme Hampi, et notamment en basse saison ou le touriste se fait plus rare, je suis régulièrement interpellé par des jeunes d’un « hello » invitant à la conversation. Il m’est donc arrivé plusieurs fois d’engager un gentil papotage avec des questions qui sont invariablement, dans cet ordre, d’où viens-je, comment m’appelle-je, quel âge ai-je, suis-je marié-je et comment ce faisse-je. L’indien est obsédé par le mariage et manifestement éberlué lorsqu’il ne survient pas après trente ans. Si c’est pas une société traditionnelle, ça. Tout ces échanges se font, bien entendu, en gesto-anglo-hindi mais généralement vu le niveau des questions, on se comprend et cela reste très bon enfant. Il m’est d’ailleurs arrivé plusieurs fois qu’on me demande de prendre les gens en photo pour pas un rond. Généralement, je montre le résultat sur le petit écran arrière de mon Nikon (en plein soleil, autant dire qu’on voit pas grand chose, et j’en suis navré) et les gens sont ravis. La grande majorité de ces petits curieux sont des adolescents de sexe mâle car manque de pot, je devais faire ma ballade après 16h, heure de fin de classe. Le problème avec les adolescents de sexe mâle, c’est qu’il y a parmi eux une forte proportion de connards, qu’on appelle généralement des « petits cons » à cet âge là. Je tombe donc sur un duo, un grand dégingandé et un plus petit moustachu, ou plutôt ils me tombent dessus d’un « ha-lo » que j’interprète comme une envie d’entamer le questionnaire classique (dont j’ai bien rodé les réponses maintenant). Ils enchaînent par une demande de photo et je précise bien que je ne paye pas. Pas de soucis, je mitraille leurs faces boutonneuses. Et paf, le petit moustachu me demande 100 roupies. Nan, nan. 50. Non plus mais avec le sourire (ne jamais se défaire de son sourire, c’est important). Du coup je repart en marchant en essayant de ne pas trop relancer la conversation. Mais tels des adolescents qui s’ennuient, ils se sentent obligé de me suivre pour me poser pleins de questions en pseudo anglais que je ne comprends pas, ce qui provoque des rires et commentaires entre eux. Des vrais ados petits cons. Moi je me dirige vers la rivière car je cherchai un endroit pour la traverser, un guet, des cailloux ou quelque chose (j’ai d’ailleurs vite abandonné l’idée au vue d’un panneau marqué « Attention, crocodiles »). Je m’arrête un peu pour essayer de repérer quelque chose avec mes deux sangsues à un mètre, toujours à me poser des questions incompréhensibles. Bref, ils commençaient sérieusement à m’échauffer les oreilles (et avec cette chaleur, il m’en fallait peu). Mon sourire était en train de fondre. Puis, je ne sais pas ce qui lui à pris, le petit con moustachu (celui qui avait la connerie) s’est saisi nonchalamment de mes lunettes de soleil que j’avais accroché à la pointe du col de mon polo. L’effet fut instantané. Mon reste de sourire c’est instantanément évaporé, je lui ai chopé le bras pour récupérer mes lunettes et l’ai bousculé violemment. Oui, car on ne me touche pas les lunettes comme ça. C’est privé. Et puis surtout il se croyait où, chez mémé ? Mais comme c’était un ado con, forcément ça l’a fait rire avec son pote étiré et j’ai du me les coltiner encore quelques minutes, à me suivre, en les ignorant pendant que, furibard, je révisait mentalement mes coups appris à l’armée pour les démolir discrètement à l’abri d’une colonne en ruine racontant le chapitre 25 du Ramayana. Malheureusement, ils se sont lassés et m’ont lâché le train. J’avais été à deux doigts de me friter avec un indien. Ça aurait fait une jolie anecdote.

Puisqu’on en est à parler des choses désagréables, enchaînons directement sur l’épisode glauque de mon séjour à Hampi. S’il y a des enfants qui lisent, je suggérerai de préserver leur innocence encore quelques chapitres en les mettant devant un excellent dessin animé Pixar. Sinon, pour les autres, mon serment tacite de tout vous raconter (et pour le coup, ici, sans exagération, sinon ça n’aurait aucun sens) m’oblige à ne pas vous épargner cette anecdote. Elle commence comme les précédentes : je me ballade dans Hampi, le long du vieux bazaar antique qui conduit du temple au pied de Munthaga Hill. C’est le soir et je profite un peu de ce moment pour déambuler mollement dans ce décor mystérieux. Comme d’habitude, je suis accosté par un jeune garçon de 11-13 ans qui me demande (devinez) mon pays d’origine, mon nom, etc. Mais ensuite, accroc, il dévie du script en me demandant de l’argent. Je sort ma réplique favorite : « No, no ». Il insiste, tel un petit mendiant roumain, mais en anglais. « No, no », réponds-je, toujours avec le sourire. J’effectue un rapide check-up discret de son anatomie : deux bras, deux jambes, une tête, des mains, des pieds, tout ça dans des angles standards. Non, ce n’était pas un éclopé. Nous marchons un peu, moi en l’ignorant. Puis il me demande « Hampa ? ». Je suis au regret de lui indiquer que je ne comprend pas sa question mais il se sent obligé de la répéter à l’identique : « Hampa ? ». Mon imagination cynique me susurrait qu’il s’agissait d’une proposition de drogue. Manque de pot, je ne la connaissait pas et en plus je suis pas trop porté sur la chose, encore moins en Inde ou rien que la nourriture peut te tuer, alors de la drogue… Je continu à marcher en évaluant la distance qui me reste jusqu’à la guest house. Le petit garnement, quelques instants plus tard recommence son cirque « Hampa ? ». Mais je ne comprend pas, mon petit bonhomme ?, lui dis-je en anglais. Le petit bonhomme, avec plein de sang froid et en toute discrétion me ressort une nouvelle fois son interrogation « Hampa ? » mais cette fois-ci accompagné d’une gestuelle qui ne laissait planer absolument aucun doute sur sa suggestion. Soyons cru, car il n’y a aucune raison que je vous épargne : le garçon me proposait une masturbation. « Incredible India ! », comme dirait le ministère du tourisme indien. Et pour ceux qui ne parle pas bien l’anglais, car entre temps mon cerveau avait fait la traduction, « hampa » signifiait « hand pump ».

Enlevons-nous tout de suite ce goût étrange et amèreDSC_5132_DxO dans la bouche en parlant du numéro 1 de ce top 50 : les moments magiques. Il y en a eu trois. On peut donc dire qu’ils équilibrent (mais est-ce aussi simple) les trois autres. Premièrement, en parlant de gens qui accostent et demandent des DSC_5126_DxOphotos, la première fois eu lieu dans un des plus grand temple en ruine. Une famille élargie d’indiens modestes (que j’arrive à repérer grâce aux habits des hommes. Les femmes ont invariablement des saris colorés et je me vois mal tâter la fabrique pour estimer leur niveau de revenu), complète avec enfants et grands parents, m’ont demandé de faire des photos d’eux.DSC_5127_DxO J’ai du faire une petite séance photo de cinq minutes avec profusion de sourires et rires au vue des photos. C’est eux qui insistait pour continuer et c’était super sympathique. Quelle est belle l’humanité dans ces cas là. Merci à eux. Accessoirement j’ai également pu photographier deux « religieux » en tenu complète, mais cette fois-ci moyennant un « don » généreux de 100 roupies. Mais comme c’était des religieux j’ai eu le droit à des petit tours de magie du plus vieux qui consistait essentiellement à cacher des objets plus ou moins importants dans sa gorge, sans s’étouffer, bien entendu. DSC_5238_DxOBravo l’artiste mais j’ai compris du coup pourquoi c’était toujours le même qui parlait (le plus grand): son comparse avait l’entièreté de l’arrière boutique du BHV planqué dans son œsophage.

Ensuite il y eu des soirées spéciales, chacune dans leur genre, dans des petits restaurants d’Hampi, avec moi comme seul client. La première eu lieu le premier soir de mon arrivé où je suis allé me restaurer après un long trajet en train et en bus dans un petit restaurant familiale aux chaises en plastique moulé (comme tous les restaurants d’Hampi). Dans ces cas là, je sens que je prend les gens par surprise. Merde, un client ! J’ai eu le doux plaisir d’être servi en terrasse pendant que quelques membres de la famille y regardait la télévision. J’avoue que je ne me souviens plus du plat mais le film d’action bollywoodien et le chant des insectes nocturnes, oui.

Mais l’instant le plus magique, ce petit moment de grâce imprévisible qui justifie à lui seul le voyage et tout ses emmerdements, eu lieu le deuxième soir, le même jour que la scabreuse suggestion enfantine. Le soleil se couche et une pluie fine arrive doucement. Je part dans le village à la recherche d’un petit restaurant pour le dîner, appréciant cette soudaine fraîcheur relative. Brutalement la pluie s’intensifie pour se transformer en véritable pluie de mousson. Je fait demi-tour pour me fixer sur un des premiers restaurants du village. Le déluge me trempe rapidement mais je m’en fout. Soudainement, le rare éclairage public et quelques lumières intérieures s’interrompent. Coupure de courant. Je hâte mon pas dans les ruelles de terre battue déjà trempées en essayant de deviner les flaques dans le noir. Je retrouve le restaurant dans l’obscurité, lui aussi touché par la coupure de courant. Je demande et on m’invite à venir manger malgré tout. Seul, on m’apporte un menu, une petite bougie et me retrouve pendant une demi-heure à savourer l’instant, à la lumière de la chandelle et d’une ampoule dans la cuisine, alimentée par une batterie. De grosses gouttes frappent le toit en tôle. La cuisinière fait rissoler quelque chose en écoutant la radio. Au son de musiques indiennes et de paroles dans une langue inconnue, j’observe deux jeunes filles assises à l’entrée du restaurant et discutant en regardant la pluie. Une toute petite fille vient jouer avec son frère puis son grand père à côté de moi. Je me sens comme un spectateur invisible. Une soirée de pluie de mousson.

Incredible India !

Ce que j’ai retenu de ma leçon d’hindouisme

Je crois qu’il est maintenant grand temps que je tente de vous régurgiter ce que j’ai vaguement retenu de ma leçon d’hindouisme perpétrée par le guide Veeresh ou collectée au travers des quelques musées visités. Vous serez averti dans le texte lorsque je ne serai pas sûr de moi du à une mémoire atroce des noms. La prochaine fois je demanderai à ce qu’on me sorte un paper board pour me faire un diagramme. Bref, ce ne sera sans doute pas très académique et si vous êtes théologien de l’hindouisme vous me ferez parvenir un petit message privé pour rétablir les contre vérités et autres outrancières simplifications.

Donc.

Au début il y avait Brahma qui créa l’univers et toutes les choses qui le compose, du plus grand au plus petit, du plus important au plus dérisoire, donc tout. Non, ne cherchez pas, il a TOUT créé, vous dis-je. Cherchez pas la petite bête dés le début de l’histoire.

ATTENTION PASSAGE FLOU. Il créa également les dieux, notamment Vishnu, le protecteur, et Shiva le quelque chose en « eur ». FIN DU PASSAGE FLOU. Donc, je ne suis pas sûr que Brahma créa les dieux, mais si on part du principe qu’il a TOUT créé, faut être un peu logique. Ensuite, je ne me souviens plus trop de la fonction de Shiva, à savoir, destructeur, vengeur, percepteur ou bien branleur. En tout cas c’était un truc qui finit en « eur », ce qui exclu catégoriquement attaquant de pointe. A la limite milieu récupératEUR. Mais peu importe. Vous vérifierez par vous même sur Wikipédia.

En tout cas Shiva danse sa danse cosmique et connaît par cœur 108 positions différentes qu’il est capable d’effectuer avec sa tête, son cou, ses deux jambes et ses quatre bras, ce qui exclu toute forme de reproduction par le commun des mortels. D’autant plus que la plupart du temps, il danse sur un démon, accessoire qu’il est difficile de se procurer de nos jours. Ou pas.

Ensuite, Vishnu a une femme, Parvati, qui est également une déesse. C’est plus pratique dans la mesure où cela permet de partager les mêmes sujets de conversations. Si je ne dis pas de bêtises (ATTENTION RE PASSAGE FLOU) on la voit souvent avec une flûte. Bien entendu, quand je dis « on la voit », comprenez, « on la voit représentée ». N’est pas Bernardette Soubirou qui veut. Mais bien que Parvati joue de la flûte, elle s’ennuie. Notez bien, c’est important pour la suite : Parvati s’ennuie.

Ah non. Mince. Je me suis trompé. Elle ne s’ennuie pas. Manquerai plus que ça, une déesse qui s’ennuie. C’est un coup à nous balancer un tremblement de terre pour s’occuper. Non pardon, je me méprend. Elle ne s’ennuie pas, elle a peur toute seule chez elle. Rien à voir. Donc là vous pouvez effacer la précédente remarque et noter qu’elle a peur. C’est vraiment important pour la suite. Je sais, c’est compliqué tout ça.

Où en étais-je. Ah oui. Elle a peur car son mari, Vishnu, passe sont temps à s’incarner sur Terre pour protéger les hommes. N’oubliez pas, son job c’est « Protecteur ». Du coup il n’est jamais à la maison. Notez, notez. Ça aussi c’est drôlement important pour la suite.

Vishnu a également deux consœurs, dont notamment, la fameuse Mahalakshmi, déesse de la richesse et du succès en affaire, patronne des commerciaux de SSII. Malheureusement, je ne connais pas exactement le lien hiérarchique ou de boulot exact entre Vishnu et ces deux consœurs. Mais on les voit assez souvent ensemble sur les sculptures de bronzes dans les musées. Je ne veux rien sous entendre.

Donc c’est MAINTENANT que vous pouvez ressortir vos notes. Comme Parvati a très peur toute seule chez elle (quartier qui craint, manifestement) en l’absence de Vishnu, elle décide de se créer un protecteur à elle sous la forme d’un fils. Rationnels que vous êtes (ou pas) vous devez vous dire qu’il y a comme une cou**** dans le potage. Car si Vishnu est son mari, qu’il n’est jamais là, mais qu’elle veut avoir un fils… ça va être compliqué de le faire, le fils. Sauf que c’est une déesse et qu’il lui suffit de sculpter son fils à l’image qu’elle veut (pas nécessairement la sienne) grâce à une matière première dont je vous laisse deviner la nature. Alors ? Et bien, d’après Veeresh (je préfère citer mes sources parce que je trouve ça un peu énorme quand même et il est fort possible que j’ai mal compris son anglais approximatif), Parvati créa son fils avec la graisse de sa cuisse. Morale de l’histoire ne jetez surtout pas les produits de vos liposuccions, mesdames.

Enfin, Parvati est heureuse. Son tout nouveau fils est maintenant devant l’entrée de la maison pour la protéger. De quoi ? L’histoire ne le dit pas, mais en tout cas on sait que son fils est beau et bien proportionné avec tout ce qu’il faut. Notez, c’est assez important aussi. Malheureusement, Vishnu le Protecteur de l’humanité, bien que s’incarnant à foison fini bien par rentrer chez lui. Il trouva donc devant sa maison un jeune homme qui, d’une voix ferme lui refusa l’entrée. On comprend que ça l’ai fait doucement marré, le Vishnu. Passablement éreinté par sa récente incarnation (ou plus probablement, par son encore plus récente négociation avec un conducteur d’auto-rickshaw pour rentrer chez lui), il abrégea la conversation d’un coup d’épée qui trancha net la tête du fils de Parvati. Tchop,

« Voilà qui va plus m’emmerder celui là. Chéri, t’es lààààà ?, appela t’il

  • Oui, oui, j’arrive, répondi Parvati, Aaaaaaah, Maikècecé !?
  • J’sais pas. Un mec défoncé au crack qui voulais pas que je rentre.
  • Mais c’est mon fils !
  • Pardon ? Tu peux me la refaire celle là ?
  • Rha je t’expliquerai, mais fait quelque chose ! Ressuscite le !
  • Ah mais je ne peux point et tu le sais. Ce que Vishnu tue, personne ne peut ramener z’à la vie.
  • C’est bien vrai, c’est bien vrai. Mais que faire ?
  • Bouge pas. J’ai une idée. Mais entre temps t’as intérêt à peaufiner ton explication à propos de cette histoire de fils, conclua Vishnu.

Vishnu parti vite à la recherche d’une tête de rechange pour le fils de Parvati et, muni d’un fort esprit bricoleur mais dénué totalement de sens esthétique, attrapa un éléphant et lui coupa la tête. Sans réfléchir, il choisi un écrou de 12 et vissa la tête d’éléphant sur le corps du fils de Parvati et ramena celui-ci à la vie.

« Salut la compagnie, Brrrrraaaaaaaaaaaawwwh. J’ai le nez pris, je crois », fit Ganesh. Car vous l’avez tous deviné, ainsi fut créé Ganesh le dieu à la tête d’éléphant, fils de Parvati, mais pas totalement celui de Vishnu. Mais ça, c’est des histoires de couples. Ah et depuis il a pris quelques kilos.

Puisqu’on en est encore à parler de Vishnu, il s’est déjà incarné neuf fois, à chaque fois dans une forme de plus en plus évoluée. Une de ses incarnations les plus connus fut Rama (la 6ème ou 7ème je crois), célèbre (super) héros aux pouvoirs extraordinaires et personnage principal du Ramayana. Rappelez-vous. Il y eu aussi Krishna et Bouddha, je crois mais là je suis pas sûr. PASSAGE FLOU ! Pardon, j’avais oublié de vous prévenir. Par contre là ce n’est pas flou, mais d’après Veeresh, on attend la dixième réincarnation. Je n’en dis pas plus, c’est peut être votre voisin de gauche. Autre point important concernant Vishnu que je vais vous chuchoter pour ne pas vexer : il a un troisième œil au milieu du front. Cet œil est d’ailleurs toujours fermé ce qu’il vaut mieux car quand cet œil s’ouvrira, ça va barder pour tout le monde.

Bref si on résume : nous avons Brahma, Vishnu, Shiva, Parvati, Mahalakshmi, son autre consœur dont j’ai oublié le nom, Ganesh et Hanuaman le dieu singe (qu’on a vu dans le billet précédent). Il doit en manquer un paquet notamment Kali que je ne parviens pas à situer dans le panthéon. Au niveau des cultes il faut savoir que Brahma n’est absolument pas célébré, représenté ou adoré. Tout le monde s’en fout comme le nom du producteur du film. C’est le type qui a tout payé, mais personne ne songe à le remercier. Attitude classique. J’espère au moins qu’il touche des royalties. Non, les deux grandes stars sont Shiva et bien sûr, Vishnu, vu qu’il est protecteur. C’est facile.

Concernant les signes distinctifs, les supporteurs de Vishnu portent trois bandes blanches verticales sur le front alors que les membres du kop de Shiva (virage sud) les portent horizontalement. Ou inversement. Mais quelle mémoire atroce. Ganesh est adoré par les chauffeurs routier, de bus voir d’auto-rickshaws (pourquoi, je ne sais pas) alors que Hanuaman est cultissime chez les culturistes.

Quand au point rouge sur le front, c’est une légende. En vérité ce sont des tireurs d’élites qui pointent chaque hindou de leur visée laser. Quand l’oeil de Vishnu s’ouvrira…

Hampi, de jour

Pour ceux qui ont perdu le fil de l’histoire à cause de mon précédent billet, je suis à Hampi, site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, situé dans l’état du Karnataka (plus ou moins au sud-est de Mumbai).

Le site classé englobe Hampi Bazaar (le village) ainsi que plusieurs autres villages dont les noms m’échappent comme la plupart des noms de villes indiennes de plus de deux syllabes. J’en suis navré mais je n’ai absolument pas la mémoire des noms. Je pourrai regarder sur une carte, mais, à l’instant où je vous écrit, vous avez sans doute plus d’internet que moi. DSC_5185_DxOCar ce qui est réellement important, c’est que le site englobe dans une vaste surface de 26km2 un nombre élevé de temples, en divers états de conservation, ainsi que des ruines d’un palais royal. Plus important encore, cette ancienne cité (maintenant réduit à quelques villages) est cité dans le Ramayana. Ce qui est d’au… Hein ? Comment ça vous ne connaissez pas le Ramayana ? Ramayana, enfin ? The Story of Rama, quoi ! Je disais donc que c’est d’autant plus incr… Quoi en-core ? Vous connaissez pas Rama ? Dis donc lecteur ignare va falloir songer à se renseigner un peu ! Sans rentrer dans les détails car j’ai prévu d’écrire un billet tout en profondeur abyssal là dessus, Rama c’est une des incarnations de Vishnu sur terre. Voilà. Ok ? C’est bon ? On peut continuer ?

DSC_5111_DxODonc, Hampi est, d’après les spécialistes, l’antique cité de Vijayanâgara où habitait Hanuaman, le dieu singe, que Rama est venu rencontrer pour demander son aide afin de pouvoir récupérer sa femme, Sita, lâchement kidnappée par Ravana. Un incroyable imbroglio vaudevillesque avec un dieu à la tête de singe dedans. En clair Hampi, ça doit résonner comme Bethléem pour les Juifs ou les Chrétiens, un truc qu’on a lu dans un vieux bouquin et qui remonte à des millénaires. Fort heureusement, il n’y a pas à Hampi de ferveur religieuse particulière. Ni plus, ni moins. Ah si. L’alcool y est interdit.

DSC_5155_DxOMais Hampi, c’était aussi la capitale d’une dynastie de rois dravidiens (attention, mot nouveau tout à fait apte à impressionner le quidam à ta prochaine soirée. Note, note) dont le grand Krishnadeva Raya. Si tu ne le connais pas c’est que ton inculture est au moins aussi grande que la méconnaissance du sujet par l’auteur de ces lignes. Et il n’y a vraiment pas de quoi être fier.

En clair, Hampi c’est du concentré de grands H : Histoire et Hindouisme.

Et pour faire bonne mesure, le cadre géographique est assez sympathique aussi. Au milieu coule une rivière, classique, et tout autour se trouve des petites collines de gros blocs granitiques rose beige. Entre tout cela, on trouve des plantations de bananiers et une végétation relativement importante. DSC_5217_DxOQuelques un des temples sont posés DSC_5226_DxOsur de grandes dalles de granite et des petites tours d’observations sont posées de temps en temps au sommet d’un gros bloc. Le site est donc un curieux mélange de minéral et de végétal. Pour les géologues, je précise que la région fut le siège d’une intense activité en la présence d’un gigantesque volcan. D’où les blocs granitiques.

Après ce rappel factuel, il doit vous cuire de savoir ce que j’en ai pensé de ce site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO (au même titre que le Vieux Lyon, pour situer ce classement un peu bizarre). En tant que français ayant le compliment mesuré, je dirai : « ouaih, c’est pas mal. C’est même pas mal du tout ». Mais laissez moi vous narrer les deux étapes de ma découverte de Hampi, patrimoine de l’humanité tout entière tel que l’a frappé l’UNESCO de son auguste sceau.

DSC_5113_DxOPremière phase, une première journée découverte patrimoniale en compagnie d’un guide officiel permettant d’avoir un aperçu des principaux sites avec le « background » historique et théologique adéquat. Accessoirement pour se la péter en société à mon retour à condition d’avoir pris des notes. Ce que je n’ai pas fait. Mais qu’ai-je vu, qu’ai-je entendu, qu’ai-je senti lors de cette journée ? J’ai pas mal senti le genou droit de mon guide, Veeresh, dans l’auto-rickshaw qui nous trimbalait de site en site. J’ai pas mal entendu le doux vent dans les arbres à côté des écuries d’éléphants (ça fait rêver ça, hein?). DSC_5140_DxOJ’ai pas mal vu de temples aux colonnes sculptées représentant des passages du Ramayana, le petit palais de la reine ou encore sa baignoire de la taille d’une piscine. Côté site archéologique c’était assez plaisant et varié, d’autant plus qu’ils étaient agrémentés des commentaires et explications de Veeresh, malheureusement dans un anglais légèrement approximatif. C’est d’ailleurs grâce à lui que j’ai appris que l’Inde allait rencontrer le Pakistan dans un match de cricket décisif lors de l’International Cricket Competition le 15 juin. On était en plein dans la thématique Ramayana.

DSC_5143_DxOLe moment le plus plaisant de la journée fut l’ascension d’une immense plate-forme surplombant les ruines du palais du roi. Quelques instants auparavant, le guide m’expliquait qu’ici le roi recevez la visite et les doléances de ses sujets sous une immense toile tendue. Il ne m’en fallait pas plus pour, une fois arriver en haut, laissez mon imagination s’envoler. J’imaginai une vaste foule de sujets à mes pieds, aux drapés blancs, safrans ou à moitié nus et, les dominant, assis sur un fauteuil en rotin aux motifs intriqués direct de chez Pier-Import, un maharadja à l’allure noble et altière, à la fine barbe ciselée, vêtu d’un habit couleur perle souligné d’or se reposant à l’ombre tamisée d’une vaste toile de lin qu’une chaude brise des terres viendrait faire onduler. C’est beau et c’est long comme du Le Clezio. Et c’est pas fini. Des serviteurs pieds nus aux torses musclés et aux moustaches en guidon de Harley viendraient éventer leur seigneur et maître avec d’amples feuilles de bananiers achetés 30 roupies à la vieille en sari sale (et donc non souriante) au coin du bazaar, au son hypnotisant de ragas envoûtants joués par un ensemble tablas, sitars et flûtes pendant qu’une troupe de vingt danseuses à la divine souplesse et aux articulations non-contraintes s’emploieraient à distraire leur roi de ses tracas du boulot.DSC_5145_DxO Autour du royal personnage, des éléphants, lascivement assis sur leurs vastes popotins et répondant aux noms de Lakshmi, Lakshmi et Lakshmi viendraient parfaire ce somptueux tableau exotique pendant que les reines en saris multicolores et aux délicates chevilles parées de bijoux d’or sertis de pierres précieuses de lointaines contrées du nord, tenteraient vainement d’apercevoir la scène au travers des corpulents corps sacrés des pachydermes en effectuant de curieux mouvements oscillants de tête d’avec leur cou gracile. Et ensuite j’ai eu trop chaud donc je suis redescendu de la plate-forme. Comme quoi quelques Indiana Jones et films de Bollywood suffisent à se construire un imaginaire. Le voyage est sublime quand la réalité se mélange à la fiction, voilà ce que je dis.

DSC_5218_DxODonc, la deuxième phase de ma découverte de Hampi a eu lieu le lendemain. Je décide de ne pas prendre de guide et surtout pas d’auto-rickshaw mais plutôt de partir à pied randonner autour de Hampi Bazaar. Je supporte pas trop mal la chaleur maintenant (c’est à dire que j’arrive à marcher plus d’une heure sans que cela ne provoque une abrasion de l’intérieur des cuisses). C’est donc parfaitement jouable avec trois litres d’eau. Magnifique idée que j’ai eu. J’ai commencé la ballade par une montée sur Mathunga Hill, une des collines de blocs granitiques surplombant le village. Arrivé là haut je découvre un temple en ruine isolé, un petit vent frais et délicieux ainsi qu’une vue panoramique sur tout le site de Hampi. Il n’y a rien de mieux pour appréhender un endroit. En contrebas j’aperçois le vieux bazaar tout en ligne menant au temple encore en activité qui est le cœur du village de Hampi Bazaar. De l’autre côté je vois DSC_5223_DxOle temple de Vitthalya, en ruine mais dont la structure est pleinement visible de cette hauteur. J’en profite pour rester quelque temps à profiter de l’air frais, du calme et de la splendide vue. Je ne suis interrompu que par deux femmes en sari qui viennent de grimper la colline en claquettes. Encore plus amusant, je les voie redescendre les marches de l’autre côté les fesses par terre. Ça n’a pas l’air d’être très pratique le sari pour ce genre d’activité. Je fini la journée par un circuit longeant la rivière et revenant vers le village, le tout en croisant quelques autres temples en ruine et en lâchant quelques litrons de sueur.

DSC_5200_DxOVoilà, c’est tout pour aujourd’hui. Hari Krishna. Même si je ne sais pas ce que ça veut dire.

En prime, un frêle indien sympathique devant une grosse statue du gros Ganesh (dont je vous narrerai l’histoire bientôt). Le contraste est saisissant, comme le veut le cliché.

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Ni oui ou ni non

Il y a des choses qu’on sait. Il y a des choses qu’on oublie. Il y a des choses qu’on sait mais dont on a oublié le contexte. Il y a des choses dont on ne sait pas que l’on sait car les choses rentrent par une oreille et s’échappent de l’autre. Ça c’est les plus nombreuses.

Dans un contexte dont j’ai totalement oublié la nature, j’avais appris que les deux gestes universels pour signifier « oui » et « non » n’étaient en vérité, pas si universels que ça. A l’époque j’avais du répondre « C’est dingue, ça ! » puis depuis ai promptement oublié les pays pour lesquels « oui » et « non » ne se traduisaient pas par respectivement, un hochement de la tête de gauche à droite autour d’un axe vertical et un hochement de la tête d’avant en arrière autour d’un axe horizontal, ainsi que les gestes équivalents dans ces contrées exotiques.

Lors de mes multiples interactions avec des indiens, à une question fermée (dont je rappel aux plus distraits qu’elle n’autorise que trois réponses : oui, non ou bien merde) parfois je les voie me répondre en faisant un geste que tout bon français interpréterait par « mouuaih, j’sais pas trop. j’hésite ». Ceci est particulièrement déstabilisant lorsqu’au restaurant, par exemple, on demande la disponibilité d’un met que l’on sait raffiné :

– Namasté, vous auriez du Coca-Cola, s’il vous plait ?
– <Geste indiquant un mmmmouaih, j’sais pas trop>
– Euh… Vous en avez… ou pas ?
– Yes <j’sais pas trop j’hésite>

Quel manque de confiance en soit, parbleu ! Do you have ou do you not have ?! Or shit ? Voici encore ce qui me traverse l’esprit mais dont j’évite d’exprimer.

Fort heureusement, au détour d’une lecture un peu aléatoire du Lonely Planet, je tombe sur un paragraphe évoquant justement ce bizarre déficit d’affirmation chez les indiens. En réalité, comme vous l’auriez deviner, il ne s’agit absolument pas de ça mais de ci, ce dont je vous parlais au deuxième paragraphe : le geste utilisé en Inde pour exprimer « oui » est tout simplement totalement différent de celui utilisé dans nos contrées tempérées.

Décomposons le mouvement : autour d’un axe horizontal passant à travers la glotte, le sujet imprime un mouvement oscillant de sa tête de gauche à droite tout en imprimant un autre mouvement oscillant de son cou de droite à gauche donnant l’illusion parfaite que sa tête oscille autour d’un axe passant par le nez (quand c’est bien réalisé). Si vous voulez, c’est un mouvement presque similaire que font les danseuses indiennes mais en plus rapide. Les plus pressés gardent le cou immobile et ne bougent que la tête. Mais c’est beaucoup moins joli. Moi je ne pourrai pas le faire. J’aurai trop peur de me briser une vertèbre supérieure et de finir tétraplégique.

Maintenant que je le sais, je comprends mieux ce qu’on me dit, bien qu’il m’est toujours difficile de réagir dans l’instant. Mon cerveau, tellement habitué à son langage corporel doit faire un effort conscient pour contredire ce que lui dit mon subconscient. Ce qui donne maintenant ceci :

– Namasté, vous auriez du Coca-Cola, s’il vous plait
– <Geste du oui>
<silence de quelques secondes>
– Ah, ok, super. Donc je vais en prendre un (index en l’air, toujours).
– <Autre geste de oui>. Ok.
<silence de quelques secondes>
– Ssank you (je fais plus d’effort de prononciation, je vous dit)

Ils doivent me prendre pour un débile.